Julien Doré – Love

Avis :

Quel est le futur des vainqueurs des émissions de télé-crochet ? On peut se poser la question tant les concurrents sont nombreux et les retombées médiatiques faibles. D’ailleurs, il est difficile de sortir un nom de vainqueur vu le nombre d’émissions de musique de merde et le nombre de participants à ce genre de télé-crochet dans l’espoir d’avoir son petit quart d’heure de gloire promis par Andy Warhol. Mais parfois la surprise arrive et un p’tit gars sort du lot, arrive à se démarquer de la masse grâce à son culot ou son talent. Julien Doré fait partie de ceux-là. Remarqué et presque remarquable lors de ses prestations, totalement habité et proposant des versions différentes des copieurs habituels, le monsieur a su trouver un public. Et pourtant, ce n’était pas gagné, car l’univers du bonhomme est complexe et totalement barré. Néanmoins, il arrive à maintenir le cap et son côté de popularité grâce à sa reprise de Lolita mais aussi grâce à un sens inné de la vidéo second degré et d’un certain sens du ridicule assumé. Après avoir gagné la nouvelle star en 2007, il sort un album qui fonctionne, Ersatz, puis continue sur sa lancée avec Bichon, dont l’accueil est un peu plus froid. Après un retour aux sources dans sa Province (le monsieur est originaire de Nîmes), il sort Love, un album planant, complexe, mais terriblement prenant. Retour sur un skeud pas comme les autres.

S’ouvrant sur un titre ultra planant et d’une langueur moite, Viborg propose un titre poétique et sensuel qui montre la direction prise de l’album. C’est beau, c’est clair, le refrain est efficace et ça fleure bon l’électro psychédélique et la chanson française d’amour. La voix suave et chaude de Julien Doré fonctionne à merveille et les petits accords à la guitare et à la batterie fonctionnent parfaitement. Directement derrière suit Paris-Seychelles le hit de l’album et c’est aussi une réussite. Parfaitement entêtant, posé et presque sexuel, le titre est franchement très bon. On regrettera peut-être des paroles complètement hallucinantes et qui nécessite une version écrite pour bien en saisir toutes les subtilités. Habemus Papaye est le titre le plus exotique, rappelant les belles heures d’un disco langoureux avec un clavier omniprésent. Fort sympathique, ce titre est une ode au genre soul/funk posé et le solo de clavier est très réussi. C’est alors que surgit Hôtel Thérèse, titre le plus rock mais aussi possédant les paroles les plus virulentes envers un amour déchu (J’veux pas qu’on te touche, j’volerai les reins des enfants rois qui à tes seins pendront leur bouche). Tout cela reste tout de même assez calme, avec un petit passage au piano, mais c’est encore une fois vraiment bien foutu. Heaven est un des points faibles de l’album, car le titre ne s’envole jamais et ne reste pas forcément en tête. Heureusement, il reprend du poil de la bête avec Chou Wasabi (oui, le skeud est rempli de titres bizarres tout comme les paroles) et son refrain en anglais. Encore une fois, c’est plutôt cool comme attitude et ça fleure bon les années 80 tout en gardant une certaine fraîcheur. C’est alors que survient le titre improbable. Platini est le hors-sujet du skeud, s’axant autour du foot mais surtout permettant à Julien Doré de reprendre sa voix de tête qui fonctionne à merveille mais aussi des chœurs vraiment bien ficelés. Néanmoins, les paroles restent complètement barrées et il est très dur de prendre ce morceau au sérieux.

Pour entamer la seconde moitié de son album, le chanteur attaque avec un titre plus rock, avec une guitare en tête de liste. Malheureusement, London Nous Aime est un titre faiblard qui ne reste pas en tête et c’est dommage. Mon Apache renoue avec les titres au piano et à la douceur chaude. C’est une réussite car le titre est prenant malgré des paroles encore une fois difficile d’accès car très, voire trop poétique. On Attendra l’Hiver peut se rapprocher d’un titre de Benjamin Biolay dans la structure et le style. Sauf que là, ça fonctionne et c’est beau et scandé avec une batterie efficace. Corbeau Blanc est le morceau le plus déprimant du skeud, avec son genre électro planant, parlant de suicide. Mais malgré cela, le titre reste accrocheur grâce à une instrumentalisation intelligente et efficace. Balto est le titre le plus mauvais du skeud car il n’est ni accrocheur, ni bien foutu. Par contre, Porc Grillé est surement l’un des meilleurs titres de l’album, alliant un phrasé chanté efficace et un arrangement à base de piano et basse/guitare qui monte crescendo. Vraiment innovant et intéressant. Memories clôt l’album de façon décevante, car trop calme trop classique et sans ce grain de folie qui fait le charme du chanteur. Il prouve néanmoins que les paroles en anglais sont moins barrées que les paroles en français et c’est plus facile pour la compréhension. On passera sur les trois arrangements électro de Paris-Seychelles qui n’apportent rien au skeud.

Au final, Love, le dernier album de Julien Doré est une bonne surprise. Planant, aérien, poétique, le skeud a tout pour plaire et il ne tombe pas dans le commercial facile. Réussissant à garder sa ligne de conduite et son intégrité, le chanteur prouve qu’il est une figure important de la chanson française et qu’il ne fait pas que dans le pathos ou le ridicule. Très sympa malgré quelques titres faiblards.

1. Viborg
2. Paris-Seychelles
3. Habemus Papaye
4. Hôtel Thérèse
5. Heaven
6. Chou Wasabi
7. Platini
8. London Nous Aime
9. Mon Apache
10. On Attendra l’Hiver
11. Corbeau Blanc
12. Balto
13. Porc Grillé
14. Memories
15. Paris-Seychelles Griefjoy Club Remix
16. Paris-Seychelles Leomeo Ibiza Sunset Radio Remix
17. Paris-Seychelles GuillaumeF Griefjoy Remix

Note : 14/20

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Par AqME