mars 29, 2024

Freaks

De : Zach Lipovsky et Adam B. Stein

Avec Emile Hirsch, Lexy Kolker, Bruce Dern, Amanda Crew

Année : 2020

Pays : Etats-Unis

Genre : Science-Fiction, Thriller

Résumé :

Chloé a 7 ans et n’a jamais vu la lumière du jour. Son père la maintient à l’écart du monde extérieur, ne cessant de lui répéter qu’elle est différente, et que tout ce qui se trouve de l’autre côté de la porte d’entrée représente une menace. C’est en bravant tous les interdits que Chloé va pouvoir découvrir la vérité sur sa condition. 

Avis :

Le fantastique est un genre qui n’est pas si facile que ça à maîtriser. Si l’on prend sa définition brute, il s’agit d’instaurer de l’extraordinaire dans de l’ordinaire. De ce fait, on peut presque dire que tous les films de super-héros sont des films fantastiques. Mais le vrai fantastique dans le sens le plus pur que l’on peut l’entendre, c’est de mettre de l’extraordinaire dans quelque chose d’intimiste, de moins grandiloquent que les films de chez Marvel ou DC. C’est ce qu’a voulu faire Zach Lipovsky avec son compère Adam B. Stein pour Freaks. Film fantastique au budget riquiqui, le duo nous présente un monde pas si lointain où ceux qui ont des super-pouvoirs sont considérés comme des monstres et doivent vivre dans la clandestinité. Tentative de présenter un univers inédit avec peu de moyens, Freaks peut se voir comme une réussite, mais aussi comme une petite déception, la faute à quelques scories qui empêcheront une réelle empathie.

Sous les caprices d’une enfant

Freaks propose de suivre la petite Chloe, 7 ans, dont le père lui interdit de sortir car elle risque de perdre la vie. Chloe, n’écoutant pas les conseils de son père, décide de sortir et d’affronter le monde. Elle croise alors la route d’un marchand de glace qui veut se servir d’elle et de ses pouvoirs. Car oui, on va rapidement se rendre compte que Chloe a des pouvoirs, et pas des moindres. Elle peut faire apparaître des personnes autour d’elle. Elle peut envoyer son image dans les lieux qu’elle le souhaite. Et elle peut aussi inciter les gens à lui obéir en répétant trois fois ce qu’elle dit. En affrontant le monde extérieur, on va vite avoir droit à un topo sur l’univers dans lequel nous allons évoluer. Les freaks sont des humains avec des super-pouvoirs et ils pleurent du sang une fois qu’ils les ont utilisés. Ils sont alors considérés comme illégaux et se retrouvent enfermés dans des prisons spécialisées quand ils ne sont pas tués.

Très clairement, le fond du film est une petite réussite. Le monde proposé est intéressant et peut laisser entrevoir une licence. Il est aussi l’occasion d’une projection d’un monde qui a peur de l’inconnu et qui refuse de voir en ces freaks des personnes à part entière. Le racisme est bien là, et il se présente sous une forme différente de ce que l’on a l’habitude de voir. Néanmoins, si l’univers global est réussi, il n’en est pas de même avec l’histoire dans sa globalité. La faute à des personnages peu attachants et à des enjeux qui surviennent bien trop tard dans le métrage. Chloe est une petite fille insupportable. Elle fait caprice sur caprice et possède même des traits psychotiques quand elle harcèle sa petite voisine ou quand elle force les gens à faire ce qu’elle veut. C’est très déstabilisant, voire même malsain par moment. On aura d’ailleurs droit à une scène étrange avec les voisins, où l’on va voir tout le potentiel taré de la gamine.

Et l’empathie bordel !

De ce fait, il est très compliqué de ressentir quelque chose pour cette gamine qui est tout bonnement détestable dès le démarrage du film. Mais ce n’est pas tout. Le père, joué par Emile Hirsch, est lui aussi pénible. Ronchon, surprotecteur, mystérieux, voire même tyrannique quand il fout sa gamine dans un placard, il a tous les traits du père qui ne sait pas comment s’y prendre pour gérer sa gamine. Le problème, c’est qu’il n’est pas attachant dans sa maladresse. Au contraire, il est toujours nerveux et s’avère aussi bête que sa fille. Seul le grand-père, joué par Bruce Dern, apporte un peu d’ambivalence à l’ensemble, étant le moteur de l’enjeu principal du film, mais il va vite se rendre compte qu’il ne peut faire grand-chose avec son gendre. Et il va se servir de sa petite-fille comme appât. On a déjà vu mieux comme papy…

Alors fort heureusement, tout cela ne nuit pas vraiment aux thèmes que le film tente de véhiculer avec plus ou moins de réussite. Si le racisme est abordé de façon frontale, avec ce qu’il faut de délation de la part des voisins et de section de flicailles qui aiment à taper sur des mutants, on trouvera d’autres sujets intéressants. La peur est l’un des principaux thèmes du film. La peur de perdre son enfant, la peur de perdre la vie, la peur de s’engager dans une lutte violente, la peur se confronter à des sentiments trop forts. Zach Lipovsky cristallise tout cela à travers le personnage du père, sclérosé dans un immobilisme qui va lui coûter cher.  Dans une moindre mesure, on peut aussi y voir une critique acerbe d’une société qui ne veut qu’une chose, sa tranquillité, quitte à balancer ses proches ou ses voisins. Triste constat de quelque chose qui n’est jamais bien loin avec les sans-abris ou les réfugiés politiques.

Le freak c’est cheap

Enfin, le dernier problème que l’on peut avoir avec Freaks, c’est son côté cheap qui ne s’assume pas vraiment. Les deux réalisateurs ont eu l’intelligence de proposer peu d’effets numériques afin de ne pas être ridicule et de ne pas créer une trop grosse distance entre le fond sérieux, et des effets visuels qui ne l’auraient pas été. Cependant, certains passages sont de très mauvais goût. On peut évoquer ce ralenti où le père ralenti le temps autour de lui. On peut parler de ce moment où Chloe se retrouve à une fête pyjama sans y avoir été invitée. Des moments cheaps qui trouveront le point G lors de la dernière phase, quand on découvre le pouvoir de la maman. En même temps, il était difficile d’en attendre davantage de la part du réalisateur de Dead Rising Watchtower et Leprechaun Origins. D’ailleurs, la réalisation n’a rien d’extraordinaire, malheureusement…

Au final, Freaks est un film bancal qui a du bon, comme il peut avoir du mauvais. Si l’aspect sociétal est plutôt bien vu et impose une atmosphère pesante sur les personnages principaux du film, il n’est peut-être pas assez travaillé. A contrario, le côté cheapos des effets visuels et le caractère insupportable de la gamine prennent bien trop souvent le pas sur ce qui semblait pertinent. En l’état, Freaks n’est pas vraiment un mauvais film, mais il reste un tout petit métrage aux bons intentions, mais à la finition qui laisse à désirer. Dommage…

Note : 09/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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