mars 19, 2024

Le Jour des Fourmis – Bernard Werber

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Résumé :

Elles sont un milliard de milliards. Nous les remarquons à peine, elles nous guettent pourtant depuis longtemps. Pour certaines, nous sommes des Dieux. Pour les autres, des êtres malfaisants. Avec une intelligence et une organisation prodigieuses qui n’ont rien à envier aux armées les plus redoutables, elles se préparent à une lutte sans merci. Qui seront les vrais maîtres de la terre ? De la réponse à cette question leur survie dépend… La nôtre aussi. Le jour des fourmis est-il vraiment arrivé ?

Avis :

Après un premier roman surestimé (du moins est-ce mon humble avis), Bernard Werber poursuit l’exploration du monde des fourmis avec le deuxième tome de sa trilogie, intitulé sobrement Le jour des fourmis. Malgré l’originalité évidente du pitch de départ, on se souvient que son précédent livre pâtissait de gros problèmes de rythme, de personnages peu attachants et d’un scénario à la progression prévisible. Avec ce nouvel opus, on espère que le concept libère tout son potentiel, et ce, en réglant les défauts suscités. L’auteur s’est-il reposé sur ses lauriers et son succès assez fulgurant ? A contrario, est-il parvenu à pleinement exploiter les ficelles qu’il a lui-même tissées ?

Les premières pages laissent augurer un ouvrage similaire à son homologue. Le récit semble reprendre les mêmes ingrédients en oubliant le final plaisant et interrogatif sur le devenir des personnages (ce qui le sauvait du naufrage). On découvre un panel de nouveaux intervenants aux prises avec des morts mystérieuses et, de leur côté, les fourmis poursuivent leur routine quotidienne. Si l’on se réfère à ce premier constat, on pourrait arrêter la lecture, faire l’impasse sur une suite de déconvenue et penser que l’auteur ne s’est absolument pas remis en question. Seulement…

Seulement, l’histoire va nous donner tort d’une manière très subtile. Là où les protagonistes péchaient par des caractères conventionnels et un manque d’attachements certains, Bernard Werber décide d’inverser les rôles. En d’autres termes, la progression du récit humanise les fourmis. Tout commence par des symptômes terribles, que l’on nomme maladie des états d’âme. Elles se mettent à penser en tant qu’individualité propre et non comme un robot désincarné. Cela entraîne une évolution dans leurs comportements et réactions qui rend le rythme plus trépidant, plus curieux. L’idée est poussée jusqu’à créer un groupe de rebelles aux forts accents religieux.

Le discours sur les croyances est réel. Il évoque la déification d’une entité vivante pour le besoin de se sentir unique et surtout donner un sens à sa vie, alors que les fourmis fidèles à la reine entreprennent une croisade contre ses dieux impies (que l’on nomme les doigts). L’aveuglement haineux, la peur, le doute ou l’incompréhension génèrent chez les insectes une personnalité propre qui les rend attachantes, contrairement aux esprits formatés du premier opus. A contrario, les hommes régressent vers un état animal. Ceux bloqués dans la fameuse cave sont contraints de s’adapter, d’évoluer pour survivre. On regrettera le peu de place qui leur soit accordée au sein de l’intrigue.

En effet, ils surviennent trop tardivement et les séquences les concernant s’avèrent trop sporadiques pour suivre leur cheminement sans difficulté. Quant au monde des humains, la description d’une société égoïste, abrutie par la télévision et autres lavages de cerveau, confère une atmosphère nihiliste cohérente au vu des propos avancés. À ce titre, les investigations ne sont pas loin du thriller tout en s’octroyant quelques largesses. Malgré la présence de la multiplicité des points de vue principaux, l’intrigue se révèle mieux maîtrisée, plus imprévisible et, par conséquent, plaisante à lire.

Nouvelle différence notable : le monde des fourmis n’est plus fermé et ne se résume pas à l’essor de la cité avec quelques sorties. Grâce à la croisade entamée, l’on découvre qu’elles n’ont pas le monopole des sociétés structurées (les abeilles, les termites…) et ne sont pas les seules espèces intelligentes, à tout le moins douées de la parole pour communiquer. Ainsi, l’écosystème de la forêt prend une autre dimension et s’avère plus agréable à explorer que celui du jardin. L’environnement recèle des trésors de variété pour mieux nous perdre. Même si le style n’est pas très différent du premier tome, il réussit à nous emporter dans un univers insoupçonné avec une plus grande efficacité.

Au final, le deuxième opus de la trilogie des fourmis se révèle supérieur en tout point à son aîné. Doté d’une histoire moins brouillonne, elle permet l’immersion dans deux mondes aux antipodes qui, finalement, ont plus de points communs qu’on ne veut l’admettre. L’analogie entre les hommes et les animaux se montre subtile et bien amenée, alors que les propos avancés sur la fragilité de nos civilisations trouvent l’une de ses causes dans des croyances religieuses extrémistes et biaisées. De fait, Les fourmis fait office d’une introduction de luxe, tandis que son successeur entre dans le vif du sujet pour nous inviter dans un univers original et prenant. Joli retournement de situation…

Note : Le tome 2 de l’encyclopédie du savoir relatif et absolu se révèle aussi génial que son prédécesseur.

Note : 14/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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