mars 19, 2024

Délivrance – Jussi Adler-Olsen

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Auteur: Jussi Adler-Olsen

Editeur: Albin Michel

Genre: Thriller

Résumé:

La chasse haletante et presque désespérée lancée par le cynique inspecteur Carl Mørck et son fidèle assistant Assad derrière un tueur que rien ne semble pouvoir arrêter ne le dispense pas de jeter au passage un regard acerbe et troublant sur la société danoise.
Au fin fond de l’Ecosse, une bouteille ancienne en verre poli est longtemps restée sur le rebord d’une fenêtre. Personne ne l’avait remarquée, pas plus que le message qu’elle contenait. Un message qui commence par le mot Hjœlp, « au secours », en danois, écrits en lettres de sang…
Envoyée par la police anglaise à Copenhague, la mystérieuse missive atterrit entre les mains de Mørck et de son équipe. Son déchiffrage révèle qu’elle provient de deux garçons qui auraient été kidnappés dix ans plus tôt. Chose étrange : leur disparition n’a jamais été signalée…

Avis:

Après un second opus clairement décevant où Jussi Adler-Olsen privilégiait l’humour bas de gamme à l’ambiance glaciale d’un bon polar nordique, le troisième tome des enquêtes du département V est un roman charnière. En effet, celui-ci confirmera le ton emprunté par son prédécesseur ou permettra de revenir vers une approche moins délurée pour s’orienter vers un traitement qui se concentre davantage sur l’intrigue et non sur les niaiseries des personnages. Délivrance est-il un titre révélateur qui promet une histoire digne de l’illustre réputation des auteurs scandinaves ?

Disparitions, enlèvements, chantages… Tous les ingrédients semblent réunis pour rouvrir une affaire classée depuis plusieurs années. En cela, Jussi Adler-Olsen attise sans difficulté notre curiosité en exposant des événements distincts sans lien apparent. La manière de tisser les fils du passé avec ceux du présent demeure assez habile et travaillée. Ajoutons à cela quelques tournures bien senties dans la présentation des faits et l’on obtient un début des plus prometteurs qui pourrait enfin nous permettre d’apprécier l’univers de l’auteur.

Seulement, l’intrigue va bien vite sombrer dans le conventionnel avec un sens du rythme confus où l’on alterne entre le quotidien des personnages secondaires et leurs soucis conjugaux à la routine journalière du département V. Le problème ? On retombe rapidement dans les travers de Profanation. À savoir, préférer s’appesantir sur des rivalités de pacotilles et des joutes infantiles et reléguer son boulot au rang de tâche rébarbative. Si c’est peut-être le cas, Carl Mørck ne loupe pas une occasion de s’apitoyer sur son sort pour mieux se tourner les pouces dans son bureau.

De fait, Délivrance ressemble à une sitcom lobotomisante chez les flics du coin où seuls les rires en voix off manquent. On nous inflige un humour lourd et discutable où les considérations racistes et discriminatoires sont plus qu’évidentes. S’il persistait un doute dans le précédent opus, cette récurrence de blagues et d’expressions à l’emporte-pièce le fait s’envoler. Pour preuve, quelques exemples flagrants : « conducteur de chameaux » « métèque » « le bar était rempli de gens convenables mis à part le pd qui se trouvait à côté de moi ».

Difficile de ne pas en déduire l’évidence face à ce déluge d’insultes. D’ailleurs, le traitement alloué à Assad, la tête de Turc de service, demeure dans cette veine. Benêt qui comprend la moitié des mots et prend aux pieds de la lettre des expressions toutes trouvées, il est l’archétype véhiculé par les milieux xénophobes. À cela, on doit également supporter la secrétaire hystérique et de nouveaux intervenants qui contrastent clairement dans la dramaturgie (ils paraissent plus sérieux) avec cette équipe de bras cassés.

Et l’enquête dans ce fatras informe ? On l’oublie bien vite avec une progression alambiquée au possible et une narration lourde malgré un style assez fluide. Oui, c’est incohérent, mais ce n’est pas la seule absurdité qui est présente. Pas vraiment réalistes et décevantes au vu de ce qui était annoncé, les investigations s’insèrent avec gaucherie au fil des pérégrinations du département V au lieu de se retrouver au cœur même de l’intrigue. L’intérêt principal de tout bon polar se voit donc reléguer à un artifice bâclé dont l’auteur fait peu de cas.

En totale contradiction avec sa couverture et la communication éditoriale, Délivrance se révèle davantage une comédie policière maladroite et pénible à plus d’un titre. Malgré une entame attrayante, Jussi Adler-Olsen préfère confirmer son approche négligée et grossière du polar avec un sens de l’humour qu’on aime ou qu’on déteste. Les lecteurs qui ont apprécié Profanation seront ravis de retrouver une recette inchangée (l’originalité répond aux abonnés absents). Ceux dont les facéties pseudo-comiques du département V agacent peuvent passer leur chemin sans remords. Avec ses remarques racistes et une enquête transparente, Délivrance semble être le roman de l’immaturité pour son géniteur.

Note : 06/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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