avril 16, 2024

Les Maisons Hantées au Cinéma

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Les origines

Le mythe de la maison hantée n’est pas récent. Bien au contraire, il trouve ses origines depuis les grands philosophes comme Socrate ou Platon. En général, il est difficile de dissocier la maison hantée des fantômes. En effet, pour qu’une maison soit hantée, il faut une entité invisible ou étrangère, errant dans un lieu clos. Ainsi, le fantôme, de par sa nature éthéré et de sa non-réalité est le parfait personnage pour hanter une maison.

Mais qu’est-ce qu’un fantôme ? Pour la plupart du temps, il s’agit d’une âme égarée. Depuis les prémices de la religion, que ce soit sous une forme polythéiste ou monothéiste, l’être humain se différencie des animaux par une conscience et une âme. Une fois mort, c’est l’inconnu, et cela effraie. La religion était là pour instruire par la terreur au départ, et on racontait aux gens que s’ils n’étaient pas fidèles à Dieu et aux commandements de l’église, leur âme irait brûler en enfer. Ainsi, l’âme serait ce qu’il resterait à la fin de la vie. Le fantôme va donc naître à partir du moment où l’âme du défunt n’arriva pas à partir, que ce soit en enfer ou au paradis. Il reste donc à errer dans notre monde, recherchant justice ou vengeance. La plupart du temps, le fantôme hante un endroit précis, le lieu de sa mort. Et à l’époque, les gens mourraient souvent chez eux, ce qui nous amène à la maison hantée.

Elle est un fantasme pour beaucoup d’écrivains durant le XXème siècle, mais elle trouve ses sources à l’époque romaine puisque des gens comme Pline ou Plaute ont écrit des histoires de maisons hantées. On retrouve même une histoire dans les 1001 Nuits, L’Histoire d’Ali le Cairote et de la Maison Hantée à Bagdad. Par la suite, elle sera reprise par des écrivains anglo-saxons, servant de toile de fond à une intrigue dans une atmosphère brumeuse et gothique. On retrouve le roman d’Edgar Allan Poe, La chute de la Maison Usher qu’il a écrit en 1845.

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Par la suite, d’autres écrivains suivront comme Henry James avec Le Tour D’Ecrou (1898) ou Charles Dickens avec The Haunted House (1859). Mais le roman le plus intéressant reste peut-être Le Fantôme de Canterville par Oscar Wilde.

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Voyant les possibilités intrigantes et surtout l’atmosphère que cela crée, le cinéma va très vite se rendre compte de la force de la maison hantée. Ainsi, le premier film à voir le jour est La Maison Hantée, en 1906, un film de 6 minutes franco-espagnol. Par la suite, la maison hantée va juste servir de lieu d’intrigues pour résoudre des mystères, tout en instaurant une ambiance fantastique et effrayante. Mais pourquoi cet engouement pour un lieu hanté ?

Pourquoi la maison est-elle hantée ?

Non mais c’est vrai ça ! Pourquoi un lieu serait-il habité par une entité fantomatique alors qu’au départ rien ne le destine à ça ? Il me semble que l’on peut noter trois différentes raisons pour qu’un lieu soit hanté.

La première chose que l’on peut noter, c’est la construction de la maison sur un lieu interdit. On retrouve ce thème dans Poltergeist de Tobe Hooper et Steven Spielberg mais aussi dans Simetierre de Mary Lambert. Ainsi, la maison bafoue le repos des anciens, en général amérindiens, et essaye par tous les moyens de faire partir les habitants de la baraque. On retrouve donc le thème général de la religion et des âmes qui cherchent le repos éternel. On y retrouve aussi malheureusement une pointe de racisme suivant la façon dont est traité le thème, avec les méchants indiens contre les gentils américains blancs.

La deuxième raison d’une hantise peut provenir qu’une âme égarée ne trouve pas le repos à cause d’une raison plus ou moins valable. Que ce soit pour résoudre une enquête, retrouver un objet ou encore prévenir ses proches, le fantôme, de par sa maladresse ou de par sa nouvelle nature peut effrayer et l’être vivant se tromper sur son compte. On peut retrouver cela dans le très récent The Pact de Nicholas McCarthy.

Enfin, la troisième et dernière raison peut provenir d’un meurtre violent au sein de la maison. Les victimes hantant ce lieu et ne souhaitant qu’une vengeance aveugle envers quiconque pénètre dans la demeure. L’un des films les plus connus avec ce thème est résolument The Grudge de Takashi Shimizu.

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Pourquoi la maison hantée fait-elle peur ?

Pour tout le monde, la maison est un symbole. Elle représente son petit nid douillet dans lequel on se précipite de rentrer quand on a terminé son boulot. Elle représente donc notre petit îlot de sécurité, l’endroit où l’on peut faire ce que l’on veut sans emmerder personne. Il s’agit aussi d’un lieu sûr, où l’on a nos habitudes, nos coutumes et qui a un minimum d’ordre, notre ordre à nous. De ce fait, la maison est un lieu très important pour nous, car il est un peu le socle de la famille, là où tout le monde se retrouve et se sent bien. Ainsi, si ce lieu devient perturbé, dérangé, ou même différent, on se retrouve déboussolé et anxieux. Les victimes de cambriolage vivent d’ailleurs bien souvent cet acte comme un viol. On rentre dans leur intimité. Et finalement, quand la maison devient hantée, elle est habitée par quelqu’un d’autre, et le propriétaire devient presque la victime d’un viol perpétuel.

Ce qui était pour lui un asile, devient maintenant un lieu étranger et effrayant où il n’est plus le maître de son endroit personnel. C’est pour cela que la maison hantée fascine et fait peur. Elle constitue la violation du seul endroit salutaire pour tout être humain. Et bien souvent, la maison hantée pourrait être la nôtre (bon, sauf si vous habitez dans un appartement neuf au milieu d’une grande ville avec des éclairages de partout et sans aucune histoire, mais à ce moment-là, veuillez ne pas faire chier les autres !). Pour peu que l’on habite une vieille bicoque qui fait du bruit quand on ouvre une porte, on peut dire que sa maison est hantée si l’on vient de regarder un film d’épouvante avec une belle demeure gothique comme star.

Néanmoins, certains films restent moins efficaces que d’autres, à cause d’un traitement trop vaporeux ou alors à cause d’une intrigue qui ne marche pas. Bien souvent, le film de maison hantée est lent, instaure une ambiance particulière qui met mal à l’aise, et cela quelles que soit les origines du film. D’ailleurs, on aurait pu faire un tour du monde de la maison hantée, mais les thèmes sont très récurrents malgré des cultures diverses. Il nous a semblé plus logique de faire un tour d’horizon par genre, car la maison hantée cache bien des surprises.

La Maison de l’Epouvante

Le film de maison hantée fonctionne surtout lorsqu’il personnifie la maison. Elle devient un être total de l’histoire, presque vivante. Les films les plus réussis sont souvent les premiers films anglais à tendance gothique, présentant des demeures ou grandiloquentes ou délabrées. Très tôt, la maison hantée fascine et devient le lieu de tous les fantasmes et cauchemars. Parmi les productions les plus marquantes, on retrouve La Nuit de Tous les Mystères de William Castle avec Vincent Price (1959) ou encore La Maison du Diable de Robert Wise (1963).

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Durant ces années, le film de maison hantée devient presque un genre à part entière et le véritable héros est la maison. C’est elle qui effraie de par son aspect, mais aussi de par les éléments qui se déroulent à l’intérieur. Depuis quelques temps, ce genre a baissé à cause d’un traitement trop binaire voire inexistant de la maison en elle-même. On préfère s’intéresser aux personnages ou aux effets gores qui vont en découler et le côté angoissant a laissé la place à un côté horreur pop-corn qui ne fonctionne pas avec ce genre de métrage. Du coup, on tombe plutôt dans le film d’horreur assez frontal, délaissant le fantôme hanteur pour le tueur psychotique qui se planque là-dedans. Parfois cela fonctionne comme dans The Collector, et parfois cela ne marche pas.

Néanmoins, chaque décennie possède son petit film de maison hantée bien troussé. A la fin des années 70, on retrouve le culte Amityville, La Maison du Diable de Stuart Rosenberg. Le film demeure très lent, mais il instaure une ambiance lourde et la tension monte crescendo. Mais surtout, le coup de force du réalisateur vient du fait de mettre en avant une maison qui a l’aspect d’une personne. Qui n’a jamais frissonné devant ces deux fenêtres hautes et la porte d’entrée formant presque un visage humain. De ce fait, la maison devient vivante et cela est vraiment efficace. Le fait que l’on ne sache pas non plus ce qu’il y a à l’intérieur (est-ce le diable ? Est-ce une autre entité ? Est-ce la maison en elle-même ?) demeure un élément vraiment effrayant.

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On peut aussi citer dans le même genre, en termes de films d’épouvante, des films comme Poltergeist. Mais on parlera plus volontiers de Shining de Stanley Kubrick. En effet, ce film s’appuie sur tous les éléments du film d’épouvante et de hantise, tout en laissant le spectateur à ses propres spéculations. Mais là où le film frappe fort, c’est que le réalisateur n’oublie pas de donner vie à l’Overlook Hotel, rendant le moindre couloir inquiétant dans une réalisation impeccable. En ce sens, il insiste vraiment sur le côté isolé et lugubre de cet hôtel en plein hiver.

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On passera rapidement sur les remakes de plus ou moins bonne facture, pour se pencher sur Paranormal Activity, qui peut ne pas plaire, mais qui a fait un gros buzz et surtout qui a instauré une licence qui n’en finit plus. Ici, le film ne se centre pas sur la maison et sur l’architecture, mais bien sur les personnages et surtout sur l’origine de la présence qui terrorise le couple. S’il possède des moments assez longs, il a le mérite de proposer quelque chose de nouveau dans le found-footage.

Encore plus récemment, La Dame en Noir de James Watkins avec Daniel Radcliff renoue avec les sources du film gothique. Le réalisateur a le bon gout de proposer une histoire assez simple avec une belle baraque gothique hantée, sombre et isolée, mais surtout, il donne une certaine ampleur à ses personnages et n’oublie pas de jouer avec les méandres de la maison et son extérieur lugubre. Le film est plutôt réussi et fait un peu anachronique avec ce que l’on nous propose aujourd’hui.

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La Maison de l’horreur

Au fur et à mesure des années et de l’évolution des mœurs, le film de maison hantée a peu à peu dérivé vers le film d’horreur binaire qui ne se soucie plus du tout de la maison en elle-même, mais des sévices que vont subir les personnages. Ainsi, on retrouvera un côté plus gore, bien que le sang soit presque absent à chaque fois, mais aussi un côté plus violent et moins insidieux. Les films de maison hantée qui se basent sur ce côté-là sont souvent moins réussis, mais ont un rythme moins lent. Bien souvent, ces films sont issus des remakes de certains des films précédents comme Hantise de Jan De Bont qui est un remake de La Maison du Diable ou encore La Maison de l’Horreur qui est un remake de La Nuit de Tous les Mystères. On y retrouve quelques passages gores et une atmosphère beaucoup moins prégnante. On peut aussi parler de la saga The Grudge, qui sans être gore, accumule les moments dérangeants en se fixant exclusivement sur les fantômes et non pas sur la demeure en elle-même. Ce qui fait le charme de ces films, ce n’est pas l’atmosphère mais plutôt l’aspect enquête car les personnages vont tenter de trouver le pourquoi du comment et c’est assez agréable si le spectateur est sollicité.

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La Maison du Drame

Mais la maison hantée n’est pas seulement utilisée dans des films d’horreur et cela, on a tendance à trop l’oublier. Le film dramatique, ou tout du moins à tendance dramatique utilise aussi le procédé de la hantise pour rajouter un élément fantastique ou pour fournir des émotions supplémentaires. On peut parler de hantise avec le film préféré des nanas, Ghost. Alors il est vrai que c’est un peu tiré par les cheveux, mais il est la plupart du temps dans la maison avec sa femme et essaye de communiquer avec elle.

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On peut aussi voir du drame dans certains films fantastique avec des maisons hantées. Alors en général, le début de ce genre de film est plutôt horrifique, mais par la suite, le métrage dérive vers le fantastique et le drame. En fait, bien souvent, on retrouve des fantômes qui font peur au départ, mais qui sont gentils par la suite et font office de messagers. On retrouve donc cela dans le film Les Messagers avec Kristen Stewart ou encore avec le sublime L’Orphelinat avec Belen Rueda dont le dénouement est vraiment dramatique.

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La Maison du Rire

La maison hantée ne fait pas seulement rire ou peur, elle peut aussi être drôle. Mais comment ? Et bien on peut voir deux cas de figures, mais en général, on retrouve les deux cas dans le même film. De par les effets que peuvent produire les habitants invisibles de la baraque, il peut en ressortir des situations cocasses. C’est ce qui se passe dans le film Deux Nigauds dans le Manoir Hanté de 1946.

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L’autre cas de figure est que les fantômes sont de joyeux gais lurons et qu’ils font des blagues potaches aux visiteurs. On retrouve cela dans beaucoup de films destinés à des enfants. On peut citer Casper bien évidemment, mais aussi Le Manoir Hanté et les 999 Fantômes avec Eddy Murphy.

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Néanmoins, les adultes peuvent aussi avoir leur moment de drôlerie avec une maison hantée. Comment passer à côté de Beetlejuice de Tim Burton. Oscillant entre un design effrayant et un humour de tous les instants, le film s’adresse surtout à un public assez averti pour des moments assez complexes et parfois assez effrayants tout de même. En tous les cas, ce que l’on peut remarquer dans toutes ces comédies, c’est qu’elles reprennent des codes déjà existants pour les tourner en dérision. La musique, mais les situations surtout jouent un rôle prépondérant dans la façon d’appréhender la maison hantée.

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En France, nous ne sommes pas en reste, puisqu’il existe une comédie de maison hantée avec Poltergay. Clovis Cornillac se frite contre des fantômes homosexuels dans une grande baraque qui a subi un drame quelques années auparavant.

Et l’animation dans tout ça ?

Il sera dommage de passer à côté du film d’animation de Robert Zemeckis, Monster House, qui se concentre exclusivement sur une maison vivante, rendant cette bicoque aussi vivace d’un être humain. Le film fait peur, mais il est très efficace et rend accessible aux enfants un film d’épouvante comme peut l’être Amityville. Ainsi, il reprend les codes de l’épouvante pour les insérer dans un style graphique enfantin. Le film est une réussite d’ailleurs !

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Hantise en séries

En dehors du cinéma, on peut aussi voir que la maison hantée est très présente dans les séries télévisées. Si on en retrouve à la pelle dans les Supernatural, on s’attardera plus facilement sur la série très surestimée American Horror Story, qui offre une maison qui ressemble étrangement à celle de Amityville. Malheureusement, la maison n’est que secondaire, car la série s’attarde trop sur des personnages agaçants et perd de sa force horrifique. Enfin, on peut aussi citer Dead Crossroads, un faux documentaire sur les maisons hantées en France. Un concept qui a le mérite d’être novateur et surtout d’être 100% frenchy !

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On ferme la porte !

Pour synthétiser tout ça, on peut dire que la maison hantée n’a pas fini de faire parler d’elle. En effet, de nombreux films d’inspirent des différents « faits réels » pour refaire des films de flippe autour d’une maison hantée et le dernier en date, The Conjuring, semble vouloir mettre tout le monde d’accord, car il parait qu’il fait vraiment peur. On remarquera que les plus réussis sont souvent ceux qui arrivent à instaurer une ambiance qui colle avec l’aspect global de la maison, lui fournissant quelque chose de vivant et de pensant. Mais que serait une maison hantée sans ses fantômes ? Là aussi, ils ont un rôle très important qui confère à la maison sa puissance. De nos jours, on a un peu perdu l’habitude de faire des films insidieux et lent au profit d’une action à outrance et d’un gore jusqu’à plus soif. C’est bien dommage car plutôt que de combler les attentes du spectateur avide de spectacle, il serait plus approprié de fournir ce que l’on a besoin de voir. Alors si votre maison est ancienne et que vous possédez deux fenêtres à l’étage ainsi qu’une belle porte d’entrée béante, espérez que les fantômes soient sympas, comme ceux de Régine ou de Michou. Comment ça ils ne sont pas encore morts !

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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