mars 19, 2024

L’Oeil de la Lune – Anonyme

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Résumé :

Personne n’a oublié le Bourbon Kid, mystérieux tueur en série aux innombrables victimes. Ni les lecteurs du Livre sans nom, ni les habitants de Santa Mondega, l’étrange cité d’Amérique du Sud, où sommeillent toujours de terribles secrets. Alors que la ville s’apprête à fêter Halloween, le Bourbon Kid célèbre lui le dix-huitième anniversaire de son premier homicide. Il est alors loin de se douter qu’il est devenu la proie d’une agence très spéciale. Une proie particulièrement coriace, de celles qu’il ne faut pas rater, sous peine d’une impitoyable vengeance. Mais cela n’est rien à côté de ce qui attend Santa Mondega lorsqu’une mystérieuse momie disparaît du musée local…

Avis :

Nanti d’un formidable bouche-à-oreille, Le livre sans nom a eu un succès retentissant en 2007 après une incursion sur un site Internet. L’une des raisons de cet engouement est justement le fait que l’on mourrait aussitôt après avoir terminé le roman, enfin selon le pitch de départ. De plus, la volonté de l’auteur à vouloir rester à tout prix anonyme ajoute à la réputation et au mystère ambiant. On avait droit à un ouvrage au style assurément décomplexé, à une histoire folle et des personnages hauts en couleur. Il en ressortait une lecture sans fioriture et addictive au possible pour un moment savoureux, sans prise de tête et un rien bourrin dans sa progression. Deuxième tome des aventures du Bourbon Kid, L’œil de la Lune parviendra-t-il à honorer son aîné ?

L’intrigue semble se dérouler là où elle s’était arrêtée précédemment. À savoir, sur une note fantastique (assez inattendue) et le quotidien pas si tranquille des habitants de Santa Mondega. Le premier chapitre fait montre d’un nouveau délire avec l’évasion d’une momie au cœur d’un musée. On reconnaît bien le style de l’auteur avec un rythme trépidant, des descriptions furtives, ainsi qu’une approche percutante de l’action. Pourtant, la suite coupe court à cette folle escapade pour nous emmener dans le passé du Bourbon Kid (soit 18 ans en arrière). Aux premiers abords, ce choix a de quoi décontenancer.

La progression se stoppe nette pour une rétrospective du serial-killer le plus redouté de Santa Mondega et de son entourage. Certes, cela apporte de l’épaisseur à la mythologie de ses aventures, mais le scénario se veut beaucoup plus posé (idylle naissante et genèse des protagonistes sont de la fête), moins survolté que ce à quoi Anonyme nous avait habitués. 100 pages et quelques plus tard, « retour vers le futur » en compagnie d’une tête connue : le non moins célèbre tueur à gages Dante, pas très futé, mais toujours très efficace. Même si l’on apprécie l’individu, on ne peut s’empêcher de penser que L’œil de la Lune se focalise presque entièrement sur lui. Sa mission d’infiltration, son amour torride pour Kacy et ses bévues avec les vampires et sa hiérarchie.

On aime ou pas la tournure fantastique qu’a prise l’œuvre d’Anonyme à la fin du Livre sans nom (la majeure partie de l’ouvrage évoquait un thriller teinté d’action), mais ce second opus ancre parfaitement son intrigue au pays des oiseaux de nuit et autres loups-garous mal léchés. Là également, on reconnaît le second degré à chaque ligne, mais, au bout d’un temps, cet humour nonchalant parfaitement assumé entraîne l’histoire dans des rebondissements téléphonés pas vraiment crédibles. On reste dans l’humeur générale avec un arrière-goût dans la bouche. Un peu comme si tout est trop gros pour y croire, même si le réalisme n’est pas de circonstance dans la ville de Santa Mondega.

Pour le reste, les références cinématographiques pleuvent et l’on ne peut s’empêcher de songer aux films de Tarantino via des dialogues crus, une ambiance maîtrisée et une violence exacerbée, voire caricaturale à certains moments. Les cinéphiles reconnaîtront sans mal tous les clins d’œil au fil des pages, mais sont moins évidents que dans Le livre sans nom. On regrette simplement la récurrence de noms d’oiseaux. Trop présents et employés n’importe comment pour un oui ou pour un non, ils appauvrissent les échanges. Une volonté peut-être assumée de la part de l’auteur, mais qui use la lecture à force de s’y attarder plus que de raison.

On retrouve néanmoins des individus aux caractères forts et toujours aussi déjantés. Dante, un caméo d’Elvis, le détestable Swann, les vampires et les loups-garous aux prénoms farfelus, sans oublier le Bourbon Kid, mais qui se fait désirer (il entre en scène en milieu de parcours). Des personnalités qui fleurent bon avec les clichés les plus éculés qui soient. En somme, un panel dissemblable et marquant comme une balle en pleine tête. Sur ce point, Anonyme montre tout son talent et son efficacité pour étayer ses protagonistes dans un cadre poisseux et hostile. Toutefois, l’on pestera sur un final à la limite de l’imposture où la tension qui a monté crescendo s’essouffle subitement dans les ultimes pages. Un pétard mouillé qui laisse augurer d’une suite, mais on est bien loin du cultissime règlement de compte du premier opus.

Au final, L’œil de la Lune est une petite déception. L’intrigue se révèle trop décousue et brouillonne pour pleinement convaincre. La faute à un retour en arrière trop long, un fil rouge qui se perd dans des histoires secondaires pas forcément indispensables et des rebondissements alambiqués. Il demeure néanmoins la patte déjantée d’Anonyme au gré des pages, malgré une tendance à user et abuser des insultes en toutes circonstances. Si le second degré est indéniable, ce deuxième tome aurait gagné à se disperser moins et à mettre en avant cette fameuse pierre qui, en dehors du titre, n’apparaît que trop brièvement dans le récit. La surprise du premier opus étant passée, il en ressort une suite en demi-teinte et loin d’être exceptionnelle.

Note : 12/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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