avril 25, 2024

Un Tramway Nommé Désir

Titre Original : A Streetcar Named Desire

De: Elia Kazan

Avec Vivien Leigh, Marlon Brando, Kim Hunter, Karl Malden

Année: 1952

Pays: Etats-Unis

Genre: Drame

Résumé:

Après une longue séparation, Blanche Dubois vient rejoindre sa soeur, Stella, à La Nouvelle-Orléans. Celle-ci vit avec son mari, Stanley, ouvrier d’origine polonaise, dans le vieux quartier français. Ce dernier n’apprécie guère les manières distinguées de Blanche et cherche à savoir quel a été le véritable passé de sa belle-sœur.

Avis:

Tennessee Williams était un grand dramaturge américain à qui l’on doit de nombreuses pièces de théâtre et des succès immenses à Broadway. D’ailleurs, moult pièces de son cru furent adaptées au cinéma et cela dès les années 50 avec notamment Un Tramway Nommé Désir. Alors que la pièce fait un tabac en 1947, c’est Elia Kazan qui décide d’adapter la pièce en film, pour toucher un public encore plus grand. Pour faire cela, il appelle la majorité de la troupe, sauf Jessica Tandy, qui fut remplacée par Vivien Leigh, plus à même de conquérir un public plus large. Cependant, adapté du théâtre n’est pas une chose aisée, notamment à cause de la propension à la palabre, mais aussi au décor plutôt statique. Mais Elia Kazan n’est pas un bleu, même en 1952, et il livre avec ce film un chef d’œuvre du septième art, aussi bien touchant que troublant, révélant pas la même occasion un Marlon Brando irradiant de beauté.

L’histoire est assez simple. Blanche Dubois est une jeune bourgeoise qui part rejoindre sa sœur, qui vit dans le quartier français en Nouvelle-Orléans. Cette dernière est mariée à un américain d’origine polonaise qui n’a pas l’air commode malgré sa belle gueule. Si les deux sœurs sont heureuses de se retrouver, lui semble soupçonner la nouvelle arrivante d’une escroquerie pour avoir perdu la belle maison de campagne et dilapidé l’argent. Un bras de fer va alors naître entre lui et sa belle-sœur pour connaître le fin mot de l’histoire. Un Tramway Nommé Désir, c’est quatre Oscar et une réputation qui va au-delà du culte, certains le hissant comme l’un des meilleurs films américains de l’histoire. Cependant, au fil des années, on peut craindre un film qui n’est plus au goût du jour et qui va vieillissant. Fort heureusement, et c’est à ça que l’on reconnait les grands films, il est toujours aussi puissant.

Ce qui frappe d’entrée de jeu et qui montre toute la maturité du métrage, c’est le charisme de tous les personnages, et notamment le trio d’acteurs principal. Sans en faire des caisses et perdre son temps en évoquant des flashbacks qui auraient ralenti le rythme, Elia Kazan offre des personnages vrais, aux vies simples mais crédibles et aux tempéraments plausibles. Ainsi, Blanche est une femme maniérée, souvent pénible, parfois détestable, mais attachante car on voit bien qu’elle souffre d’un trouble qu’elle essaye de masquer. Quant à sa sœur Stella, elle est son opposé, femme forte, aimante, avec du caractère, ne cachant rien de ce qu’elle pense. Le duo fonctionne à merveille et on va rapidement sentir de l’empathie pour ces deux femmes. Mais la palme revient à Marlon Brando, une force de la nature, un charisme incroyable et surtout, un personnage fort, qui alterne les moments doux avec les moments durs. L’acteur est non seulement incroyable, mais il donne une épaisseur intense à son personnage, le rendant aussi bien sympathique que malheureux et on ressentira immédiatement de l’empathie pour lui. Et c’est tout ce qui manque au cinéma contemporain, des personnages simples, crédibles, pour qui on ressent de suite quelque chose afin de craindre pour lui, de ressentir des émotions.

Ensuite, la mise en scène d’Elia Kazan est virtuose. Alors bien évidemment, il n’y a pas de caméra virevoltante, d’action à couper le souffle ou de plans-séquences de dingue, mais il se dégage de Un Tramway Nommé Désir un charme fou et cela est dû à la force de la réalisation. Toujours proche des personnages, le cinéaste joue aussi énormément avec les lumières et le noir et blanc qui habille son film. Vivien Leigh est souvent dans l’ombre, voulant cacher à la fois son physique, mais aussi un passif étrange et lugubre. Quant à Marlon Brando, il est toujours en pleine lumière, imposant une carrure massive et mangeant tout sur son passage, comme un ogre. Cette façon de filmer proche des personnages donne plus d’ampleur au drame qui se joue sous nos yeux, mais aussi aux séquences un peu plus rudes, comme les moments de castagne qui donnent la chair de poule. Notamment cette fameuse séquence ignoble où on peut voir Marlon Brando frapper sa femme à cause du jeu et de l’alcool. Cette séquence difficile sera suivie par un autre passage emblématique, montrant toute la faiblesse de l’homme face à ses erreurs.

Le seul petit bémol que l’on peut apporter au film aujourd’hui, c’est qu’il manque clairement de dynamisme et de rythme. Si l’ensemble est absolument sublime, le film se traine parfois en longueur, notamment lors de la romance entre Blanche et l’un des amis de Kowalski. Etrangement, si ces passages sont touchants et encore une fois tournés avec brio, on ne pourra s’empêcher de s’ennuyer, car l’ensemble demeure téléphoné. Le film aurait peut-être gagné à être coupé d’un petit quart d’heure. Néanmoins, la scène de fin reste inoubliable, troublante aussi bien que touchante, et Elia Kazan trouve une parfaite conclusion à un drame qui laisse sur le carreau.

Au final, Un Tramway Nommé Désir d’Elia Kazan est un film sublime qui montre bien comment peut évoluer le rapport à l’autre lorsqu’un intrus se pointe et change toutes nos habitudes. Il s’agit d’un film fort, touchant, sensible, un peu long certes, mais complètement habité par ses acteurs, tous plus beaux les uns que les autres. Métrage intemporel et d’une longévité infinie, ce film qui, rappelons-le, a permis à Marlon Brando de devenir un immense acteur, est un petit bijou qu’il faut voir avant de passer l’arme à gauche.

Note: 18/20

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Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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