avril 20, 2024
BD

Sillage

Auteurs : Jean-David Morvan et Philippe Buchet

Editeur : Delcourt

Genre : Science-Fiction

Résumé :

Sillage est un convoi multiracial de vaisseaux spatiaux à la recherche de planètes à coloniser. Les Hottards, peuple du convoi, jettent leur dévolu sur une planète sauvage couverte de jungles et d’océans qui n’est habitée – selon leurs critères – par aucune espèce intelligente. Mais à leur arrivée, ils rencontrent Nävis, une enfant sauvage d’une race jusqu’alors inconnue de Sillage : les Hommes.

Avis :

La science-fiction a tout d’abord connu ses lettres de noblesse à travers la littérature et certains pionniers ont totalement changé la face de ce genre. Isaac Asimoc, Arthur C. Clarke, Philip K. Dick, autant d’auteurs qui ont permis au genre d’évoluer et de faire pulluler sur les écrans de cinéma, allant du film d’anticipation au space opéra grandiloquent. Mais le neuvième art n’est pas en reste. La BD semble être un domaine assez privilégié pour parler de science-fiction et certaines séries sont devenues des immanquables du genre, comme Universal War On, Aldébaran, Le Régulateur et bien d’autres. Sillage semble avoir une place toute particulière. La série fait partie de ces BDs qui ont pris beaucoup d’importance et qui ne s’arrête jamais, proposant de façon maline des histoires sur un seul tome, permettant ainsi de sortir une infinité de tomes. Aujourd’hui à 19 tomes, la série ne semble pas prête de se conclure, l’héroïne Nävis n’ayant encore pas résolu son histoire personnelle pour savoir d’où elle vient et qui elle est. Mais à force de tirer sur la corde, la série ne finit-elle pas par lasser ?

On peut facilement dire que c’est le cas. Pourtant, les débuts de Sillage sont relativement prometteurs. Mélangeant de façon intelligente la science-fiction avec un côté presque préhistorique, la série veut montrer toutes les dérives de l’humanité à travers un conglomérat de différences aliens dont la façon de penser n’est pas si éloignée de la nôtre. Le premier tome montre alors un méchant qui veut tuer Nävis afin de pouvoir coloniser cette planète et détruire tout un écosystème. La vision du méchant n’est pas anodine et on ressentira une pointe au cœur quand on connaîtra les tenants et les aboutissants de chacun. Et chaque tome, du moins jusqu’au dixième à peu de choses près, va essayer d’apporter un fond intéressant et poussant la réflexion sur notre propre condition. Le terrorisme, la pollution, la corruption politique, l’imposition d’idéaux et de choix pour intégrer un grand groupe puissant. Bref, Sillage brasse tout un tas de thématiques nécessaires, ramenant systématiquement les axes de réflexion vers l’être humain.

Ce début est assez bien mené, ne laissant que peu de place à l’ennui, notamment grâce à des tomes au rythme soutenu et à l’intrigue qui tient clairement la route. Cependant, ce ne sera pas toujours le cas. Certains one shot seront moins forts que d’autres et on pourra même trouver des moments assez maladroits, voire gênants. A titre d’exemple, le peuple opprimé des Ftoross qui ne trouve que le suicide ou les attentats pour se faire entendre, et à quelque part, le scénariste trouve des excuses pour expliquer le terrorisme. C’est très binaire comme façon de voir les choses et cela peut décevoir. On remarquera aussi que la série s’essouffle avec le temps. S’étiolant au niveau de son fil rouge, la saga se perd pour proposer des histoires plus simplistes qui trouvent des liens hasardeux avec d’anciens tomes. Cela montre à quelque part que le scénariste se cherche, tente de faire du liant avec les tomes précédents, mais à quelque part, cela ne fonctionne pas. D’autant plus que les relations entre les personnages n’évoluent pas d’un iota, Bobo sera toujours celui qui mène à la réflexion, le sage du groupe, alors que Snivel sera le robot prévenant, parfois trop, devenant une sorte de souffre-douleur pour l’équipe. Et amener une jeune fille surdouée ou un humain surpuissant qui est en fait le fils de Nävis n’arrange pas les choses, même si cela apporte tout de même son lot d’action.

On ressentira aussi une sorte de redondance sur la fin dans la façon dont sont racontées les histoires. Très souvent, de façon répétitive, on aura une introduction qui met le lecteur directement dans le feu de l’action, puis une difficulté, un flashback pour expliquer les raisons de cette action et enfin la résolution. Le système est assez pratique pour accrocher le lecteur d’entrée de jeu, mais malheureusement, quand ça fait au moins cinq tomes que cette astuce est utilisée, ça commence à faire longuet. Enfin, la série possède un gros défaut, qui est inhérent au format franco-belge, c’est le 48 planches. Pourquoi ? Parce que sur quasiment chaque histoire, la résolution se déroule en quatre planches maximum, précipitant les choses et forçant les auteurs à faire intervenir un deux ex machina ou à proposer un retournement de situation assez abrupt et pas forcément bienvenu. Fort heureusement, les dessins sont très jolis et les différentes univers visités sont variés et montrent une volonté d’être inventif. On regrettera simplement que très souvent, il n’y a qu’un alien qui ne représente qu’une espèce et les tribus sont peu nombreuses.

 Au final, Sillage est une série de science-fiction qui souffle le chaud et le froid. Si les débuts sont prometteurs, mettant en avant tous les problèmes de l’humanité sur une dimension plus grande, comme si ces défauts étaient universels, la suite sera moins reluisante, la faute à des scénarios indigents, trop faciles, qui n’arrivent plus à passionner, à cause d’un fil rouge allant s’étiolant et n’arrivant pas à renouveler son stock d’idées. Bref, si Sillage fait partie des séries les mieux vendues dans le monde du neuvième art, il serait grand temps qu’elle se secoue les puces pour redevenir un pilier de la science-fiction en BD, parce que sur les derniers tomes, ce n’est vraiment pas terrible.

Note : 14/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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