avril 20, 2024

Death Note

De : Adam Wingard

Avec Nat Wolff, Margaret Qualley, Lakeith Stanfield, Shea Whigham

Année : 2017

Pays : Etats-Unis

Genre : Horreur, Thriller, Fantastique

Résumé :

Inspiré du célèbre manga japonais écrit par Tsugumi Ohba et illustré par Takeshi Obata, Death Note suit un lycéen qui trouve un carnet doté d’un pouvoir surnaturel : quiconque le possède condamne à mort ceux dont il y inscrit le nom en pensant à leur visage. Enivré par un sentiment de toute-puissance quasi divine, le jeune homme commence à tuer ceux qu’il estime indignes de vivre.

Avis :

Le manga, comme tout support culturel, a ses œuvres cultes, ou tout du moins ses phénomènes qui amènent à de nombreuses ventes. Ce fut le cas pour Death Note, manga paru en 2006 et qui connut un immense succès à travers le monde. Il faut dire que l’histoire est assez intéressante, puisqu’elle explore la peine de mort comme une justice juste quand elle s’en prend à des truands, et confronte deux intelligences aux points de vue radicalement opposé. Le manga se veut pointu, avec de longs dialogues qui se voient s’affronter deux lycéens au quotient intellectuel élevé. Forcément, il n’en fallait pas plus pour voir des adaptations live, notamment au Japon, avec une paire de films, puis aux States, avec une adaptation qui aura fait couler beaucoup d’encre. Dirigé par Adam Wingard (The Guest et You’re Next à l’époque), véritable geek, le film américain ne va malheureusement accumuler que des défauts.

Tout va trop vite

Ce qui faisait la force du manga, c’est sa propension à livrer des batailles d’idées pour trouver le tueur, mais aussi pour échapper à la police. D’un côté, Light se doit de se couvrir pour ne pas finir en prison. D’un autre, L doit redoubler d’intelligence pour trouver le tueur et le compromettre avec de véritables preuves. Le principal problème avec le film, c’est qu’il enchaîne tout très vite, comme s’il courait après le temps. L’introduction est d’ailleurs un problème, car elle impose de suite le cahier, et pose Light comme une sorte de looser qui va devenir un beau gosse aux yeux d’une tarée qui s’appelle Mia. On aura droit à une romance hyper rapide, qui fait l’effet d’un long clip vidéo, avec ce qu’il faut d’enchaînement entre meurtres, baise et course sous la pluie.

Tous les clichés sont là, et on pourrait croire à une installation rapide d’une romance malsaine, mais le film ne prend jamais le temps d’installer cela. Pire, il ne prend pas le temps de présenter ses personnages et de les rendre attachants ou empathiques. On sait que Light a perdu sa mère à cause d’un connard qui s’en est sorti. On voit que sa relation avec son père est tendue, mais c’est tout. Quant à Mia, on ne saura rien, présentant juste une jeune fille mal dans sa peau et qui voit l’utilisation du cahier comme un exutoire, n’hésitant pas à buter des innocents pour s’en sortir. L’intrigue ne tient alors pas debout, les plot twists s’enchainant à vitesse grand v sans jamais poser une ambiance ou des personnages qui tiennent la route. Adam Wingard semble vouloir se dépêcher, tout en stylisant à l’extrême son métrage, pour plaire aux adolescents.

Public cible

L’autre gros défaut du film, c’est de ne pas savoir se situer quant au genre. Sorte de mélange entre thriller, horreur et fantastique, Adam Wingard ne sait jamais comment se placer, ni à qui s’adresser. Car même si on voit que les adolescents sont le public cible, certains passages restent assez costauds, comme ce pauvre lycéen qui va se faire décapiter en gros plan. Ce sera la seule séquence gore du film, mais elle reste très graphique, voire impressionnante pour un public non habitué. Pour le reste, entre la romance, les courses-poursuites ou même la réalisation, tout laisse à croire que le réalisateur savait pertinemment qu’il s’adressait à des jeunes. La réalisation, d’ailleurs, se veut dans l’ère du temps. Le film donne l’effet d’un gros clip vidéo. La musique est omniprésente. Elle en devient envahissante, notamment sur des passages au ralenti qui ne servent en rien l’intrigue.

Une intrigue bien mince qui réduit comme peau de chagrin la confrontation entre Light et L. Et c’est con, car c’est ce qui permettait au manga de tenir la route. Là, on aura à peine deux dialogues, rapidement expédiés pour montrer l’aspect machiavélique de Light, quand bien même il ne veut pas tuer d’innocents. Mais le personnage de Light, même s’il reste anecdotique, comme le jeu de l’acteur Nat Wolff, est plus travaillé que celui de L, qui restera un mystère. Surdoué aidant la CIA, le personnage n’est ni attachant, ni intéressant, même quand il montre quelques failles. Il n’est pas suffisamment caractérisé et ce ne sont pas ses tics repris depuis le manga qui changeront quoi que ce soit. Lakeith Stanfield ne semble pas intéressé par ce rôle et il fait le minimum syndical.

Ryuk sous exploité

C’est problématique, car des personnages qui se veulent profonds ne sont traités qu’en surface, jouant, en plus, sur notre suspension d’incrédulité. C’est-à-dire que dès le départ, L expose son hypothèse que seul un fait surnaturel peut être capable de tuer comme cela. C’est-à-dire que dès le début, il croit à l’impossible, sans jamais être remis en cause par qui que ce soit. C’était d’ailleurs le même problème dans le manga, qui n’arrivait pas à rester crédible sur la longueur et les suppositions de l’enquêteur. Outre cela, on retrouvera des personnages sous-exploités, comme l’homme de main de L, ou encore Ryuk, le démon. Ce dernier mange des pommes, se délecte du malheur des autres, mais il reste constamment dans l’ombre et ne sert finalement à rien, si ce n’est à exposer certaines règles du cahier. Encore une fois, le film passe trop vite sur des éléments qui auraient dû être essentiels.

Au final, Death Note est un mauvais film. Adam Wingard semble tout simplement incapable de s’approprier le manga, ou son essence, pour en faire un thriller fantastique qui tient la route. Si la force du manga réside dans les personnages et leur confrontation, le film préfère arpenter le chemin de la romance malsaine pour plaire aux ados, sans pour autant approfondir le moindre personnage. Le tout est servi à la sauce faussement pop avec ralentis et musique omniprésente sans que cela fasse avancer l’intrigue, juste pour faire plus jeune, dans l’air du temps. Un film insignifiant donc, qui démontre peut-être l’incapacité de Wingard à s’approprier les œuvres des autres, ce qu’il prouvera avec son calamiteux Blair Witch. Et dire qu’une suite est prévue…

Note : 06/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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