avril 19, 2024

Le Monstre des Temps Perdus

Titre Original : The Beast From 20 000 Fathoms

De: Eugene Lourie

Avec Paul Christian, Paula Raymond, Cecil Kellaway, Kenneth Tobey

Année: 1953

Pays: Etats-Unis

Genre: Science-Fiction

Résumé:

A la suite d’une expérience nucléaire, un dinosaure refait surface et menace d’attaquer l’île de Manhattan…

Avis:

Les films de monstres ne se résument pas seulement à ceux de chez Universal et qui ont une taille humaine. En effet, si les vampires, loups-garous et autres peuples des ténèbres ont envahi les cinémas dès les années 30, durant les années 50, la mode des monstres change de fusil d’épaule et propose quelque chose de plus gros. Les dinosaures ou autres sauriens inclassables vont faire un retour fracassant et semer la terreur dans les grandes villes comme New-York. Dans le subconscient commun, le plus grand monstre du cinéma reste Godzilla et sa flopée de suites, qui est une parfaite image de la peur du nucléaire par le Japon. Mais historiquement, cela ne s’est pas vraiment passé comme cela. En effet, un an avant la sortie de Gojira, les américains ont pondu leur propre monstre né d’une réaction nucléaire, à savoir un dinosaure enfermé dans les glaces depuis des millions d’années. Le Monstre des Temps Perdus est plus ancien que Godzilla et c’est d’ailleurs ce film qui inspirera par la suite Ishiro Honda pour créer son propre monstre à écailles. Du coup, comme il est toujours intéressant de se replonger dans le passé pour comprendre aujourd’hui, retournons sur ce film signé Eugene Lourie.

Chef décorateur puis directeur artistique jusque dans les années 80, Eugene Lourie n’aura que trois films à son actif et chacun a un point commun, un monstre géant. Après le film qui nous intéresse, il réalisera six ans plus tard Béhémot, le Monstre des Mers, puis deux ans après Gorgo avant de lâcher définitivement la caméra. Avec Le Monstre des Temps Perdus, il essuie un petit peu les plâtres du film d’après-guerre qui ose parler du nucléaire et de ses méfaits. Avec ce film, il va se pencher sur le cas des essais dans l’Antarctique et de la libération d’une bête ancestrale qui va semer le trouble dans New-York. Le sujet du film n’est pas vraiment le monstre à proprement parlé, mais plutôt l’impact du nucléaire sur l’humain et l’incrédulité de certains savants qui refusent de croire certaines choses. Il réside dans ce film une certaine modernité, notamment dans la façon dont sont vus les savants, reniant parfois leurs propres sujets. Ici, un paléontologue qui refuse de croire un scientifique qui dit avoir vu un dinosaure. En faisant cela, le réalisateur montre à quel point certains scientifiques sont blasés et sûrs d’eux, quitte à mettre en péril toute une population. Il réservera d’ailleurs un sort funeste à ce dernier, qui mourra le sourire aux lèvres, voyant ce qu’il a toujours renié le bouffer. L’inconnu se reflète aussi dans le nucléaire, ce monstre invisible qui va créer quelques surprises, même sur la fin du film alors que l’on pense avoir trouvé une solution pour mettre fin aux jours du monstre. Un sang radioactif va alors rendre tout le monde malade et c’est bien la faute des humains qui font joujou avec n’importe quoi.

Ce point de vue est intéressant mais il va être mis à mal par une solution finale un peu grotesque, où on verra qu’il suffit d’injecter un isotope pour sauver la planète. En faisant ainsi, Eugene Lourie  atténue son propos sur le nucléaire, proposant une solution finalement similaire à ce qu’il dénonce, à savoir quelque chose de dangereux pour l’homme et dont on ne connait pas les effets à long terme. L’autre gros défaut du métrage réside aussi dans son rythme. Le film est lent et demeure très bavard pour pas grand-chose. On va voir le monstre assez rapidement, après une introduction proche du documentaire pour mieux rendre plausible la créature, puis par la suite, on va aller de rencontres en déconvenues alors que le personnage principal va essayer de raconter ce qu’il a vu. On reste dans une mise en scène classique, assez statique, ce qui est normal pour l’époque, mais qui n’accroche pas forcément l’œil. Et les quelques apparitions du monstre qui dézingue un bateau ne sauvera pas le film d’un certain ennui, où l’on baille poliment. Fort heureusement, les acteurs semblent prendre un certain plaisir à jouer la comédie et leur simplicité sauve clairement la mise. On aura droit à des personnages attachants, gentils, crédibles, même le scientifique sceptique, et pour le coup, cette replongée dans les années 50 fait rudement plaisir à voir pour le charisme dégagé par ces comédiens.

Mais surtout, le plus intéressant reste le monstre en lui-même. Créé et animé par Ray Harryhausen, cette petite maquette fait des merveilles et reste encore aujourd’hui un petit bonheur pour les yeux. Outre son design plutôt sympathique, c’est son animation au sein de la ville qui restera bluffante. De nos jours, les plus blasés diront que c’est visible à trois kilomètres et que l’on voit que c’est de la pâte à modeler, et pourtant, ça fait toujours son petit effet. Le carnage dans la ville de New-York sur la fin est une belle réussite, aussi bien sur la mise en scène que sur les effets visuels. Les murs tombent, les voitures se font écraser, les gens courent en tous sens pour se sauver. On aura même droit à un homme se faisant dévorer par un effet un peu grossier mais qui a dû terrifier plus d‘une personne à l’époque. L’animation en fin de film est aussi une belle réussite, lorsque la bête s’en prend à un grand-huit et le réalisateur arrive à rendre tout cela prenant et surtout visuellement intéressant. Bref, pour faire court, ce monstre est l’un des points forts du film.

Au final, Le Monstre des Temps Perdus est un film très attachant malgré son côté un peu révolu. Vintage aussi bien dans le fond que dans la forme, il n’en demeure pas moins très intéressant à voir de par ses effets spéciaux assez grandiloquents pour l’époque et son message très clair sur les méfaits du nucléaire, un an avant la sortie de Godzilla d’Ishiro Honda. Bref, un film qui demeure lent, parfois un peu dur à suivre à cause de l’évolution des technologies et des connaissances contemporaines, mais qui possède un charme fou et dont les amateurs de vieux films fantastiques se régaleront.

Note: 13/20

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Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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