avril 19, 2024

Life is Strange – Before the Storm

Résumé :

Life is Strange Before the Storm est un jeu d’aventure épisodique développé par le studio Deck Nine Games. Il s’agit d’un prequel du premier jeu paru et raconte les événements qui précédent ce dernier.

Avis :

Alors que Telltale Games semblait monopoliser le domaine des jeux d’aventure épisodiques, genre que le studio a grandement démocratisé, Square Enix prend à contre-pieds les joueurs avec Life is Strange. Thriller surnaturel de haute volée, l’intrigue développait avec habileté les conséquences du voyage dans le temps ; le tout soutenu par une atmosphère d’exception et une bande-son irréprochable. Il en ressortait une incursion à la portée émotionnelle percutante d’une rare justesse dans les thématiques brassées. Comme son titre l’indique, Life is Strange – Before the Storm est une préquelle destinée à exposer les événements survenus à Arcadia Bay avant le retour de Max.

Pour ce faire, l’histoire s’axe sur le point de vue de Chloé. Tout comme le contexte et le cadre cossu de cette petite ville, les personnages sont familiers et l’angle d’approche similaire. Toutefois, les premiers instants tendent à ne pas présenter un fil directeur clair. De plus, le rythme contemplatif n’aide pas forcément à bien distinguer les enjeux autres que l’approfondissement des protagonistes du premier volet. Outre une évidente régression technique qui se remarque surtout sur les expressions faciales et les animations des personnages, il s’agit du principal reproche que l’on pourrait faire au présent titre. Ne pas offrir une véritable histoire à même de justifier cette nouvelle incursion.

De prime abord, cela paraît un écueil foncièrement handicapant pour un jeu d’aventure dont l’intérêt se fonde sur la qualité de la narration. Cependant, ce que le jeu délaisse en matière d’apport scénaristique, il le comble par un sens du relationnel et une caractérisation autrement plus développés et subtils. Le mal-être de Chloé, sa relation ambiguë avec Rachel, le rapport conflictuel enfant/beaux-parents, le refus de l’autorité (scolaire ou familial), les liens (in)défectibles de l’amitié… Autant de points qui trouvent une résonnance particulière à travers des séquences et des échanges détaillés en fonction des personnalités de chacun.

L’occasion est également donnée d’évoquer des thèmes dans la continuité de son prédécesseur. On retrouve la transition difficile de l’adolescence, le deuil d’un proche et, de façon plus généraliste, la crainte de l’avenir, ainsi que la propension au fatalisme qui en découle. Rares sont ces sujets à être abordés de manière aussi réaliste que timorée, car dénués de tout dogmatisme et manichéisme dans les propos avancés. Et cela se vérifie avec d’autres aspects qui rendent l’ensemble à la fois mature et accessible. On songe aux problèmes d’addiction liés à la drogue et l’alcool, au mensonge par intérêt et par altruisme, mais surtout à l’identité sexuelle.

Ce dernier point est peu évoqué dans le domaine du jeu vidéo et, lorsque c’est le cas, il se révèle assez basique et perclus de clichés. En l’occurrence, l’approche est d’autant plus délicate quand il s’agit de relations homosexuelles. Force est de constater que les développeurs en ont eu parfaitement conscience. Là encore, on évite les comportements caricaturaux et les idées reçues. L’histoire amoureuse entre Chloé et Rachel sonne particulièrement juste, car elle découle de leur amitié et d’une découverte progressive de l’autre. Des aspirations communes, un environnement familial chaotique, une volonté de s’émanciper et de s’affranchir des normes sociétales… Tout cela concourt à tisser une relation fondée sur la confiance et la complémentarité de la partenaire dans ce qu’elle apporte au couple.

Avec l’aspect du voyage temporel occulté, le gameplay se tourne davantage vers l’exploration. Si Life is Strange ne proposait guère d’énigmes retorses, son successeur en est totalement dépourvu. Entre deux échanges, on fouille les coins et les recoins des environnements en quête d’anecdotes ou de petits détails tels que des mails, des graffitis, des effets personnels. Cela semble anodin, mais ces éléments concourent à dépeindre le quotidien à Arcadia Bay et du rôle de chacun. On notera la présence de duels verbaux qui offrent de nouvelles orientations aux dialogues, même s’ils prêtent à peu de conséquences sur la direction générale de l’histoire.

Avec une moyenne approximative de deux à trois heures par épisode (au nombre de trois), une partie se boucle entre six et neuf heures, et ce, sans compter l’épisode bonus « Adieux ». Il y a bien un mode collectionneur pour revivre ses séquences préférées ou dénicher quelques anecdotes supplémentaires, mais la rejouabilité tient surtout au plaisir d’apprécier l’atmosphère si spécifique d’Arcadia Bay. Quant aux chemins narratifs dus aux choix moraux, ils ne sont guère alambiqués et changent peu d’éléments. Cette simplicité contraste grandement avec les manipulations temporelles du premier volet où la moindre incidence pouvait avoir des répercussions radicales.

Au final, Life is Strange – Before the Storm est avant tout une affaire d’ambiance. S’il souffre d’une comparaison légitime avec son aîné, il n’en demeure pas moins un titre différent d’une grande maturité, eu égard à sa connotation LGBT. Quant à ses écueils, ils restent formels. Le récit puise sa raison d’être dans le relationnel de ses protagonistes. L’approche contemplative est soutenue par une bande-son de qualité et quelques séquences marquantes. Les rêves apportent une touche d’étrangeté que ne renierait pas Twin Peaks, tandis que la représentation de La Tempête de Shakespeare s’avère l’un des moments les plus chargés en symboliques et en émotions. Au vu de son statut de préquelle, on ne peut parler de conclusion, mais d’un complément plus qu’appréciable pour se rendre une nouvelle fois à Arcadia Bay.

Note : 14/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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