avril 16, 2024

Sulphur Aeon – The Scythe of Cosmic Chaos

Avis :

Le métal est un terreau fertile où tous les sujets sont abordables et abordés. Que ce soit l’amour, la haine, la violence, les religions, les déités lovecraftiennes, la politique, la littérature et bien d’autres encore, tout peut passer à la moulinette métal. Et en parlant de grands anciens et de Lovecraft, certains groupes s’en sont fait une spécialité, évoquant sans cesse les écrits de l’auteur de Providence. Il faut dire que l’univers monstrueux et dépressif de Lovecraft se prête à merveille à un métal extrême et obscur. Et ça, Sulphur Aeon l’a bien compris. Groupe allemand formé en 2010, Sulphur Aeon s’amuse depuis ses débuts à reprendre les écrits de l’écrivain américain pour en faire des albums. Et après un succès mérité sur les deux premiers opus, voici que déboule en 2018 The Scythe of Cosmic Chaos. Et on sent que le groupe commence à tourner en rond.

Le skeud débute avec Cult of Starry Wisdom et dès le départ, on sent à fond l’exploitation de Lovecraft. Ténébreux, angoissant, avec quelques litanies en fond sonore, on rentre rapidement dans le vif du sujet. L’horreur est présente et on sent que la violence ne va pas tarder à venir. Double-pédale, riffs assourdissants, voix aérienne qui résonne comme un prêche aux grands anciens, le groupe semble avoir tout compris à cette mythologie dantesque. Puis le morceau vire dans le Death assez traditionnel, avec un growl puissant et une rythmique infernale. Quitte à ne plus avoir une once d’originalité. . Et c’est bien là que le bât blesse pour Sulphur Aeon. Une certaine redondance et un classicisme qui fait du tort au groupe. Yuggothian Spell sera là pour en attester, démarrant au quart de tour avec une batterie qui tape tellement fort qu’elle n’a plus de sens.

Pour autant, le morceau réussit à nous emballer grâce à une certaine prestance, à une grandiloquence qui force le respect. Doté d’une production aux petits oignons, comme c’est souvent le cas chez nos amis allemands, le groupe surmonte son manque d’originalité par un enregistrement de grande qualité et de bonnes variations. The Summoning of Nyarlathotep tente de changer un peu la donne avec le morceau précédent, prenant son temps pour véritablement démarrer. Installant une ambiance malsaine, le groupe déroule par la suite avec une rythmique plus claire, quelques éclats en chant clair et des distorsions, histoire de bien mettre en avant un univers dépérissant et au bord du gouffre. Veneration of the Lunar Orb continue sur la lancée de l’album, rebondissant un peu plus sur la violence, s’approchant de quelques fulgurances Black, genre qui aime aussi Lovecraft. Mais on reste sur un morceau virulent qui oublie de peaufiner son ambiance.

C’est à ce moment-là que le groupe lâche Sinister Sea Sabbath. Long morceau de plus de neuf minutes, le groupe a tout misé sur ce titre. Complexe dans son écriture et dans sa structure, Sulphur Aeon prouve qu’il est capable de produire des morceaux très longs sans pour autant ennuyer. Alors certes, on reste dans le même registre que les morceaux précédents, mais cette pièce maîtresse se pose comme un incontournable de l’album. Parfaitement maîtrisé du début à la fin, on peut dire que le groupe est techniquement monstrueux, à l’image des grands anciens de Lovecraft. Par la suite, les titres vont s’enchainer dans une sorte de violence exacerbée. The Oneironaut restera dans un registre puissant et très rapide, alors que Lungs Into Gills surprendra par un refrain bien catchy, pendant que nous reprendrons en chœur des « ia, ia ». Peut-être l’un des titres les plus marquants de l’album.

Enfin, le dernier titre, Thou Shalt not Speak his Name clôture parfaitement ce maelström de violence. On reste dans un tempo très vif, avec des riffs bien rugueux et une volonté de créer une atmosphère désespérée. Bien évidemment, si on rentre dans le délire, ça marche à fond les ballons. Cependant, on peut trouver à redire sur cet album. Et en premier lieu, on peut parler de la redondance de l’ensemble. Si c’est techniquement maîtrisé et que l’ensemble colle à un thème bien exploité, on reste sur des rythmiques identiques et même parfois sur des structures qui reviennent inlassablement. Cette densité empêche le groupe d’avoir des moments plus marquants que d’autres. De ce fait, aucun titre ne ressort de cet ensemble fait d’un seul bloc, qui manque de fissures et de surfaces plus lisses. Du coup, on peut sentir poindre un léger ennui après plusieurs écoutes, ce qui est dommage.

Au final, The Scythe of Cosmic Chaos, le dernier album en date des teutons de chez Sulphur Aeon, est un bon album. Certes, il est imparfait et renferme une certaine monotonie. Le groupe semble se répéter un peu dans une recette qui a marché fut un temps. Mais globalement, entre une technique de dingue et un thème parfaitement exploité, difficile de faire la fine bouche avec cet album, qui plaire assurément aux fans du groupe, comme à ceux de l’écrivain.

  1. Cult of Starry Wisdom
  2. Yuggothian Spell
  3. The Summoning of Nyarlathotep
  4. Veneration of the Lunar Orb
  5. Sinister Sea Sabbath
  6. The Oneironaut – Haunting Visions Within the Starlit Chambers of Seven Gates
  7. Lungs Into Gills
  8. Thou Shalt not Speak his Name (The Scythe of Cosmic Chaos)

Note: 15/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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