mars 29, 2024

Coeur de Pirate – Trauma

a3799110102_10

Avis :

Quand un artiste fait un album de reprises, il y a deux sons de cloches. D’un côté, on peut se poser la question sur la raison de l’existence même de l’album. Est-on face à quelque chose de purement mercantile ? L’artiste a-t-il vraiment voulu faire hommage à ses références ? De l’autre, on peut y voir une prise de risque de la part de l’artiste, essayant de parfois de reprendre des chansons cultes sans y apporter de nouveautés, ou pire, les massacrer sans vergogne. On a pu voir Macy Gray s’y essayer avec un certain brio, tout comme Anastacia avec son album de reprises de chansons rock. Mais de nombreux chanteurs se sont fait descendre à cause de reprises diluées et complètement inutiles, sauf pour un aspect mercantile. Il ne faut pas croire que Les Enfoirés font ça par plaisir, c’est aussi et surtout un tremplin visuel pour les artistes qui font leur pub. Cœur de Pirate se fait connaître et reconnaître en 2009 en France avec le titre Comme des Enfants. Sa voix nasillarde, son joli minois et son accent québécois faisant son charme, la jeune femme sort un deuxième skeud en 2011 et connait encore une fois un beau succès. Travaillant sur plusieurs projets à la fois, elle compose la musique du jeu vidéo Child of Light puis sur la bande originale de la cinquième saison de Trauma, une série canadienne. Elle décide alors d’en faire profiter tout le monde et met l’album en vente et là, c’est une catastrophe.

Pour commencer le skeud tranquillement, la chanteuse nous propose sa version de Ain’t No Sunshine de Bill Withers. Morceau reconnu pour ses nombreuses reprises, Cœur de Pirate essaye de poser sa voix sur un titre quasiment à cappella. Seulement, son côté nasillard n’a rien de bien sensuel et le morceau s’avère presque pénible à tenir sur les deux minutes qu’il dure. La version n’a rien d’original et il vaudra mieux se pencher sur celle du Black label Society qui est stratosphérique. Le titre suivant et une reprise des sœurs McGarrigle et il est impossible de faire un comparatif si on ne connait pas la chanson original, Heartbeats Accelerating. Néanmoins, le titre est un peu plus sympathique que le précédent. C’est mou, certes, mais au moins il y a de la guitare en fond, une batterie redondante et quelques voix féminines pour renforcer celle de la chanteuse principale. Le morceau est inoffensif mais il se révèle chiant sur sa longueur. Le titre suivant va chercher plus loin dans le temps, puisqu’il s’agit de Summer Wine, une reprise de Nancy Sinatra et Lee Hazlewood. Et le fait est que l’on a l’impression d’entendre la même chose que le morceau précédent, à la différence qu’il y a un violon. Le constat est évident, si c’est mignon, c’est lent et franchement lénifiant. Ce sera d’ailleurs le principal défaut de tout l’album, qui ne décollera jamais et qui sera d’une platitude effroyable. Le morceau suivant, You Know I’m No Good, est une reprise du célèbre titre de Amy Winehouse. Alors déjà qu’à la base, le titre est assez lent, mais il est brillant dans son instrumentalisation, on est ici face à quelque chose de minimaliste et de profondément chiant. Le petit piano n’y changera rien et Cœur de Pirate n’a pas la voix divine qu’avait Amy Winehouse. La pièce suivante est une reprise de The Libertines, Music When the Lights Go Out, qui est assez calme mais qui possède un moment plus rock en son milieu. Il ne faut pas chercher le moindre son rock dans cette reprise qui sera monolithique et très pénible. C’est alors que la chanteuse s’attaque à du Pearl Jam avec Last Kiss. Et là, c’et la débandade, le morceau de trop. Déstructurant tout ce qui faisait le charme du morceau, la chanteuse québécoise va massacrer le titre et le rendre aussi ennuyeux que possible, lui retirant tout sentiment.

coeur_pirate_600x340

Pour entamer la deuxième moitié de son skeud, la chanteuse s’attaque à l’un des plus beaux morceaux de blues du monde. Lucille de B.B King est un morceau divin, intouchable et elle arrive à le massacrer, lui retirant toute son essence pour en faire quelque chose sans saveur, sans émotion et sans envie de faire quelque chose de musicalement intéressant. Slow Show, une reprise du groupe The National, demeure le seul titre valable sur ce skeud. Un poil plus pêchu, avec un joli piano et un violon qui tombe à pic, le titre est beau et s’écoute avec plaisir, même si ce n’est pas la panacée. Pour agacer un peu plus, la jeune dame s’attaque à Bottom of the World du grand Tom Waits. Enlevant tout le charme du morceau original, autant guitare et tout le reste, on a l’impression d’être dans un morceau religieux avec un orgue dégueulasse. A ce rythme-là, on n’est pas dans l’hommage, mais dans le jeu de massacre et ça fait mal pour les titres originaux. Mais le pire reste encore à venir avec Dead Flowers. La chanteuse ose reprendre du Rolling Stones, pour enlever les guitares et faire un morceau d’une mollesse incroyable et qui ne se soulèvera jamais. Une honte alors que le morceau original est une tuerie. Elle s’attaque ensuite à Patrick Watson avec The Great Escape et le morceau est sensiblement le même que l’original, se voulant mou et mélancolique. Le skeud se termine avec Flume et il est à l’image de tout l’album, c’est-à-dire mou et sans envergure.

Au final, Trauma, la compilation de Cœur de Pirate pour la série télé du même nom, est une belle et grosse purge. Défonçant sans aucun remord des morceaux cultes de blues et de rock, la chanteuse se permet de sortir ce skeud de derrière les fagots pour essayer de se relancer avant un hypothétique album original. Quoi qu’il en soit, réussir à faire un album aussi plat, ça relève de l’exploit, ça en est traumatisant, comme une ligne horizontale sur un monitoring.

  1. Ain’t No Sunshine
  2. Heartbeats Accelerating
  3. Summer Wine
  4. You Know I’m No Good
  5. Music When the Lights Go Out
  6. Last Kiss
  7. Lucille
  8. Slow Show
  9. Bottom of the World
  10. Dead Flowers
  11. The Great Escape
  12. Flume

Note: 02/20

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=A_KXB0IeFU8[/youtube]

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

Voir tous les articles de AqME →

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.