avril 20, 2024

Pieces of a Woman

De : Kornél Mundruczó

Avec Vanessa Kirby, Shia LaBeouf, Ellen Burstyn, Iliza Shlesinger

Année : 2021

Pays : Etats-Unis, Canada, Hongrie

Genre : Drame

Résumé :

Vivant à Boston, Martha et Sean Carson s’apprêtent à devenir parents. Mais la vie du couple est bouleversée lorsque la jeune femme accouche chez elle et perd son bébé, malgré l’assistance d’une sage-femme, bientôt poursuivie pour acte de négligence. Martha doit alors apprendre à faire son deuil, tout en subissant une mère intrusive et un mari de plus en plus irritable. Mais il lui faut aussi assister au procès de la sage-femme, dont la réputation est désormais détruite. Pieces of a Woman est une chronique intimiste et déchirante de la vie d’un couple, et le portrait bouleversant d’une femme qui doit apprendre à faire son travail de deuil.

Avis :

Kornél Mundruczó est un réalisateur hongrois qui s’est bâti une sacrée belle réputation. Il faut dire que le metteur en scène frappe fort à chacun de ses films, livrant des œuvres intenses, folles, démesurées et qui ne font jamais de concession. Après sa révélation dans les années 2000, avec des films comme « Johanna » ou « Delta« , Kornél Mundruczó est passé à la vitesse supérieure avec les hallucinés « White God » et surtout son vertigineux « La Lune de Jupiter » qui, sorti en 2017, nous avait laissé K.O. !

Trois ans et demi après cette dernière claque, Kornél Mundruczó s’aventure en Amérique avec « Pieces of a woman« . Alors que les salles de cinéma auraient dû rouvrir le 07 Janvier (ce qui n’est finalement pas le cas), l’une des premières nouveautés de 2021 sera alors sur le géant Netflix et l’idée de vivre une expérience signée Kornél Mundruczó sur un petit écran est triste. Mais bon, nous n’avons pas d’autre choix, et il est évident qu’on ne laisse pas passer un nouveau film du cinéaste hongrois.

Partant sur une histoire aussi simple qu’elle est douloureuse, Kornél Mundruczó, comme à son habitude, livre avec « Pieces of a woman » un drame puissant. Un drame qui sera aussi puissant qu’il sera aussi intime. Techniquement fou, émotionnellement très dur, « Pieces of a woman » offre de sacrés moments d’émotions et surtout, il est porté par deux acteurs incroyables, Vanessa Kirby et Shia LaBeouf.

Martha et Sean, la trentaine, s’apprêtent à devenir parents. C’est une petite fille et Martha accouchera à la maison, afin que son bébé arrive quand il en a envie. Et c’est un soir que la petite fille décide d’arriver. Or, l’accouchement va se révéler plus compliqué que prévu et c’est dans la plus grande des douleurs qu’il se conclura avec la mort de la petite fille quelques minutes après sa naissance. Comment reprendre une vie normale après un tel drame ? Comment encaisser ce deuil ? Un couple peut-il survivre à cette épreuve ? Et qui est responsable de ce drame ? Autant de questions et d’émotions qui vont parcourir Martha et Sean dans les prochains mois.

Difficile, il est très difficile de parler du nouveau film de Kornél Mundruczó tant ce dernier s’est emparé d’une intrigue qu’on a déjà vu maintes et maintes fois, et il en a fait une œuvre très dure. Une œuvre qui « réinventerait » presque cette intrigue tant le réalisateur a une idée et un sens pour raconter ce drame.

Magnifique de bout en bout, même si on pourra lui reprocher certains choix que vont faire certains personnages. « Pieces of a woman« , c’est un drame foudroyant que Kornél Mundruczó a voulu très intime. Le réalisateur sera d’ailleurs en permanence axé sur son couple, à l’image de son impressionnante scène d’ouverture. Une scène d’accouchement d’une bonne demi-heure, tenue par un plan-séquence dingue, qui donnera le ton pour le reste de l’œuvre. Kornél Mundruczó veut être au plus près de ce couple, il veut les regarder, il veut les filmer et voir ce que ce drame, qui n’a pas de mot pour le décrire, va faire sur la vie de cet homme et cette femme. Ainsi, une fois cette scène posée, « Pieces of a woman » va alors enchaîner les mois qui passent, et le réalisateur va livrer autre chose que ce que l’on a déjà vu (même si le film passera quand même par des moments clefs, obligatoires). Le portrait est aussi dur qu’il est beau et le film suit une belle et logique évolution, proposant en premier lieu le portrait de ce couple. D’ailleurs, Vanessa Kirby et Shia LaBeouf sont tous deux bouleversants dans leur façon de gérer le deuil. Puis petit à petit, le temps et surtout la douleur grignotant ses personnages, Kornél Mundruczó va s’intéresser à son personnage féminin, allant de plus en plus dans son intimité, filmant ses émotions, ses ressentis, et son chaos intérieur au plus près.

Filmer la perte d’un enfant, c’est un sujet qui est souvent casse-gueule, et l’on a vu bons nombres de réalisateurs sombrer dans le larmoyant à outrance, en en faisant bien trop, mais ici, ce ne sera pas le cas, Kornél Mundruczó préférant presque étouffer parfois les émotions de ses personnages, ce qui d’un côté offre beaucoup de pudeur à son film et de l’autre, peut décevoir quelque peu, car si le film est dur, intense et émotionnel, il laisse une petite sensation qu’il aurait pu être encore plus touchant qu’il ne l’est déjà. La frontière est très mince, presque sur un fil, et si le metteur est un sacré équilibriste, parfois, il penche peut-être un peu trop, peut-être par peur justement de tomber dans ces drames larmoyants qui finissent sur TF1 ou M6, un dimanche après-midi sous le titre de « L’ultime épreuve« . Bref, quoi qu’il en soit, même si on n’est pas autant bouleversé qu’on aurait aimé, « Pieces of a woman » reste un très bon film et l’un des premiers chocs de 2021.

Kornél Mundruczó est un réalisateur qui a un certain sens du cinéma, il a un style à part et comme pour ses précédentes œuvres, « Pieces of a woman » n’échappera pas à cette règle. La mise en scène de Mundruczó est folle, presque démesurée et elle conjugue très bien la démesure et l’intime. Après son plan-séquence on ne peut plus marquant, le réalisateur va livrer un film qui porte une très belle évolution dans sa logique, filmant un couple face à l’épreuve d’une vie, puis peu à peu, une femme. « Pieces of a woman » ne fait pas de concession, il ne s’attarde pas, le cinéaste enchaînant les mois pour aller à l’essentiel, et peut-être au mieux, une libération. C’est même horrible ce petit suspens. Pourront-ils et pourra-t-elle accepter et passer à autre chose ? Bref, entre beauté, puissance, émotionnel et pudeur, « Pieces of a woman » confirme encore une fois, si besoin était, que Kornél Mundruczó est un très grand réalisateur.

« Pieces of a woman » est une expérience. Une expérience déchirante, dure et intense. Pour son premier film en Amérique, Kornél Mundruczó n’a rien perdu de sa superbe, et même si « Pieces of a woman » n’est pas aussi fou et démentiel que « La Lune de Jupiter« , il est assurément un film incroyable, et l’un de ceux qui marqueront 2021. C’est dingue même, car l’année a commencé depuis une semaine seulement et le hongrois livre déjà une claque et il serait presque logique de retrouver le film aux prochains Oscars.

Note : 16/20

Par Cinéted

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