avril 24, 2024

Graham Masterton – Le Portrait du Mal

1004-portrait

Résumé :

Ils étaient prêts aux pires atrocités pour conserver l’éternelle jeunesse. Un portrait de douze personnages au visage en décomposition… La toile est l’oeuvre d’un certain Waldegrave, ami d’Oscar Wilde et passionné d’occultisme, mais elle est sans valeur et plutôt médiocre. Alors pourquoi la mystérieuse Cordelia Gray veut-elle à tout prix s’en emparer ? Quel est le secret du portrait ? Qui sont ces douze personnages ? Vincent Pearson, l’actuel propriétaire du tableau, découvre un lien entre cette oeuvre démoniaque et une série de meurtres particulièrement abominables qui secouent la Nouvelle-Angleterre depuis quelques mois.

Avis :

Après des débuts dans le journalisme, puis dans les romans à tendance sexuels, Graham Masterton s’est dirigé rapidement vers le fantastique et vers le roman horrifique. Avec une quarantaine de romans à son actif, l’écrivain d’origine écossaise, va vite se faire une grosse réputation et devenir l’un des plus grands écrivains d’horreur aux côtés de Stephen King et de Dean Koontz. Ecrit en 1987, le portrait du mal allie habilement policier, horreur et fantastique, en y ajoutant une touche d’art et d’histoire. Profondément sombre et dérangeant, il est dans la claire ligne de l’écrivain, qui, comme Rituel de chair, arrive à dégouter mais à rendre addictif en même temps. Alors quel est le secret de ce livre pour être aussi malsain et pour être aussi bon en même temps ? Bienvenu chez les Gray !

Le roman commence violemment, avec un magnifique meurtre bien mis en image et instaurant d’entrée de jeu une ambiance très malsaine. On assiste alors au dépeçage à vif d’une jeune demoiselle par un monsieur d’allure bizarre, qui dit qu’il a besoin d’une peau parfaite. S’ensuit la rencontre d’un vendeur de tableaux d’art, et d’une femme, à la beauté parfaite, souhaitant un Waldegrave. Seulement, les meurtres s’enchainent autour de Vincent Pearson, le revendeur de tableaux, mais aussi des faits mystérieux. Il va alors s’allier avec Jack, le shérif du Connecticut, du docteur Serling ainsi que de Pat, une médium et de Charlotte sa petite-amie pour savoir ce que cache la famille Gray, visiblement auteur de ces meurtres mais aussi possédant visiblement un don pour ne pas vieillir alors que le tableau de Waldegrave les représentant pourri à vue d’œil. L’histoire s’inspire librement du roman de Dorian Gray, mais avec une grosse pointe de gore, puisque entre les vers sortant des personnages de la famille ainsi que de leur besoin de peau pour cacher leur putréfaction, mais aussi leurs vices absolument abjects et leur absence de scrupule, on voit une famille qui a vendu son âme au diable pour ne plus vieillir et vivre éternellement. De ce point de vue, Masterton pose la question de l’éternité, de ce que nous pouvons devenir en restant éternels, et de la folie qu’engendre l’absence de la mort. Il impose donc que la mort est une nécessité et que lorsque l’on voit cette famille de dégénérés, on ne peut qu’être d’accord avec lui.

Mais outre un scénario bien ficelé qui est vraiment surnaturel, Masterton écrit avec une facilité déconcertante et on prend un réel plaisir à lire ses livres. Les descriptions sont correctes, mais elles ne tombent pas dans le verbeux interminable d’une Lovecraft. Par contre, son écriture est très noire, très sombre, et il a le talent de nous embarquer dans cette noirceur tentaculaire qui en devient passionnante. Si King possède aussi ce talent, Masterton est plus vicieux et surtout plus malsain que King. L’ambiance du récit est très sombre aussi, dans un Connecticut sauvage et désolé, avec des décors enneigés qui contrastent avec la profonde obscurité de l’histoire.

Tous les personnages ne laissent pas indifférents et on ressent une grande amitié pour le héros ainsi que pour son histoire, alors qu’au début, il était assez désagréable. On va aussi détester la famille Gray, famille tellement absorbée par sa quête d’immortalité, qu’ils vivent dans le péché et dans la décadence. On va aimer aussi le docteur Serling, médecin de campagne et héros inconnu, tout comme Jack, le shérif, assez ouvert d’esprit pour finalement croire au surnaturel. Tous ces personnages sont décrits avec finesse et on se les imagine facilement dans notre monde réel.

Enfin, la fin demeure très surprenante, un poil trop surréaliste à mon gout, mais en même temps, on évolue avec les peintres et les vieux tableaux, mais elle argumente quelque chose qui me plait, et qui met en avant la force de la pensée et surtout la force de l’imagination. En gros, on nous explique que toute idée, tableau, livre, peut réellement exister si des gens y pense assez fort et restent persuadés que tous ces paysages, décors, personnages existent. Du coup, le voyage de tableau en tableau devient possible, tout comme le voyage dans le temps et cela montre l’importance de l’imagination et de la libre pensée. Même si cela demeure assez obscur, j’ai vraiment apprécié ce point de vue qui me caractérise vraiment.

Au final, Le Portrait du Mal de Graham Masterton est une réussite et propose une vision vraiment sombre de l’immortalité. Malsain, sale, gore et pourtant très prenant, le livre présente une course-poursuite infernale mettant en avant esprit, corps pourrissants et décadence du XIXème siècle. Résolument addictif et très original, la liaison avec l’histoire est parfaite et donne un nouveau sens à cette lecture. Je conseille à tous les amateurs de lecture horrifique.

Note : 15/20

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

Voir tous les articles de AqME →

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.