avril 25, 2024

Je Suis une Légende – Richard Matheson

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Auteur : Richard Matheson

Editeur : Folio

Genre : Science-Fiction

Résumé :

Chaque jour, il doit organiser son existence solitaire dans une cité à l’abandon, vidée de ses habitants par une étrange épidémie. Un virus incurable qui contraint les hommes à se nourrir de sang et les oblige à fuir les rayons du soleil…

Avis :

Soixante ans se sont écoulés depuis la sortie d’un des livres majeurs de Richard Matheson. Six décennies au cours desquelles l’un des piliers fondateurs de la science-fiction et précurseur du récit post-apocalyptique n’a cessé d’inspirer les médias culturels et les plus grands artistes contemporains (Stephen King, George Romero…). Classique parmi les classiques au même titre que les ouvrages d’Orwell, Asimov ou K. Dick, Je suis une légende possède toutes les qualités de ces œuvres intemporelles dont on ne se lasse pas. Le genre d’histoires qui traverse les époques sans vieillir, se lit et se relit avec un plaisir intact. Petit retour en arrière sur un roman qui porte décidément très bien son nom.

Dès les premières lignes, Matheson fait montre d’une sobriété et d’une mesure exemplaire dans son style. La justesse dans les choix de l’auteur, l’épure des descriptions narratives (pourtant prépondérantes étant donné que Robert Neville est censé être le dernier homme sur Terre) ou la poésie qui émane des métaphores font du livre un bijou sur le plan purement formel. Simple, directe et percutante, la force que dégagent les mots n’a d’égal que leur impact sur le lecteur. Mais l’histoire s’arrêterait là si le présent ouvrage n’était qu’un formidable exercice littéraire. Car, si la technique suit, encore faille-t-il que le fond fasse de même…

Sur ce point, Richard Matheson frappe un grand coup. Il ne se contente pas de poser les bases d’un univers post-apocalyptique, mais apporte au genre tout ce qui le compose aujourd’hui. Une ville fantôme en proie à la désolation où les spectres émergeant d’une nouvelle espèce hantent les lieux. La cause ? Un virus qui sera réutilisé plus tard dans les récits de zombies, mais aussi dans des œuvres incontournables telles que Le fléau de Stephen King. Sans prendre de risques, on peut dire que Je suis une légende est un précurseur en la matière. Pourtant, le virus qui ravage l’humanité ne crée pas des morts-vivants (enfin, presque…), mais des vampires.

L’intrigue ne repose pas uniquement sur un cadre délétère et une pandémie fatale, elle s’appuie également sur une déclinaison non moins originale du célèbre mythe. Les créatures de la nuit sont décrites tantôt comme des âmes errantes surgies d’outre-tombe, tantôt comme des êtres doués d’intelligence qui tendent à former une nouvelle civilisation sur les ruines de la précédente. Entre un aspect plus ou moins animal, l’on a droit à une rétrospective de tout ce qui les concerne, particulièrement pour les tuer. Le point de vue avancé reste très pragmatique avec des arguments scientifiques crédibles ou des faits historiques évoqués. Une approche qui, encore aujourd’hui, se montre des plus singulières.

Étant donné que le nombre de protagonistes est assez restreint, il aura fallu un travail particulièrement conséquent pour étayer le personnage de Robert Neville. On s’y attache rapidement en se sentant davantage comme un compagnon d’infortune, plutôt qu’un témoin passif des événements. Pourtant, l’on trouvera également quelque réconfort dans la venue du chien, des souvenirs évoqués avec nostalgie, du pathétique Ben Cortman ou de la présence tardive de Ruth, point d’orgue de l’histoire. De fait, à l’atmosphère désenchantée s’ajoute une dimension émouvante au destin du dernier homme sur Terre.

Au final, Je suis une légende est un livre fondateur. Novateur, immersif et sans concession, le roman de Richard Matheson marque encore les esprits pour ceux qui entreprendrait l’ultime aventure de notre civilisation. Non dénué de propos engagés sur le devenir de la société, du système politique, de la religion, de la violence et par extension de la nature humaine, ce chef d’œuvre fait montre d’une richesse rare (surtout si l’on considère le peu de pages – 240 en format poche) sans prendre une ride. À mon humble avis, le seul texte parvenu à l’égaler sur le plan émotionnel (et pour demeurer dans le registre post-apocalyptique) est La route de Cormac McCarthy. Toujours est-il que l’engouement autour de ce livre n’est pas prêt de se tarir avec des questions qui restent d’actualité. Un précurseur indispensable.

Note : 19/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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