avril 25, 2024

La Ligne Rouge

Ligne rouge

Titre Original: The Thin Red Line

De : Terrence Malick

Avec : Goerge Clooney, Sean Penn, Adrien Brody, Jim Caviezel

Année : 1998

Pays : Etats-Unis

Genre : Drame/Guerre

Scénario : Terrence Malick (adapté du roman The Thin Red Line de James Jones publié en 1962)

Résumé :

La bataille de Guadalcanal fut une étape clé de la guerre du Pacifique. Marquée par des affrontements d’une violence sans précédent, elle opposa durant de longs mois Japonais et Américains au cœur d’un site paradisiaque, habité par de paisibles tribus mélanésiennes. Des voix s’entrecroisent pour tenter de dire l’horreur de la guerre, les confidences, les plaintes et les prières se mêlent.

Avis :

Il fallait en avoir une bonne paire pour sortir ce film en 1998, car sortir un film qui parle de la seconde guerre mondiale la même année que le mastodonte de Steven Spielberg, Il Faut Sauver le Soldat Ryan, était un pari à la hauteur ! Surtout quand ça faisait 20 ans qu’on l’attendait le nouveau Malick. Résultat, avec une différence de budget assez conséquent en faveur du Soldat Ryan, ce dernier rapporte cinq fois plus que la Ligne Rouge au box-office mondial… Comme quoi les chiffres ne veulent souvent rien dire sur la qualité d’un film! Car si le Soldat Ryan est un film de guerre absolument phénoménal (même si l’intro dantesque rend la suite moins puissante), la Ligne Rouge est un film d’un tout autre niveau… d’ailleurs dès le premier plan on comprend que ce n’est pas vraiment un film de guerre, ni un film sur la guerre. C’est l’évolution du regard que porte le philosophe Terrence Malick sur le monde 20 ans après les Moissons du Ciel, c’est une œuvre qui a de quoi déstabiliser par son côté métaphorique et donc forcément élitiste, et qui mériterait des heures d’analyse tant il est complexe.

Ligne Rouge 1

En fait peu importe la bataille de Guadalcanal qui sert de background, peu importe la guerre en elle-même ou ses enjeux géopolitiques, l’idée de parler de la guerre en adaptant le livre de James Jones est simplement là pour mettre les hommes dans une situation extrême où le moindre de leurs actes sera exacerbé, de les mettre dans une situation dont les tenants et aboutissants les dépassent, et leur permettre de réfléchir à leur nature… On ne sera pas surpris de retrouver une des signatures narratives de Malick, la voix off, on a droit aux questionnements intérieurs d’une multitude de personnages, des réflexions qui partent un peu dans tous les sens, ouvrant des voies d’exploration presque infinies. La Ligne Rouge n’est pas seulement très ambitieux dans sa reconstitution d’un conflit mais également dans sa portée métaphysique…

Dès lors, une fois assimilée l’idée qu’on va assister à une autopsie des notions impalpables de bien et de mal, et de l’impuissance de l’homme devant l’immensité de la nature qui l’entoure, on ne sera rebuté ni par la durée du film (pas loin de 3h) ni par le ton contemplatif, et encore moins par les innombrables insertions sur la faune et la flore qui entourent les soldats… Encore une fois tout cela s’inscrit dans une logique imparable d’illustrations par allégories (le concept est passionnant, une fois qu’on l’a saisi). Par exemple, les plans sur un oisillon mourant lors d’une scène d’attaque ou un autre sur une feuille d’arbre pleine de trous, comme pour symboliser les hommes morts sous les balles… Malick nous montre les hommes comme des pions incontrôlables d’une nature qui les a abandonnés à leurs querelles destructrices, les poser dans un lieu aussi idyllique que cette île vient créer un contraste saisissant.

Il nous montre une nature certes belle, pure, mais qui ne représente pourtant pas le bien absolu, tout comme les hommes ne sont pas l’incarnation d’un mal absolu. La nature reste cruelle avec les hommes et avec elle-même, Nick Nolte prend d’ailleurs cela en exemple pour “justifier” les actions militaires. Le foisonnement de personnages, de végétaux et d’animaux vient souligner que le tout (la nature) n’est basé que sur des individualités. Avec le village d’indigènes Malick nous renvoie à la notion de paradis perdu, la séquence d’ouverture est paradisiaque avec ce peuple pacifique vu à travers les yeux de Jim Caviezel, vision qui change considérablement à son retour… non ce n’est pas le progrès qui a rendu l’homme mauvais et enclin aux pires choses, à l’origine l’homme est naturellement cruel.

Chaque personnage se pose des questions sur pourquoi cette guerre, pourquoi le bien, pourquoi le mal, pourquoi donner tel ordre, pourquoi refuser celui-ci… On a droit à un nombre de visions du monde assez considérable, du rêveur au pessimiste, du simple d’esprit au philosophe, de l’idéaliste au lucide… Chacun apporte sa pierre à un édifice complexe et même celui qui semble le plus proche de la nature (Caviezel) voit ses pensées se perdre devant une incompréhension totale des maux du monde qui l’entoure. Mais on se rend compte sur la fin qu’il avait compris quelque chose de très important: qu’importent nos actions, aussi viles soient-elles, au moment de notre mort, l’individu disparaît et le corps retourne à la nature. Il symbolise ce discours par le visage d’un japonais mort partiellement recouvert de terre… Le réalisateur s’arrête d’ailleurs souvent sur les derniers regards de ses soldats.

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La mort, la nature, l’amour, la religion, l’infini… Malick jongle avec des notions difficiles mais sans jamais nous donner de leçon. La Ligne Rouge n’est pas un film écolo, rien à voir. Il nous montre une humanité futile, qui se croit faire de grandes choses mais détruit tout sur son passage pour pas grand chose… pour un bout de terre ou d’océan… Autour des hommes de bien plus belles et grandes choses se passent!

En conclusion, malgré ces 7 nominations aux Oscars, aucun n’a été reçu, sauf l’Ours d’Or au Festival de Berlin en 1999. La mise en scène de Malick reste parfaite. Si on est toujours dans un style très contemplatif, la caméra est plus dynamique avec beaucoup de mouvements. La photographie est toujours exceptionnelle, la musique d’Hans Zimmer est une de ses plus belles ! C’est un film gigantesque qu’on peut revoir des dizaines de fois sans réussir à en percer tous les mystères, un film qui nous emmène dans de longues et profondes réflexions mais qui nous montre bien, avec un plan final aussi simple que magnifique, que même si les hommes jouent à la guerre, le monde ne s’arrête pas de tourner et la nature poursuit son œuvre de création.

Note : 19/20

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Par Mickey

cobra-original-1-290x290Note de Casey Slyback: 18/20 Un grand film de guerre métaphysique et le meilleur Malick sorti à ce jour.

ServalNote de Serval: 17/20

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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