mars 19, 2024

Le Paris des Merveilles T.02 – L’Elixir d’Oubli – Pierre Pevel

1507-1

Auteur : Pierre Pevel

Editeur : Bragelonne

Genre : Steampunk

Résumé :

En 1909, enquêtant sur le meurtre d’un antiquaire apparemment sans histoire, le mage Louis Denizart Hippolyte Griffont découvre que ce dernier pourrait bien avoir été la victime d’un ambitieux sorcier, Giacomo Nero. Ses investigations le ramènent à l’époque de la Régence jeune mage et gentilhomme libertin, il s’apprêtait alors à combattre une puissante société secrète, l’Éridan, en compagnie d’une nouvelle venue appelée à devenir son amie de cœur et complice, la déjà très mystérieuse et fantasque baronne Isabel de Saint-Gil. Les intrigues de l’Éridan et les menées de Nero seraient-elles liées, malgré le temps passé ? Griffont et Isabel, en s’opposant aux plans du sorcier en 1909, parachèveront une affaire qu’ils croyaient résolue depuis un siècle. Mais ce faisant, ils pourraient bien lever le voile sur un secret d’État susceptible de déclencher une nouvelle guerre, sur Terre comme dans l’Outre-Monde…

Avis :

Avec Le Paris des merveilles, Pierre Pevel posait les bases d’un univers baroque. Le farfelu s’invitait de manière insidieuse au sein d’enquêtes on ne peut plus sérieuses. Des intrigues et péripéties étonnantes dans un Paris au début du XXe siècle aux antipodes des traces historiques qu’il a pu laisser. Le résultat ? Un livre hybride coincé entre la fantasy et le steampunk doté d’excellentes qualités (tant sur le fond que sur la forme) qui exigeait forcément une suite pour continuer l’exploration d’une époque et d’un monde à part entière. Cette nouvelle plongée dans un imaginaire aussi fertile que singulier parvient-elle à emporter le lecteur dans son tourbillon d’événements ?

C’est donc tout naturellement que L’élixir d’oubli succède aux Enchantements d’Ambremer. Après un petit rappel du contexte et des règles qui régissent l’OutreMonde, on retrouve un panel de têtes familières. Griffont, la baronne de Saint-Agil, le chat ailé Azincourt… La recette semble inchangée et, dans un sens, c’est le cas. Le traitement alloué aux protagonistes est identique. D’ailleurs, on parvient sans mal à les situer les uns par rapport aux autres. Sur ce point, il n’est guère utile de présentation, quitte à léser les nouveaux venus. Pour autant, l’intrigue en elle-même n’exige pas d’avoir parcouru le précédent tome pour s’y atteler.

Bien sûr, il est toujours préférable de le faire pour ne laisser passer aucun détail ou élément susceptible d’atténuer le plaisir de lecture. Toujours est-il que l’histoire tend à jouer sur plusieurs tableaux et se montrera rarement linéaire. En ce sens, la présence de deux périodes temporelles distinctes confirme cette impression. Si le Paris à l’aube du XXe siècle est prépondérant, on retrouve également la capitale française (et certains de nos personnages) au début du XVIIIe siècle. La transposition survient inopinément, mais a le mérite d’offrir un éclairage nouveau sur certains événements et de comprendre davantage les origines du rapprochement de notre monde avec celui de l’OutreMonde.

Pour le reste, l’auteur n’a pas son pareil pour entremêler des éléments purement fantaisistes (magie, sortilèges, créatures légendaires…) au cœur d’investigations qui ne sont pas sans rappeler certains polars d’époque. D’ailleurs, tout concourt à forcer le réalisme (un terme qui semble pourtant hors de propos dans un tel cas de figure) pour rendre le récit plus plausible qu’il ne laisse paraître. Ainsi, on a droit à quelques rebondissements bien ficelés jouant en parallèle d’histoires secondaires pour dynamiser la progression. Malgré quelques atermoiements prompts à développer l’atmosphère, la structure même du roman offre une multitude de faits qui, à certains égards, peuvent perdre les lecteurs les moins attentifs.

Mais que serait le Paris des merveilles sans la dose d’humour qui le caractérise tant ? À travers des répartis bien senties, des personnages hauts en couleur qui n’hésitent pas user de la dérision et du sarcasme, on retrouve encore cette dualité endémique à l’univers de l’auteur. Un ton léger et une bonhomie flagrante s’opposent à des affaires on ne peut plus graves qui menacent la stabilité des royaumes. Tout réside dans l’équilibre et les proportions de ces deux aspects qui, au final, s’avèrent complémentaires et non incohérents. Il en ressort un ensemble homogène qui emporte l’adhésion des premières pages jusqu’au dénouement.

Ce deuxième tome du Paris des merveilles est donc tout aussi bon et savoureux que son aîné. On y retrouve tout ce qui caractérise l’œuvre de Pierre Pevel. À savoir, de l’humour, des personnages attachants, des situations rocambolesques et surtout un univers où l’originalité est le maître mot. L’histoire est un condensé remarquable de ce que peut offrir le steampunk quand il rencontre la fantasy. Une approche audacieuse, risquée, mais dont la tenue narrative et l’atmosphère décomplexée emportent le lecteur sous d’autres latitudes sans pour autant quitter la France. L’élixir d’oubli se pare d’un ton décalé pour révéler une uchronie fascinante faite de fantaisies, d’intrigues bien ficelées et de joutes orales. Un petit bijou dans son genre.

Note : 16/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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