avril 25, 2024

La Chute de l’Empire Américain

De : Denys Arcand

Avec Alexandre Landry, Maripier Morin, Rémy Girard, Maxim Roy

Année : 2019

Pays : Canada

Genre : Policier, Comédie

Résumé :

À 36 ans, malgré un doctorat en philosophie, Pierre-Paul Daoust est chauffeur pour une compagnie de livraison. Un jour, il est témoin d’un hold-up qui tourne mal, faisant deux morts parmi les gangsters. Il se retrouve seul avec deux énormes sacs de sport bourrés de billets. Des millions de dollars. Le pouvoir irrésistible de l’argent va bousculer ses valeurs altruistes et mettre sur sa route une escort girl envoûtante, un ex-taulard perspicace et un avocat d’affaires roublard.

Avis :

Si Denys Arcand a beaucoup tourné pendant une trentaine d’années, avec les années 2000, le réalisateur qui prend de l’âge, s’est fait de plus en plus rare, au point de laisser six à sept ans entre ses films. Après avoir conclu ses années 2000 avec « L’âge des ténèbres« , Denys Arcand a passé les années 2010 de manière très discrète, puisque « Le règne de la beauté » est sorti directement en VOD et « La chute de l’Empire Américain« , qui est le troisième et dernier « épisode » de sa trilogie commencé en 1987, est sorti quasi dans l’anonymat.

Seize ans après le bouleversant « Les invasions barbares« , alors qu’il n’était absolument pas prévu d’une faire une trilogie, Denys Arcand revient avec donc un nouveau chapitre et c’est un chapitre très étonnant, car si vous pensiez retrouver les personnages que vous aviez adoré dans « Le déclin de l’Empire Américain » et « Les invasions barbares« , vous pouvez passer votre chemin, car « La chute de l’Empire Américain » n’a strictement rien à voir avec ces deux films. Conçu en dehors des deux films, Denys Arcand a toutefois décidé de l’inscrire comme une conclusion de trilogie, car ce nouveau film a des sujets très similaires et notamment l’argent et l’économie, qui sont évoqués dans une mesure plus ou moins grande à travers les films. Voilà, donc une fois ceci replacé, une fois l’étonnement passé, « La chute de l’Empire Américain » se pose comme un bon cru pour le cinéaste, qui livre là un film surprenant, pas très moral, intelligent, pertinent, rythmé et toujours tenu par des dialogues cuisinés aux petits oignons.

Pierre-Paul Daoust est le parfait citoyen qui a coché toutes les cases qu’on lui a demandé de cocher. Pourtant, malgré un doctorat en philosophie, Pierre-Paul, trente-six ans, est livreur, et il peine à gagner sa vie et surtout, il peine à être heureux. Mais sa vie est sur le point de radicalement changer quand un matin, pendant sa tournée, il assiste à un braquage qui se transforme en règlement de compte. Seul témoin sur les lieux, Pierre-Paul se trouve face à deux sacs remplis de billets. Des millions de dollars sont à portée de mains et le jeune homme se dit que c’est la chance de sa vie. Ainsi, avant l’arrivée de la police, Pierre-Paul subtilise l’argent. Or, que faire de ses millions que tout le monde recherche et derrière, lui, le citoyen honnête et altruiste, résistera-il à la perversion de l’argent ?

Après avoir parlé des relations de couples avec « Le règne de la beauté« , Denys Arcand est de retour pour parler argent, et par la même occasion clôturer ce qui est désormais la trilogie Arcand.

« La chute de l’Empire Américain » commence avec un braquage qui tourne mal, et très vite, on comprend qu’il va falloir oublier, ou du moins mettre de côté, Rémy et ses potes, car ce troisième chapitre va être on ne peut plus différent. Ici, le fil conducteur de la trilogie, c’est le rapport à l’argent, et le regard que les personnages posent sur la société qui les entoure.

Doté d’un scénario très surprenant, « La chute de l’Empire Américain » se pose presque comme un film d’arnaque et entre suspens et intrigue, Denys Arcand va nous amuser avec les mésaventures de Pierre-Paul.

Si dans son intrigue, il est vrai que son fil rouge n’est pas incroyable, un personnage se retrouve par hasard avec un magot et il ne doit pas se faire prendre, Denys Arcand, comme à son habitude, surprend de par les tournures et les chemins qu’il fait emprunter à ses personnages, car entre les lignes, tout en subtilité, tenant toujours ce ton acerbe et cynique qu’on adore, Denys Arcand livre, encore une fois, une sacrée bouffée d’air frais.

Loin de toute facilité, tenant un sacré bon suspens, étant quasi-imprévisible, ne cherchant pas à être lisse, on se laisse emporter auprès de ces personnages, et ce film ne cesse de piquer la curiosité, car il est bien impossible de savoir comment tout ceci va bien pouvoir se conclure.

De plus, à travers cette histoire, Denys Arcand, comme toujours, explore tout un tas de bons sujets. Étonnant, pas toujours moral, le metteur en scène explore ici le pouvoir de l’argent, l’ascenseur social, les magouilles, pointant du doigt les banques et plus largement le capitalisme. Le réalisateur aborde l’amour aussi, le paraître, la solitude, le fait de ne pas être adapté à cette société et l’envie d’entrer dedans, d’en faire partie. Entre comédie et drame, Denys Arcand nous amuse et pose de bonnes questions. Puis au-delà de ça, on se plaît à découvrir ces nouveaux personnages, et voir jusqu’où ils vont être capables d’aller.

Très différent des deux autres films de la trilogie, « La chute de l’Empire Américain » est un film qui oscille entre le film policier, le film d’arnaque, le film de gangs, le tout saupoudré de comédie et de drame, Denys Arcand nous régale. Arcand mélange parfaitement le tout, tient sa tension, et puis derrière ça, livre un film très simple esthétiquement parlant, mais diablement efficace. C’est bien simple, le tout est rythmé, les rebondissements s’enchaînent avec un certain burlesque parfois, et comme toujours chez Arcand, on ne voit pas son film passer.

Ce qui fait un lien avec sa trilogie, c’est aussi le fait qu’on y retrouve des acteurs de ses précédents films. Ici, ce sera Rémy Girard, qui sera excellent dans la peau d’un taulard repenti, mais pas tant que ça. Puis on trouvera Pierre Curzi excellentissime dans la peau d’un avocat d’affaires assez scrupuleux. Mais ce film sera tenu avant tout par deux acteurs géniaux. Premièrement, il y a Alexandre Landry, qui après un superbe rôle chez Louise Archambault dans le joli « Gabrielle« , tient là un rôle absolument parfait pour lui. C’est bien simple, il est bien difficile de résister à Pierre-Paul, sa vie et ses mésaventures. Puis deuxièmement, le film nous révèle Maripier Morin, magnifique et parfaite dans le rôle d’une escort qui nous laisse tout le temps avec un certains suspens.

« La chute de l’Empire Américain » est encore une fois une belle réussite de la part de Denys Arcand. Si le film est moins fort que ces « … invasions barbares« , s’il est très différent du reste de la trilogie, il n’en demeure pas moins un morceau de cinéma réjouissant, voire même jouissif, tant cette intrigue est bien loin de ce l’on pouvait s’imaginer. Avec cette trilogie, Denys Arcand nous aura surpris à chaque chapitre et ce fut un vrai plaisir !

Note : 15/20

Par Cinéted

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