avril 19, 2024

Le Fantôme Vivant

Titre Original : The Ghoul

De : T. Hayes Hunter

Avec Boris Karloff, Cedric Hardwick, Ernest Thesiger, Dorothy Hyson

Année: 1933

Pays: Angleterre

Genre: Horreur

Résumé:

Morlant, égyptologue, avant de mourir, demande à être enterré avec un bijou égyptien, qui selon lui, a la capacité de le rendre immortel. Mais il est mis en terre sans le joyau, volé par son domestique. Le professeur Morlant revient d’entre les morts pour se venger de lui.

Avis :

Durant les années 30, le cinéma horrifique est géré par un seul pays, les Etats-Unis. Faisant main basse sur quasiment toutes les adaptations littéraires disponibles, Universal a fait les beaux jours de l’horreur cinématographique avec Dracula, Frankenstein ou encore L’Homme Invisible. Cependant, il faut croire que cela a fait des émules et que les britanniques ne comptaient pas se faire marcher dessus, ou tout du moins laisser passer cette manne inespérée pour gagner de l’argent sur un marché en pleine expansion. S’octroyant le talent et la gueule si caractéristique de Boris Karloff, l’Angleterre livre son tout premier film d’horreur en 1933, en réponse à Universal. Ainsi est donc né Le Fantôme Vivant (The Ghoul en VO), un film d’épouvante qui s’invite dans le domaine de l’égyptologie et qui sera étiqueté premier film d’horreur britannique.

Mais ce n’est tout, car certaines légendes s’attachent à ce film assez particulier mais qui emprunte beaucoup de codes aux films américains. En effet, considérée comme définitivement perdue, la copie du film fut retrouvée dans un sale état en République tchèque avec en plus des sous-textes incrustés. Fort heureusement, une copie en meilleure état fut retrouvée dans les années 2000 et le public pu profiter pleinement de cette œuvre séminale qui tourne autour du zombie et du thriller à twist.

L’histoire gravite autour du personnage du professeur Morlant qui souhaite se faire enterrer d’une certaine manière avec une pierre au creux de la main. Croyant à la vie après la mort suite à un don fait à Anubis, le professeur se fait enterrer dans sa crypte personnelle. Malheureusement pour lui, le bijou est volé par son majordome qui souhaite l’envoyer à son héritière, une cousine vivant à Londres. Il va alors s’ensuivre des disputes et des débats pour récupérer le joyau. Avec ce pitch simpliste, on pourrait croire que le film se contente d’une histoire basique sur fond de querelles familiales, mais il n’en est rien. En effet, le film va brasser trois genres bien distincts dans trois parties que l’on pourra aisément découper.

En premier lieu, le film pose et soigne son ambiance. Berçant en plein dans la croyance et la religion, on retrouve un homme étrange, le visage émacié, qui souhaite se faire enterrer comme dans l’Egypte ancienne. Un cas isolé qui va créer des tensions au sein du film avec un pasteur qui voit en cet homme un païen qui ne trouvera jamais le repos (ce qui est en partie vrai). Ainsi donc, toute la première partie sera dédiée à l’explication de la Lumière Eternelle, ce qu’elle fait, mais aussi aux mythes et légendes qui ne sont plus acceptés par l’Eglise et la religion monothéiste. Faut-il y voir un pamphlet contre le christianisme et la religion au sens large du terme ? Non, mais en faisant ainsi, T. Haynes Hunter peaufine une ambiance délétère et angoissante, profitant aussi du noir et blanc pour accentuer certaines séquences avec notamment une statue égyptienne lugubre.

Par la suite, le film va partir directement vers le film d’épouvante. Le professeur se réveille bel et bien et va attaquer tel un zombie les différents protagonistes de l’histoire, qui sont assez nombreux. On trouvera donc un arabe qui semble très intéressé par la pierre, ainsi que les deux héritiers, l’avocat du mourant ou encore une amie de la cousine. Tout ce beau monde va se retrouver en danger mais ne semble pas soucieux du problème. Le film va jouer sur les ombres, sur les gros plans des visages effrayés et surtout sur les déambulations du professeur, incarné par un Boris Karloff habité. Sorte de zombie animé par un but, celui de retrouver la pierre, l’acteur joue juste et se révèle effrayant à plus d’un titre. Cependant, on sent bien que quelque chose ne tourne pas rond. En effet, les attaques ne sont pas systématiques, les morts ne seront pas nombreuses et on verra par la suite que l’homme en question cache un petit secret. Secret qui prendra son sens lors d’une scène étrangement gore pour l’époque et relativement bien faite encore aujourd’hui, mais aussi lors des révélations finales.

Le film prendra alors des allures de film policier et chasse au trésor. Les identités se révèlent, les langues se délient et on comprend la finalité du projet. Lorgnant vers le thriller et whodunit sur son final, Le Fantôme Vivant va réussir ce qu’il entreprend, à savoir brouiller les pistes et montrer que finalement, le plus monstrueux n’est pas le zombie, mais bel et bien ceux qui gravitent autour par intérêt et égoïsme. C’est en ce sens que l’on peut dire que ce film est une œuvre séminale du film de zombie, car il en possède toutes les bases, notamment dans sa critique de l’être humain et son aspect tendancieux. Le final ne sera qu’un juste retour des choses et le film va se terminer sur un dernier plan grandiloquent, montrant un budget conséquent pour l’époque. D’ailleurs, je disais plus haut que le film emprunte beaucoup au cinéma américain et on retrouve une certaine grandiloquence dans la réalisation, ainsi qu’une volonté de travailler sur les ombres portées ou sur une ambiance gothique qui correspond parfaitement aux codes des films de chez Universal.

Au final, Le Fantôme Vivant est une agréable surprise et il pose clairement des bases qui sont encore utilisées aujourd’hui. Œuvre séminale sur le zombie et sur la critique d’une société vénale, T. Haynes Hunter livre un métrage fort intéressant et intelligent qui fait partie de ces immanquables pour tout fan du film d’horreur. Bref, une œuvre dont il serait dommage de passer à côté tant elle recèle de moments intéressants et la restauration en bluray de chez Elephant Films est belle.

Note : 16/20

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Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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