Avis :
L’univers du rap se divise en deux catégories qui se rapprochent d’un manichéisme à la Star Wars. D’un côté, nous avons les gentils, ceux qui essayent d’exprimer des messages positifs, d’arpenter le chemin sinueux d’un rap franc mais qui utilise de vrais instruments. On peut compter sur Youssoupha, Orelsan ou encore, dans une moindre mesure, Soprano, puisqu’il s’est éloigné depuis longtemps du rap pour faire de la pseudo pop. D’un autre côté, nous avons les méchants, les gros durs, ceux qui plaisent le plus à la jeune génération, et qui, malgré leurs âges (parfois plus de quarante ans), continuent d’être fasciné par les armes, la violence, la drogue et tout ce qui a un rapport avec l’argent facile. De côté des sabres rouges, on retrouve bien entendu Booba, Gradur, Lacrim, Kaaris et d’autres jeunes qui tentent de percer, comme Sch. Diminutif de Schneider, ce jeune rappeur de 17 ans originaire d’Aubagne arbore un rap hardcore qui lorgne du côté des gros bras cités précédemment. Point noir dans la cité phocéenne qui a plutôt tendance à balancer des rappeurs à caractère positif, Sch compte bien se faire nom dans le milieu grâce à son premier projet, A7. Mais qu’en est-il vraiment ? Faut-il vraiment se coltiner cet album qui ne sort jamais des sentiers battus et qui ne fera certainement pas d’ombre aux autres productions du genre.
Le skeud commence avec John Lennon, et le pauvre homme doit encore se retourner dans sa tombe. Sorte d’intro donnant le ton de l’album, Sch ne se démarque pas de ses pairs avec tous les poncifs qui font le genre rap hardcore. On retrouve les gros mots, les mêmes fascinations morbides et les rythmiques lourdes sur lesquelles le rappeur pose ses mots. Seulement voilà, ce style de musique impose vite des limites. On se retrouve vite à tourner à rond au niveau des thématiques. Ça parle de putes, de drogues, de go fast, de kalashnikovs et au final, l’ensemble sonne complètement creux avec des messages égocentriques basés sur la vie rêvée des petites stars du rap qui n’ont pas les arguments pour se défendre. Et ce n’est pas une théorie à deux balles puisque l’on peut remarquer que les gens les plus violents sont les moins cultivés, ceux qui ont un cursus scolaire désastreux et il est difficile de sortir quelque chose de positif de cet album tant tout semble ou superficiel ou dangereux. Il faut quand même se rendre compte que certains gamins regardent ça, s’en inspirent et qu’il n’y a vraiment rien de bon à fantasmer sur l’argent facile ou une violence exacerbée. Mais en plus de cela, certaines paroles confinent à la plus grande des débilités, à l’image de Pas de Manières, un titre carrément insultant sur la femme, où les salopes et chiennes volent à tout va, avec le pourtant talentueux Sadek (dont on avait apprécié le premier album).
Le plus étonnant dans tout ça, c’est que Sch n’est pas forcément idiot, évoquant des références cinématographiques allant du Voyage de Chihiro à John Wick (auquel il s’identifie) et essayant de régurgiter tout ce qu’il a dans le ventre à base d’exemples. Le problème, c’est que tout cela est difficilement compréhensible et les trois quarts du temps, on ne comprend pas ce qu’il dit. Entre les gimmicks des rappeurs, les onomatopées et une autotune en roue libre, on ne comprend pas ce qu’il raconte et même en lisant les paroles, on reste dans le noir le plus complet. Un titre comme Rêves de Gosse reste complètement obscur à cause d’un autotune imbuvable. C’est bien simple, on ne comprend que le passage qui dit « je vais te la mettre au fond de la gorge ». Et c’est problématique, puisque même quand le morceau se veut plus touchant, comme J’Reviens de Loin, on ne comprend pas les paroles, du coup, difficile de se sentir partie intégrante du morceau. A la rigueur, il reste Liquide, un titre avec Lacrim, qui sauve le morceau, complétant la voix nasillarde de Sch avec son timbre plus gras et son flow plus rapide.
Au final, A7, le premier album de Sch est une catastrophe sur tous les points. Vulgaire, mal foutu, avec de l’autotune à ne plus savoir qu’en faire, cet effort ne sort jamais des chemins balisés imposés par le rap hardcore qu’arborent déjà des centaines de petits malins pensant avoir du talent. Il en résulte une œuvre détestable, où tout pue le montage à la va-vite et les instrumentalisations sans saveur. Un premier album aux fausses allures de mauvais garçon qui ne fait que recopier ses pairs sans jamais parvenir à s’en détacher.
- John Lennon
- A7
- Solides
- Gedeon
- Rêves de Gosse
- Genny et Ciro
- Gommorra
- Mauvaises Idées
- Liquide feat Lacrim
- Pas de Manières feat Sadek et Lapso
- Drogue Prohibée
- Champs Elysées
- J’Reviens de Loin
- Fusil
Note : 01/20
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Par AqME