avril 19, 2024

The Promised Neverland

Auteurs : Kaiu Shirai et Posuka Demizu

Editeur : Kazé

Genre : Shonen

Résumé :

Emma, Norman et Ray coulent des jours heureux à l’orphelinat Grace Field House. Entourés de leurs petits frères et sœurs, ils s’épanouissent sous l’attention pleine de tendresse de “Maman”, qu’ils considèrent comme leur véritable mère. Mais tout bascule le soir où ils découvrent l’abominable réalité qui se cache derrière la façade de leur vie paisible ! Ils doivent s’échapper, c’est une question de vie ou de mort !

Avis :

Si la France est le deuxième plus gros consommateur de mangas dans le monde après le Japon, elle a toujours un train de retard pour sortir les bets-sellers. La preuve avec The Promised Neverland, l’un des plus gros succès nippons depuis 2016 et sa parution dans le magazine Weekly Shonen Jump, mais qui n’avait toujours pas de parution chez nous. C’est désormais chose faite grâce à l’éditeur Kazé qui permet aux français de découvrir ce Shonen qui casse la baraque depuis maintenant deux ans. Un succès assez étonnant puisque les deux créateurs de la série, Kaiu Shirai au scénario, et Posuka Demizu au dessin, sont de presque illustres inconnus et ce n’est qu’après un travail ensemble sur un one shot que le magazine a accepté leur histoire avec The Promised Neverland. Mais est-ce vraiment la claque tant attendue et cela dès le premier tome? Rien n’est moins sûr malgré la qualité indéniable de ce récit.

Pour la petite histoire, on va se retrouver dans un orphelinat où trois jeunes de douze ans côtoient d’autres orphelins plus petits. Ensemble, ils forment une famille sous l’égide de Maman, une gardienne bienveillante et toujours souriante. Les journées des orphelins sont très codifiées entre les tâches ménagères et le travail sur une tablette afin d’évaluer leurs connaissances. Il n’y a que deux règles au sein de l’établissement: ne pas s’approcher du portail de sortie et ne pas dépasser les barrières qui encerclent une forêt. Tout semble aller pour le mieux, et encore plus lorsque une jeune petite se fait adopter et doit partir au portail avec Maman. Deux des trois adolescents vont alors se rendre compte que la petite a oublié son doudou et décident de lui ramener au portail. Sauf qu’ils retrouvent la petite fille morte et que Maman vend les orphelins à des démons qui s’en servent pour se nourrir. L’orphelinat n’est donc qu’un élevage et il va falloir se sortir de là.

Le pitch est assez riche et il promet une intrigue qui oscille entre fantastique, horreur et thriller. Le début est assez bien fait et on va suivre les habitudes de cet endroit à travers les yeux et la voix d’Emma, l’héroïne, qui est une jeune fille optimiste, utopiste et toujours enjouée. On fait alors la rencontre de ses deux meilleurs amis, Ray, un garçon intelligent qui a constamment le nez dans les bouquins et Norman, lui aussi très intelligent mais dans tout ce qui est anticipation et stratégie. On remarquera vite que les caractères et les capacités de chacun sont très tranchés, de telle sorte à fournir une équipe complémentaire et des personnalités assez fortes. Point de doute, rien qu’avec ces stéréotypes, nous sommes dans un Shonen pur jus. Et si on doit y rajouter les différentes touches d’humour, alors le doute n’est plus permis. On retrouvera d’ailleurs tout ce qui fait le Shonen de base, entre des personnages aux différences très marquées et un humour parfois un peu enfantin qui dédramatise rapidement toutes les situations crispantes. Ce sera d’ailleurs l’un des principaux reproches que l’on pourrait faire à ce premier tome, qui n’arrive pas vraiment à tenir son suspens à cause de blagues dans des moments inopportuns.

Mais finalement qu’importe, puisque le manga ose tout de même certaines choses très intéressantes sur lesquelles on va plutôt s’appesantir. Tout d’abord, l’histoire est assez originale et pourrait parfaitement sortir de l’esprit malade d’un Guillermo Del Toro ou d’un Juan Antonio Bayona. Pourquoi? Tout simplement parce que l’on parle de l’enfance, de sa faculté à s’adapter à des situations compliquées (ici, l’absence de parents et la méconnaissance d’un monde très vaste) et qu’au beau milieu de tout ça, on va poser un problème majeur, des démons qui mangent des gosses. Difficile alors de ne pas penser à L’Orphelinat ou encore au Labyrinthe de Pan. Des thèmes qui sont ici traités avec une certaine justesse et cela malgré la joyeuseté d’Emma, le protagoniste principal. Ensuite, il va y avoir une jolie gestion de l’apparition des monstres. En effet, on ne se doute pas un seul instant de cette tournure avec des démons aux designs ignobles et qui se repaissent de jeunes enfants, voire même de leurs cerveaux. On a un clivage assez glauque et même gore, qui montre que The Promised Neverland n’est pas un Shonen classique. Puis enfin, il y a toute la réflexion autour de l’échappatoire. Et là, il sera très difficile de ne pas y voir des accointances avec un certain Death Note. Non pas dans l’histoire en elle-même, mais plutôt dans les réflexions et la recherche de solution pour s’en sortir. Les alternatives proposées par Norman ou Ray pour se sortir de l’orphelinat rappelle celle de L lorsqu’il essaye de coincé Light. Sauf qu’ici, les choses sont plus simples et laissent plus de place à un dessin classique mais efficace, oscillant là aussi entre deux styles, le coté lumineux et gracieux des enfants et l’aspect beaucoup plus sombre des démons.

Néanmoins, il reste un dernier petit point noir à cette histoire, ou tout du moins dans ce premier tome, c’est l’aspect assez manichéen qui s’en dégage, et notamment avec le personnage de la Maman. Au début très gentille et affectueuse, l’histoire ne laisse aucun doute sur sa nature foncièrement mauvaise. Très rapidement, on va voir que le personnage est maléfique, qu’il possède plus d’un tour dans son sac pour trouver les enfants ayant percé le secret de cet orphelinat, et on ne joue pas assez sur l’ambivalence. C’est-à-dire que ce premier tome nous présente le personnage comme méchant et pas comme quelqu’un de contraint, ou ne laisse planer le doute sur sa vraie nature. C’est dommage car cela enlève un peu de suspense et ne laisse pas suffisamment d’envergure à ce personnage au potentiel pourtant évident. Et ce sera la même chose avec le deuxième adulte de l’histoire qui arrive vers la fin et qui est d’une mesquinerie sans nom, aussi laid que son physique.

Au final, The Promised Neverland est un manga plutôt réussi malgré les quelques reproches que l’on peut lui faire. Prenant les codes du Shonen pour les rendre un peu plus sombres et moins joyeux (malgré un humour trop enfantin et redondant), ce premier tome tient ses promesses et donne envie de savoir la suite, la nature même des démons, ce qu’il est devenu de l’humanité et surtout, comment ces enfants assez attachants et foncièrement humanistes, vont se sortir de ce mauvais pas. Bref, un joli coup pour Kazé qui s’offre une série alléchante et qui a un furieux goût de reviens-y.

Note: 15/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

Voir tous les articles de AqME →

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.