avril 19, 2024

Ghost – Prequelle

Avis :

Pour la majorité des profanes en matière de métal, les groupes sont bien souvent extrêmes, violents et les pochettes d’album sont là pour en attester. Entre créatures dévastatrices, titres évocateurs et volontairement provocateurs, prestations scéniques qui font du bruit et alimentent les rumeurs, on peut dire que le genre est souvent soumis à un regard acerbe et critique. Oui, le commun des mortels pensent que les amateurs de métal mangent des chauves-souris, boivent du sang et ont des idées morbides. Et en un sens, les groupes jouent ce jeu pour choquer la pauvre bougresse dont le fiston va se mettre dans les oreilles des versets sataniques à faire pleurer du sang à n’importe quelle vierge effarouchée. Mais il ne faut pas oublier que cela n’est qu’un jeu et certains groupes l’ont très bien compris, comme Ghost. Groupe suédois à la réputation sulfureuse, Ghost s’est fait un nom de deux manières bien distinctes. D’une part par des pochettes d’album très travaillées amenant des prestations scéniques inoubliables, se moquant délibérément de la religion chrétienne. Et d’autre part avec une énorme distance entre ce que l’on pense entendre et ce que l’on va entendre. Car oui, malgré un aspect qui laisse présager du Death, Ghost propose du Rock, du Hard au pire des cas, avec une précision incroyable et un sens de la maîtrise que rares sont les formations à avoir. De ce fait, trompant volontairement son public, Ghost s’est constitué une solide réputation et c’est avec délectation que nous nous sommes plongés dans ce quatrième effort.

Un album qui annonçait du changement, puisque exit les trois papes précédents, Ghost fait peau neuve avec un cardinal dont le look tient plus du gangster des années 30 que du religieux aimant les petits enfants de chœur. Nouveau chanteur donc, et surtout grosse prise de risque sur cet album, assez court, seulement dix pistes, mais qui prend tout le monde à revers, s’amusant à renouer avec un rock très années 80, et des titres beaucoup plus dansants qu’à l’accoutumée. Après une introduction plutôt sordide où des enfants chantonnent une comptine glauque avec Ashes, le groupe se lance avec Rats. Introduction avec une batterie fortement rythmée, riffs de gratte aiguisés, pas de doute, Ghost est bel et bien là et livre un premier morceau relativement Hard avec des paroles bien glauques. Mais ce qui fait le charme de ce morceau, c’est qu’il y a encore une fois une distance prise avec cette mouvance Hard dans le refrain qui s’adoucit avec des chœurs qui viennent donner une autre ampleur au titre, comme si même dans la mort, et la propagation de la maladie par les rats, il y a une libération joyeuse. Cette distance, ce mélange macabre et savamment dosé, on le retrouve dans d’autres titres comme Pro Memoria et son refrain ultra catchy, ou encore dans le sympathique mais plus faiblard Witch Image, qui lorgne carrément vers le côté psychédélique des années 70. Un rock de la belle époque très présent dans ce skeud, avec notamment l’incontournable Dance Macabre, une pure réussite et un titre qui donne immédiatement envie de danser. On peut aussi évoquer Faith, plus Hard que le reste, démontrant les vraies intentions de ce cardinal démoniaque.

Mais réduire Ghost à un simple revival rock des années 80 est bien trop réducteur car le groupe a plus d’une corde à son arc et cet album, qui est une vraie tuerie, le prouve par plusieurs aspects. Tout d’abord avec See the Light, qui est une sorte de ballade gothique qui touche au plus profond malgré des paroles très sombres. Le morceau livre des riffs agressifs lors du refrain, mais arrive à créer une sorte de mélancolie durant toute sa durée, offrant un moment à part dans cet effort. Dans le même style, Life Eternal, qui clôture ce nouvel opus, est une d’une douceur insoupçonnée et montre que le groupe sait se faire plus langoureux tout en restant cohérent et dense dans ce qu’il propose. Mais le plus fort dans cet album réside dans les deux titres instrumentaux qui sont opposés et s’intègrent pourtant parfaitement dans le délire. Miasma est certainement le meilleur titre de l’album, avec son début calme, montant crescendo dans une succession de solos faramineux avant d’aborder un final au saxophone de manière jubilatoire. Au contraire de Helvetesfonster, plus dans l’ambiance gothique, dans un moment aérien et éthéré qui imprègne complètement l’auditeur, hypnotisé devant ce moment enchanteur et pourtant si sombre dans le fond.

Au final, Prequelle, le dernier album de Ghost, est une réussite totale. Entre moments Hard, passages plus Rock et plages instrumentales de folie, le groupe montre toute l’étendue de son talent et ne lésine pas sur les moments grandiloquents pour créer encore plus de distance entre sa musique, son look et son ambiance. Rares sont les groupes à bénéficier d’une telle technique et d’une telle maîtrise et il est logique que Ghost s’impose de plus en plus sur une scène qui demande du changement. Bref, ce quatrième effort est un immanquable et l’une des plus belles choses de 2018.

  • Ashes
  • Rats
  • Faith
  • See the Light
  • Miasma
  • Dance Macabre
  • Pro Memoria
  • Witch Image
  • Helvetesfonster
  • Life Eternal

Note : 19/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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