avril 25, 2024

Batman – Sombre Reflet

Auteurs : Scott Snyder et Francesco Francavilla

Editeur : Urban Comics

Genre : Super-Héros

Résumé :

Tandis que Batman enquête sur une étrange vente aux enchères dans le milieu de la pègre de Gotham, le fils psychotique du Commissaire Gordon fait sa réapparition. Si ce dernier aimerait pouvoir faire à nouveau confiance à son fils, la personnalité trouble du jeune homme ravive cependant chez Gordon de douloureux souvenirs.

Avis :

S’il est un des héros les plus emblématiques de l’univers DC, c’est bien Batman. Au fil des époques, la mythologie entourant l’homme chauve-souris s’est renouvelée sous la plume ou le crayon de nombreux dessinateurs et scénaristes. Outre le charisme évident du personnage (et de ses antagonistes), on retient une approche très psychanalytique qui met en abîme l’âme humaine. Certains auteurs sont mieux parvenus que d’autres à s’approprier l’œuvre de Bob Kane, notamment Grant Morrison, Frank Miller ou encore Scott Snyder. Avec Sombre reflet, ce dernier offre une première incursion parfaitement dans le ton de ses illustres prédécesseurs. Autrement dit, remarquable.

Afin de bien resituer les événements dans la chronologie DC, une frise temporelle résume ce qui a pu advenir des différents intervenants dans d’autres ouvrages. Crisis on Infinity Earths, No man’s land ou Final CrisisSombre reflet s’inscrit entre Blackest Night, qui marque le retour de Bruce Wayne, et Flashpoint. Pour autant, on retrouve sous la cape Dick Grayson, le premier Robin. Son mentor lui laissant la place provisoire pour s’atteler à un projet de grande envergure : Batman Incorporated. Toujours est-il que cette transition de héros offre une relecture différente du chevalier noir, ne serait-ce que par une psyché moins tourmentée, un rien manichéenne de par le caractère de Dick.

Ce n’est pas pour cela qu’il ne campe pas bien le rôle, bien au contraire. Le personnage est respecté, ainsi que sa manière de porter le masque. Toutes les compétences physiques et technologiques de Batman répondent présentes à l’appel. Néanmoins, chaque intervenant semble faire peu de cas de son identité connue du plus grand nombre. Si cela coïncide avec des événements antérieurs, le costume agit comme un symbole et n’est en rien une protection pour sa vie privée et ses proches (qui collaborent auprès de lui, d’ailleurs). Du propre aveu de Dick, il n’est qu’un « Batman d’astreinte », mais s’accapare le rôle non sans témérité. L’incursion dans la vente aux enchères clandestine reste l’exemple le plus parlant.

La qualité de l’intrigue est proprement stupéfiante. Dans un premier temps, on a l’impression que le découpage en chapitres va proposer des enquêtes indépendantes. Or, ce constat se révèle à moitié vrai avec un fil rouge qui demeure discret et exprime toute sa subtilité en fin de parcours. Pour le reste, le scénario fait preuve d’une incroyable maturité tant dans l’exploration de Gotham City (ruelles, toits, bâtiments délabrés…) que dans la finesse d’écriture qui se pare d’une complexité mesurée. Peu d’histoires sont capables d’une telle force, a fortiori quand celle-ci joue davantage sur les images plutôt que sur les dialogues ; eux aussi circonspects et pertinents dans leur évolution générale.

En ce sens, le choix des couleurs offre différents degrés de contrastes pour dépeindre un souvenir, une saison ou un environnement (le laboratoire de Dick avec ses teintes froides et sa prédominance de nuances bleutées). Mais ce sont également les codes du comics qui sont éclatés avec une structure de planches inventive et audacieuse : doubles pages, architecture de certaines vignettes pour fluidifier l’action et présenter un point de vue singulier aux faits… La fragmentation d’un individu sur plusieurs cases en y incorporant des intermèdes demeure une excellente idée pour suppléer aux dessins pleine-page, voire même d’effectuer une segmentation allégorique de leur psyché. Certains dessins confèrent à des tableaux oppressants, parfaitement représentatifs de Gotham et de l’ambiance délétère qui l’habite.

Au final, le premier travail de Scott Snyder dans l’univers de Batman se solde par une pièce unique, aussi référentielle qu’originale au regard de ce qui a pu être fait auparavant. On notera la manière de personnaliser Gotham sous forme d’entité phagocyte lors de certains passages ou dialogues. Il s’agit bien sûr d’une métaphore, mais il en ressort un traitement cathartique d’une grande justesse, surtout dans le cas du fils de James Gordon. Une histoire maîtrisée, une genèse respectée avec des figures connues plus ou moins récurrentes… Sombre reflet s’impose comme un ouvrage indispensable pour les inconditionnels du chevalier noir. Une fresque ténébreuse ô combien aboutie et fascinante.

Note : 19/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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