avril 19, 2024

La Variété Andromède – Michael Crichton

Auteur : Michael Crichton

Editeur : Pocket

Genre : Science-Fiction

Résumé :

Observée à la jumelle, la petite bourgade de Piedmont paraît endormie dans le désert de l’Arizona. Au-dessus d’elle, les vautours décrivent des cercles inquiétants.
Si l’on s’approche, on s’aperçoit que tous ses habitants, hormis un vieux clochard et un bébé, sont morts instantanément, frappés d’un mal inconnu, comme s’ils étaient tombés en marchant. Les quatre savants dépêchés sur les lieux savent que ce désastre a été provoqué par la chute accidentelle de l’un des tout premiers vaisseaux spatiaux américains. Quelle “chose” venue du cosmos, quel organisme ou bactérie mystérieuse le satellite a-t-il ramené sur terre ? Une course contre la montre s’engage contre cette “variété Andromède”, mutante capable de ravager la planète.

Avis :

Dans le domaine littéraire, comme au cinéma, la potentialité d’une pandémie virale a maintes fois été exploitée. Elle est presque devenue un prétexte constant lorsqu’on évoque des morts-vivants. Mais ce qui interpelle avec ce type d’intrigues demeure le réalisme d’une telle catastrophe, car elle reste plausible, voire inéluctable. Il y a plus d’un demi-siècle, Michael Crichton présentait un récit avant-gardiste qui présageait déjà des préoccupations scientifiques et pragmatiques sur le sujet. S’il n’est pas forcément le précurseur dans le domaine, La Variété Andromède est une œuvre référentielle pour bon nombre d’auteurs, de lecteurs et d’artistes.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la menace virale ne provient pas de la nature elle-même ou d’une contamination de l’animal à l’homme. L’intrigue privilégie un organisme venu de l’espace dont l’arrivée sur la planète évoque la théorie de la panspermie. Le propos s’avère crédible à bien des égards. Et c’est bien ce qui distingue le présent roman : son réalisme. Chaque élément exposé, chaque point abordé, fait l’objet d’une attention méticuleuse. La documentation est aussi dense qu’exhaustive pour développer l’hypothèse d’un virus extraterrestre. Dit comme cela, il serait facile de sombrer dans la série B de science-fiction. Les années 1950 ne sont d’ailleurs pas très éloignées de la sortie du livre.

Malgré l’éclectisme de son œuvre, Michael Crichton ne franchit pas le pas et demeure dans un technothriller qui use de nombreuses ficelles du genre. On songe à la constitution d’un organisme secret pour tenter de gérer et d’endiguer la crise. Sur ce point, la réalisation du laboratoire à plusieurs niveaux se révèle tout aussi stupéfiante que le reste, en particulier ce qui a trait aux divers processus de décontamination. On distingue néanmoins déjà un premier écueil avec une mise en place laborieuse qui fait la part belle à la réunion des protagonistes, une présentation succincte, ainsi qu’à l’exploration du site d’études virales.

Là encore, le livre n’emprunte pas forcément le chemin auquel on peut s’attendre. Loin de sombrer dans un catastrophisme spectaculaire, l’intrigue progresse en vase clos pour mieux identifier et comprendre la menace. Tout se déroule au sein de ce laboratoire secret, et plus particulièrement au niveau 5. L’idée d’aborder un problème d’envergure planétaire à une échelle réduite est assez intéressante pour traiter le sujet sous un angle original. D’expériences en hypothèses, l’ensemble avance à tâtons, comme le ferait n’importe quelle équipe scientifique. En cela, il paraît difficile de faire le moindre reproche au livre.

Toutefois, il convient de modérer la qualité de la narration. Car ce qui fait la force de l’histoire constitue aussi sa plus grande faiblesse. À force de prôner le réalisme à outrance, le jargon technique supplante toute autre considération. Certes, l’auteur a la volonté d’éloigner son roman de tout exercice de vulgarisation. En contrepartie, il le rend extrêmement pointu et nécessite un excellent bagage littéraire et technique pour en apprécier pleinement la mesure. Cela passe aussi bien par la description des symptômes, l’usage du matériel ou encore l’exposition des théories pour expliquer le mode de propagation et le comportement du virus.

C’en est tellement déconcertant que le moindre détail fait l’objet d’un développement beaucoup trop important pour s’attarder sur un mot de vocabulaire ou de précédents travaux scientifiques. On en vient même à perdre toute contenance au niveau du rythme. Il n’y a aucune gestion du suspense propre à la crise ou à l’urgence de la situation. De même, les protagonistes demeurent transparents. Si ce n’est leurs compétences dans des domaines spécifiques, ils pourraient être aisément interchangeables. Les séquences de dialogues sont assez représentatives de cet état de fait avec des échanges circonspects qui sombrent très vite dans des propos abscons ou, a contrario, une simplicité confondante.

Au final, La Variété Andromède est un roman déconcertant. On apprécie la méticulosité de Michael Crichton et sa manière d’aborder l’idée d’une pandémie virale. De même, l’intrigue sous forme de huis clos est bien amenée pour répondre aux ambitions initiales. Toutefois, on regrette un aspect didactique prépondérant et l’absence intentionnelle d’une vulgarisation scientifique. Ce qui rend l’ensemble très élitiste.

Il en ressort un récit désincarné qui s’apparente davantage à la rédaction d’un article portant sur des travaux de recherche et non à une véritable histoire. La progression est juste prétexte à une explication fouillée, pertinente quand on en saisit la teneur, mais qui s’avère souvent imbuvable. Et ce n’est pas les illustrations ou les graphiques qui aideront à mieux appréhender la démarche des chercheurs. Un livre intéressant, mais qui s’adresse à un lectorat restreint et initié au jargon technique et scientifique pour vraiment l’apprécier.

N.B. On notera une traduction française douteuse sur de nombreuses formulations, sans compter des amalgames grossiers sur des détails de la vie quotidienne. Depuis quand le franc est-il la monnaie américaine ? De plus, les États-Unis ne possèdent pas de corps de gendarmerie pour les missions et la période indiquée. En effet, il n’est nulle question de l’US Cavalry en territoire indien ou de l’USC, la gendarmerie d’occupation en Allemagne et en Autriche au sortir de la Seconde Guerre mondiale.

Note : 13/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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