avril 20, 2024

Le Narcisse Noir

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Titre Original : Black Narcissus

De : Michael Powell et Emeric Pressburger

Avec Deborah Kerr, Sabu, David Farrar, Flora Robson

Année : 1947

Pays : Angleterre

Genre : Drame

Résumé :

Sur les contreforts de l’Himalaya, une congrégation de nonnes s’établit dans un ancien harem avec l’intention de transformer le lieu en dispensaire. Dean, un agent anglais, est chargé de les aider à construire l’école qui servira à éduquer les enfants de la région, mais il se heurte rapidement à la sœur Clodagh qui trouve ses manières incorrectes. Au sein de la communauté, la solitude pèse de plus en plus sur les cœurs, et les tensions s’exacerbent…

Avis :

Moins d’une semaine après avoir découvert mon premier film du duo Powell/Pressburger, avec le très beau « Les chaussons rouges« , voilà qu’arrive chez moi, « Le narcisse noir« , un film au titre aussi poétique que très intriguant et j’en attends énormément.

« Le narcisse noir » est très souvent considéré comme l’un des plus beaux films des deux réalisateurs. Un peu comme une pièce maîtresse de leur imposante filmographie, c’est d’ailleurs avec « Les chaussons rouges » les seuls titres qu’on me ressortait vraiment de leur œuvre. J’ai beaucoup aimé « Les chaussons rouges« , mais je dois dire que j’attendais encore plus de celui-ci, surtout depuis mon excellente surprise. Et je peux dire que je suis totalement et amoureusement conquis, car au fur et mesure que j’étais en train de découvrir ce petit bijou, « Le narcisse noir » s’est imposé comme un énorme chef d’œuvre dans tous les sens et m’a laissé, une fois son générique arrivé, complètement émerveillé et essoufflé par ce moment incroyable !

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Près de l’Himalaya, des sœurs britanniques sont envoyées dans un ancien harem afin d’y construire un dispensaire, puis une école pour éduquer les jeunes filles de la région. Une tâche qui s’annonce difficile. Le dispensaire est tenu par Sœur Clodagh qui garde bon espoir de pouvoir accomplir cette mission. Sur place, elles sont aidées par Monsieur Dean, un Anglais établi dans la région depuis quelques années, mais si elle s’en accommode, Sœur Clodagh n’aime pas les manières de cet homme. Alors que la vie essaye de s’installer dans le palais himalayen de Mopu, des tensions commencent à naître entre les sœurs et plus particulièrement entre Sœur Clodagh et Sœur Ruth. Des tensions qui pourraient s’envenimer et prendre une tournure plus dramatique.

Magnifique, pulsionnel, désireux, tendu, « le narcisse noir » est un film qui n’a pas fini de m’éblouir tant la claque fut grande. Michael Powell et Emeric Pressburger signent plus qu’un simple chef d’œuvre, « Le narcisse noir » s’impose d’emblée comme l’incontournable de leur filmographie et comme un classique du cinéma.

Œuvre sur le désir et la frustration, « Le narcisse noir » va installer une tension et une haine palpable petit à petit sans qu’on s’en rende vraiment compte et une fois qu’on s’en apercevra, il sera déjà trop tard. Le scénario est d’une précision absolue où rien n’est laissé au hasard, les deux réalisateurs savent exactement ce qu’ils font et comment ils vont nous emporter vers cette fin, qui va rester, dans ma cinéphilie, comme l’une des plus tendues que j’ai pu voir. Incroyable, elle m’aura scotché à mon fauteuil, elle m’aura angoissé, stressé, énervé aussi et tenu en haleine jusqu’au bout.

Ce film, c’est un peu comme si c’était le yin et le yang qui allait s’affronter. Si Deborah Kerr est, au départ, rigide, elle va devenir sagesse, amour, maîtrise et surtout la parfaite religieuse, alors Kathleen Byron sera son double et surtout son contraire, car au fur et à mesure que le film avance, l’histoire va creuser un fossé entre les deux femmes. Et c’est entre la démence, la fièvre et quelques révélations, que le film va se conclure dans la tension que je vous décrivais plus haut. Jusqu’à quel point peut-on refouler les sentiments qui nous habitent ? Jusqu’où est-on capable de rester par conviction ? Comment peut-on lutter contre ses sentiments ? Ou dans le sens contraire, jusqu’où peut-on se laisser envahir par eux ? Et comment cette frustration, cette honte, mélangée à ce désir, finit par ressortir de nous-même ? Voilà, en quelques questions, ce que « Le narcisse noir » va interroger, et finalement laisser exploser et se confronter. Quand l’une renaît, l’autre s’enfonce et c’est foutrement bien mis en scène.

Toutes ces questions, et bien plus encore, sont posées dans un film à la mise en scène extraordinaire. Ce film est phénoménal dans sa beauté. Chaque scène, chaque plan, chaque séquence, est plus belle que la précédente. La photographie est peut-être l’une des plus belles que j’ai jamais vue. Le film a d’ailleurs décrocher l’Oscar de la meilleure photographie cette année-là. Les couleurs sont sublimes, l’ambiance fabuleuse, d’autant plus que l’Inde est presque entièrement recréée et filmée en studio. Et pourtant, les décors sont très réalistes, cet ancien Harem perché sur cette montagne est fascinant de détails, et les paysages, reproduit en trompe l’œil dans les arrières plans, donnent au film des allures presque oniriques, ce qui donne encore plus de magie et de cachet au film de Powell et Pressburger.

« Le narcisse noir« , c’est la confrontation de deux actrices et j’ai pris un plaisir fou à découvrir cela. Fascinantes et intrigantes, elles sont parfaites jusqu’à la fin. Deborah Kerr compose une Sœur Clodagh, au départ agaçante, mais qui sera finalement très touchante au fur et à mesure que l’on va apprendre à la découvrir grâce aux différents flashbacks parfaitement intégrés. Mais c’est Kathleen Byron, dans la peau et la démence de Sœur Ruth qui m’a fasciné le plus. L’actrice est affolante et même flippante dans ses dernières scènes. Son regard nourri de haine est incroyable, son jeu donne la chair de poule et les deux réalisateurs savent parfaitement la mettre en valeur. Pour le coup, je pense que l’actrice aurait mérité l’Oscar de la meilleure actrice en 1948, tant je l’ai trouvée palpitante.

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Ce film m’aura passionné, fasciné et émerveillé jusqu’à son générique de fin. Il se dégage quelque chose de profondément hypnotique dans ce film, quelque chose qui angoisse autant qu’il envoûte. Avec ses deux actrices magnétiques, avec sa photo incroyable, avec ses plans audacieux, ses décors impossibles et pourtant tellement beaux, et son intrigue finalement déchirante, Powell et Pressburger laissent avec « Le narcisse noir« , un chef d’œuvre incontournable, puissant et déroutant.

Note : 20/20

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=p8UVtzrZvig[/youtube]

Par Cinéted

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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