mars 28, 2024

Roubaix, Une Lumière

De : Arnaud Desplechin

Avec Roschdy Zem, Léa Seydoux, Sara Forestier, Antoine Reinartz

Année : 2019

Pays : France

Genre : Thriller, Drame

Résumé :

À Roubaix, un soir de Noël, Daoud le chef de la police locale et Louis, fraîchement diplômé, font face au meurtre d’une vieille femme. Les voisines de la victime, deux jeunes femmes, Claude et Marie, sont arrêtées. Elles sont toxicomanes, alcooliques, amantes…

Avis :

Arnaud Desplechin est l’un de nos réalisateurs français les plus prolifiques et surtout l’un des plus admirés. Depuis un peu moins d’une trentaine d’années, Arnaud Desplechin s’est bâti une jolie filmographie. Mais dernièrement, Arnaud Desplechin a déçu, notamment avec « Les fantômes d’Ismaël« , film au casting fabuleux, réunissant ni plus ni moins que Marion Cotillard, Charlotte Gainsbourg, Mathieu Amalric, ou encore Louis Garrel, mais qui fut malheureusement un échec total, doublé d’un ennui fou.

Présenté au dernier festival de Cannes, « Roubaix, une lumière » s’annonçait comme l’antithèse d’un film signé Arnaud Desplechin. Alors que le cinéaste nous a habitués ces dernières années à des films qui mettent en avant des drames familiaux, avec « Roubaix, une lumière« , le réalisateur se lance dans un polar aux allures de thriller urbain parfois et autant le dire de suite, c’est une grande réussite. « Roubaix, une lumière » est une très belle surprise, pour ne pas dire une petite claque en son genre. Surprenant et prenant de bout en bout, Arnaud Desplechin met en scène une ville dont la complexité est directement liée à ses habitants. Sombre, froid, austère, mais parfois aussi lumineux et beau, « Roubaix, une lumière » envoûte, et de scène en scène, il se dresse même comme l’un des plus beaux films de son réalisateur.

Louis est une jeune recrue de la police de Roubaix. Le soir de Noël, il est appelé pour un incendie criminel. S’il y a bien des suspects, l’enquête a l’air bien plus complexe qu’elle n’en a l’air. Quand, dans la même rue, quelques jours plus tard, le cadavre d’une vieille femme est découvert, assassinée chez elle, son supérieur, le chef de la police, le commissaire Daoud, soupçonne très vite deux jeunes femmes qui vivent ensemble. Mais à Roubaix, la vie est difficile et cette affaire est alors une parmi tant d’autres…

Arnaud Desplechin qui revient au thriller, en voilà une bonne nouvelle et à la découverte de « Roubaix, une lumière« , autant dire que le genre va très bien à son réalisateur et que Desplechin s’est grandement rattrapé après « Les fantômes d’Ismaël« . « Roubaix, une lumière » est un film qui est fascinant, car il tient plusieurs niveaux de lecture et plusieurs niveaux qui sont tous aussi profonds les uns que les autres.

Dans un premier temps, si l’on s’arrête sur la ligne directrice du scénario, Arnaud Desplechin nous entraîne dans une enquête banale sur un meurtre. L’enquête est, dans un sens, évidente, notamment parce que beaucoup du film est dévoilé dans la bande-annonce, ce qui est dommage. Mais ce n’est pas vraiment là l’intérêt de cette enquête. Non, finalement, cette dernière résonne beaucoup comme un prétexte pour entrer dans les rues de Roubaix, au plus proche de ses habitants. Avec ce film, Arnaud Desplechin dresse un contexte social, il parle d’une ville, de sa détresse, de ses habitants, de leurs problèmes, de la pauvreté, du chômage, d’une envie de sortir, d’aller voir ailleurs. Autant de sujets qui peuvent même aller plus loin que la ville elle-même, car finalement, ils résonnent tous comme terriblement d’actualité. Bref, sans jamais tomber dans le misérabilisme, Arnaud Desplechin filme sa ville de manière incroyable, arrivant à capturer et rendre à l’écran une ambiance on ne peut plus particulière. Les différentes enquêtes, hormis celle principale, se tiennent, malgré le fait qu’on n’ira pas au bout de certaines pistes (le nouveau de Daoud par exemple), mais qu’importe au final, car Arnaud Desplechin nous tient, et son film se déguste sans temps mort. Bien sûr, le scénario se fait aussi passionnant dans son enquête principale, dans ses soupçons, dans ses interrogatoires qui nous bousculent parfois autant que ces suspectes. Arnaud Desplechin a fait le choix d’un film qui colle au plus près de la réalité et en plus d’y trouver des acteurs extraordinaires (on y reviendra plus tard), le réalisateur a aussi embauché des flics de la ville pour donner à ses interrogatoires des aspects encore plus vrais, ce qui les rend durs et éprouvants.

« Roubaix, une lumière« , c’est un film qui est profondément marqué dans sa mise en scène. Ce qui est étonnant avec ce film, c’est qu’on n’y trouve pas une scène qui va ressortir plus qu’une autre. Non, ici, Arnaud Desplechin a fait en sorte que tout son film soit concordant, soit unique et que ce soit tout le film qui marque. Doté d’une photographie froide, austère, pour ne pas dire glauque, qui reflète parfaitement le manque de vie de cette ville, Desplechin livre un grand film noir et insalubre.

Mais « Roubaix, une lumière« , c’est aussi un film qui peut être lumineux, comme son titre l’indique et cette lumière justement, c’est Roschdy Zem qui n’a pas été aussi bon depuis des lustres. L’acteur traverse tout le film avec un calme olympien et surtout une assurance rassurante. Le rôle est passionnant, profond, précis, difficile et Zem en fait quelque chose de grand. Il est la lumière de Roubaix. Le casting ne s’arrête pas Roschdy Zem, Arnaud Desplechin ayant réuni beaucoup de talents en un film et il serait logique qu’on les retrouve en 2020, tout comme son réalisateur, à la prochaine cérémonie des Césars. Antoine Reinartz est incroyable et mérite d’emblée le second rôle masculin, quant à Sara Forestier et Léa Seydoux, elles sont bluffantes de bout en bout de métrage.

Arnaud Desplechin revient donc cette année et en quelques minutes, il nous fait oublier la déception de son précédent métrage. Sombre et puissant, passionnant dans chacun de ses aspects et dans ses lectures, « Roubaix, une lumière » est assurément un grand film qui ne manquera pas les prochains Césars, on en prend le pari !

Note : 18/20

Par Cinéted

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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