avril 25, 2024

Le Gorille de Brooklyn

Titre Original : Bela Lugosi Meets a Brooklyn Gorilla

De : William Beaudine

Avec Bela Lugosi, Duke Mitchell, Sammy Petrillo, Charlita

Année : 1952

Pays : Etats-Unis

Genre : Comédie, Science-Fiction

Résumé :

Duke et Sammy, deux artistes de music-hall se retrouvent accidentellement sur une île du Pacifique peuplée par une tribu primitive. Après que Nona, la fille du chef de la tribu ait refusé que les deux hommes soient exécutés, ceux-ci sont accueillis chaleureusement et une idylle commence à naître entre Nona et Duke, tandis que Sammy est courtisé par Saloma , mais ce dernier n’apprécie pas ses rondeurs et la fuit.. Souhaitant trouver un moyen de rentrer aux États-Unis, les deux hommes vont rencontrer le docteur Zabor qui dans son laboratoire à l’autre bout de l’île, se livre a d’étranges expériences en rapport avec la théorie de l’évolution.

Avis :

Alors qu’il débute sa carrière sur les planches de Broadway au début des années 1900, Bela Lugosi sera, pour beaucoup de monde, l’interprète majeur de Dracula dans le film du même nom de Tod Browning. Il faut dire qu’avec son regard perçant, son accent slave et sa posture, il campe un parfait comte qui marquera l’histoire du cinéma. Cependant, Bela Lugosi est un excellent comédien qui n’a pas eu de chance dans sa carrière. Las de se cantonner à des rôles de méchant, il va devenir accro à la morphine et enchainer des tournages de films médiocres, jusqu’à sa mort en 1956, alors qu’il tournait pour Ed Wood. De nos jours, Bela Lugosi a une sorte de statut particulier, oscillant entre l’admiration et la compassion pour des films… hasardeux. Dont Le Gorille de Brooklyn, gentil nanar de 1952 signé William Beaudine.

Dans l’enfer de la jungle

Le scénario tient sur un timbre-poste. Deux comédiens se retrouvent perdus dans la jungle car ils se sont trompés de porte dans l’avion qui devait les mener au lieu de leur tournée. Recueillis par un peuple d’autochtones, ils échappent à la mort grâce à la fille du chef qui parle anglais et qui aide un savant à vérifier la théorie de l’évolution selon Darwin. Mais ce savant, un peu fou, est amoureux de la fille du chef, et il voit d’un mauvais œil l’arrivée de ces deux américains, dont l’un d’eux fait les yeux doux à sa dulcinée. Il met alors au point un sérum pour transformer les hommes en gorille. Pitch surréaliste et suranné, Le Gorille de Brooklyn se base sur des élucubrations scientifiques très hasardeuses, même pour l’époque, et délivre un déroulement qui ne tient jamais vraiment la route.

Ici, un savant jaloux va tout faire pour transformer un homme en gorille, afin de le liquider et de s’octroyer le cœur de la fille d’un chef de tribu. Jouant, comme souvent à l’époque, sur des velléités entre savant fou et héros au grand cœur, le film de William Beaudine va vraiment avoir du mal à nous convaincre. Tout d’abord par son histoire et sa narration fainéante, qui débute avec une voix-off dont on ne sait l’origine. Par la suite, les interactions entre les personnages iront très vite, trop vite, et on n’aura pas le temps de s’attacher à qui que ce soit, pas même à cette jolie autochtone, intelligente et touchante. Le récit suit des rails connus de tous, et jamais le réalisateur ne va sortir de la route, espérant offrir un mélange de comédie et d’horreur au sein d’une mise en scène qui respire le toc et qui n’est là que pour mettre en avant deux comédiens/humoristes que l’époque, à savoir Duke Mitchell et Sammy Petrillo.

Singe parmi les singes

Le problème avec ce genre de film, c’est que même pour l’époque, il s’agissait de petites productions qui capitalisaient sur l’acteur principal, à savoir Bela Lugosi. Déjà présent dans le très décevant Le Gorille, surfant certainement sur le succès de King Kong et de nouvelles comme Double Assassinat dans la Rue Morgue d’Edgar Allan Poe, les producteurs ont cru bon de jouer avec l’image du comédien. Jusqu’à mettre son nom sur le titre original du film. Mais force est de reconnaître que ça reste très bas du front. On voit rapidement que la mise en scène se fait en studio, avec des map painting grossières en fond et surtout, des séquences de danse assez gênantes. Le film met des plombes à démarrer, essayant vainement de présenter des personnages sans épaisseur, avant de dérouler sur la fin, avec des costumes de gorille ridicules. Difficile de croire une seule seconde à cette transformation, même si on remet le film dans son contexte « historique ».

De plus, le film loupe complètement le coche dans la maîtrise de ses tonalités. C’est-à-dire qu’il mise beaucoup sur l’humour, et sur la prestation des deux acteurs face à Bela Lugosi, et peu sur l’horreur. Si le départ peut se faire drôle, avec un Sammy Petrillo qui en fait des caisses, très vite, la lourdeur va venir ternir l’image du film. On se moque des autochtones, des femmes obèses ou encore de certaines personnages un peu simple d’esprit, et on ne gratte jamais vraiment la surface pour imposer des thèmes intéressants. Même la jalousie ou l’amour sont balayés d’un revers de la main pour faire place aux grimaces exténuantes de Sammy Petrillo. Des acteurs qui ne sont là que pour faire la promotion de leur spectacle, avec un type qui dit des blagues bien lourdes et un crooner prétentieux qui sera finalement le héros du film.

Seule la fin va venir nous surprendre un petit peu. En effet, malgré les péripéties enfantines et les blagues vaseuses du film, on se retrouve avec une fin qui étonne et qui risque de fâcher quelques personnes. Une pirouette scénaristique facile de nos jours, mais certainement inédite à l’époque. Alors oui, c’est peu de chose, mais avec ce genre de nanar, on se raccroche à ce que l’on peut. Autre avantage d’un tel film, c’est qu’il est court. Cela permet de passer un moment pas trop désagréable, le réalisateur étant obligé d’aller à l’essentiel et de ne pas perdre du temps à rajouter des grimaces ou des situations gênantes.

Au final, Le Gorille de Brooklyn est un joli nanar des années 50, qui montre bien à quel point le pauvre Bela Lugosi était tombé bien bas pour gagner sa vie et sa dose de morphine. Scénario ridicule, costume lamentable, acteurs en roue libre pour présenter un show, on peut dire que cette « rareté » ne vaut pas vraiment le coup, sauf si l’on est curieux de découvrir la descente aux enfers d’un Bela Lugosi à l’agonie, qui tente, malgré tout, de s’imposer comme un bad guy sérieux. Dommage, on n’y croit pas un seul instant…

Note : 06/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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