avril 20, 2024

Haut Perchés – Mon Voisin la Vengeance

De : Olivier Ducastel et Jacques Martineau

Avec Manika Auxire, Geoffrey Couët, Simon Frenay, François Nambot

Année : 2019

Pays : France

Genre : Drame

Résumé :

Une femme et quatre hommes qui se connaissent à peine se retrouvent dans un appartement en plein ciel au-dessus de Paris. Ils ont tous été la victime du même pervers dominateur qui est enfermé dans une pièce. Ce soir-là, ils ont décidé d’en finir. Tour à tour, ils se racontent des souvenirs qui les lient à cet homme et entrent dans la chambre pour se confronter à lui. Mais ce qui s’y passe entre le monstre et eux reste leur secret.

Avis :

Olivier Ducastel et Jacques Martineau est un duo de réalisateurs français qui est en activité depuis plus de vingt ans maintenant. Discret et pourtant très actif, puisque le duo a déjà réalisé dix films, Duscatel et Martineau sont deux électrons libres dans le paysage du cinéma français, offrant un cinéma osé, ambitieux, un cinéma qui peut déranger, un cinéma multifacettes, passant de la gentille comédie avec des acteurs confirmés telle que « Crustacés et coquillages » avec les pétillants Valéria Bruni-Tedeschi et Gilbert Melki, à des films ayant moins de lumière, des films plus sulfureux, comme « Théo & Hugo dans le même bateau« . Trois ans après le sulfureux et pédagogique « Théo & Hugo dans le même bateau« , Olivier Ducastel et Jacques Martineau sont de retour avec un film qui s’annonçait diablement différent dans leur filmographie. Alors que le deux réalisateurs ont toujours donné dans le drame ou la comédie, voici qu’il semblait passer au thriller psychologique.

Pour être franc, j’aime le cinéma de Ducastel et Martineau depuis que j’ai découvert « Crustacés et Coquillages« , et pour la première fois, à la découverte de la bande-annonce de leur nouveau film, « Haut perchés » est le premier qui ne me tentait pas du tout de la part du duo. Mais bon, étant fidèle aux cinéastes que j’aime, j’ai profité d’une avant-première pour découvrir ce nouveau film et j’en ressors diablement surpris par un film fascinant, par un huis-clos aussi étrange qu’obsédant. Avec « Haut perchés« , les deux réalisateurs osent encore une fois autre chose et si leur nouveau bébé est imparfait, il n’en reste pas moins un objet cinématographique en permanence intéressant.

Paris, la nuit, un appartement dans une tour au vingt-huitième étage. Quatre hommes et une femme sont réunis. Ils ne se connaissent pas, ils n’ont sûrement rien en commun, mais pourtant, ils sont tous là. Dans la pièce d’à côté, un homme est attaché. Cet homme sans nom les a manipulés, il leur a fait du mal à chacun d’eux, il leur a fait croire à l’amour et chacun d’eux a décidé de se venger. Alors que la nuit passe, que les langues se délient, chacun d’eux, à tour de rôle, entre dans cette pièce pour régler ses comptes, loin du regard des autres…

Tourné en cachette avec une équipe on ne peut plus réduite. Tourné dans un seul et unique lieu avec cinq comédiens seulement, le nouveau Ducastel et Martineau semblait être un projet totalement à part dans la carrière des deux cinéastes et c’est bien ce qu’il va être.

Bien plus sombre et torturé qu’à l’accoutumée, « Haut Perchés » est très loin d’un « Nés en 68« , ou un « L’arbre et la forêt« . Non, « Haut Perchés« , c’est une expérience en plus d’être un huis-clos qui, s’il ne sera pas oppressant, sera dans tous les cas fascinant et surtout imaginatif, car ici, rien ne sera montré, mais tout, absolument tout, sera divulgué ou suggéré et ça, c’est aussi osé que ça rend tout le métrage fascinant.

Pour ce nouveau film, les deux réalisateurs, qui sont aussi les deux scénaristes du film, ont eu une idée géniale et ils l’ont développée sur une intrigue torturée au possible, qui va tenir de sa première scène à son dernier plan. Un dernier plan aussi évident qu’il est terriblement bien amené.

« Haut Perchés« , c’est une intrigue qui nous enferme avec ses personnages et place son spectateur comme le témoin privilégié de la vengeance de cinq âmes blessées. On pourra reprocher au scénario d’avoir des dialogues qui sont sur-écrits, donnant un ton très théâtral à certains moments, ce qui dénote grandement sur certains passages au point de nous sortir de l’intrigue l’espace de quelques secondes. Des dialogues sur-écrits qui donnent aussi l’impression que certains des comédiens ne sont pas toujours justes dans leur jeu. En même temps, il est difficile d’être juste avec certains de ces dialogues-là. Pour le reste, ce nouveau Ducastel et Martineau est vraiment bon. C’est un film qui derrière sa vengeance parle des sujets que le duo aime aborder. « Haut Perchés » parle d’amour, de déception, de blessures amoureuses, il parle de sentiments, de sexe, d’envie de vengeance, mais est-ce vraiment nécessaire. Puis au-delà de ça, finalement ces personnages et leurs blessures parlent à tous, ils ressemblent à tout le monde, car chacun d’entre eux peut être associé, de par ce qu’il a vécu avec cet homme, à un sentiment, une émotion. Bref, c’est vraiment bien pensé et c’est fascinant de bout en bout. Ducastel et Martineau ont vraiment pris le temps de construire de bons et beaux personnages et si « Haut perchés » tient si bien la route, c’est grâce à ses personnages et ça, malgré parfois des clichés.

Dans la mise en scène, le parti pris est très osé, et le fait qu’à aucun moment le film ne donne ne serait-ce qu’une image de l’homme qui est enfermé dans la pièce d’à côté, fait qu’on reste captivé à la moindre information les personnages pourraient fournir. Bien souvent, les deux réalisateurs vont jouer avec ce qui peut se passer dans la pièce d’à côté, et si, comme je le disais, le film n’est pas oppressant, ce qui peut être une déception, il se rattrape très largement avec une ambiance très particulière. Une ambiance posée entre noirceur, onirisme, décalage, allant jusqu’à faire parfois de l’humour, et comme je le disais plus haut, cette part d’imagination incessante quant à ce qui se passe à quelques mètres des personnages, derrière les murs et cette porte close.

Après, comme je le disais plus haut, le film n’est pas toujours juste, il a de petites longueurs, car il a aussi des coups de mou. Les acteurs sont tous bons, tenant des personnages très différents (Mention à François Nambot et Geoffrey Couët, duo de « Théo & Hugo … « , ou encore Manika Auxire, dont c’est le premier rôle) même si parfois il faudra leur pardonner des petites scènes plus bancales, moins crédibles, du fait des répliques qu’ils ont à jouer.

Pour leur dixième film donc, Olivier Ducastel et Jacques Martineau continuent de s’affirmer en électrons libres, osant changer de style et de ton, tout en abordant leurs sujets de prédilection. « Haut Perchés » est une expérience de cinéma, c’est un film en permanence intéressant aussi bien dans ce qu’il raconte que comment il le raconte, mais comme toutes expériences de cinéma, cette dernière ne plaira pas à tous. Il faut donc savoir où l’on met les yeux. Le film sera sûrement très mal distribué (ce qui peut être compréhensible au vu de l’audace du projet), mais si jamais vous avez envie d’autre chose, si vous avez envie de pousser l’imagination et vous perdre en compagnie de personnages fascinants, alors n’hésitez pas à vous enfermer dans une salle de cinéma.

Note : 15/20

Par Cinéted

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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