mars 19, 2024

Duma Key – Stephen King

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Auteur : Stephen King

Editeur : Albin Michel

Genre : Drame

Résumé :

Une île de Floride à la troublante beauté, hantée par des forces mystérieuses. Elles ont pu faire d’Edgar Freemantle un artiste célèbre, mais s’il ne les anéantit pas très vite, ce sont elles qui auront sa peau !

Avis :

Les qualificatifs autour de Stephen King sont presque aussi nombreux que son impressionnante bibliographie : « maître du suspense » « maître de l’horreur » « phénomène littéraire » « écrivain prodige ». S’il est vrai qu’on ne peut lui renier son incroyable talent de conteur et d’écrivain, on en oublierait presque qu’il est capable d’une puissante force émotionnelle quand il s’attarde sur des récits à la dramaturgie plus poussée. On se souvient de son chef d’œuvre intemporelle Dolorès Claiborne ou plus récemment Histoire de Lisey. Sorti juste après ce dernier, Duma Key tend à emprunter le même chemin.

Lauréat du prix Bram Stoker en 2008, ce roman relègue néanmoins l’aspect fantastique au second plan. L’intrigue démarre en douceur sur un accident de la vie et suit le parcours erratique du narrateur jusqu’à son exil sur Duma Key, un chapelet d’îles fictif situé au large de la Floride. Dès lors, on assiste à une longue (parfois un peu trop, il est vrai) rééducation tant dans l’acceptation du handicap (l’amputation d’un bras) et l’adaptation à un environnement aussi désert qu’étrange. Le rythme est lent et, sans la force de l’auteur à maintenir l’attention du lecteur, le récit aurait tendance à perdre les moins assidus d’entre eux.

De fait, le suspense ou l’angoisse ne sont pas de rigueurs dans le cas présent puisque l’histoire se tourne davantage vers le drame. On ressent une volonté à exorciser les épreuves qui l’ont touché à la suite de son accident en 1999. Souffrances physiques et psychologiques s’entremêlent et s’unissent pour mieux déstabiliser le personnage principal. Ce n’est pas pour autant qu’il faille en oublier de nombreuses références et autres clins d’œil propres à son imaginaire. Ainsi, l’on retrouve la possibilité de prédire l’avenir ou d’influer sur celle-ci. Stephen King l’avait déjà explorée d’une manière légèrement différente dans Dead zone.

À cela s’ajoutent de profondes réflexions sur l’art et sa signification au sens large du terme. Traitement philosophique où la contemplation prévaut sur l’avancement, l’intrigue révèle une certaine poésie lorsqu’il s’agit d’exposer les œuvres d’Edgar Freemantle. Outre l’attraction et le pouvoir qui découlent de ces peintures, l’ombre du portrait de Dorian Gray plane, comme si chaque parcelle de ses tableaux est vivante ; à tout le moins, possède une influence sur la réalité et, par extension, sur son créateur. Constat appuyé par la présence d’entités évanescentes qui gagneront en importance dans la dernière partie du livre.

Comme à son habitude, Stephen King dépeint des individus avec une rare précision. Autant leur personnalité que leur évolution se montrent subtiles et ambivalentes à plus d’un titre. Il n’est pas question de classifier les intervenants avec des étiquettes prédéterminées, mais de les confronter à des situations plus ou moins inattendues pour exposer leurs qualités et leurs défauts. Ainsi, la peur, la confusion ou la lâcheté peuvent se prêter à n’importe qui en n’importe quelles circonstances. Il en découle des protagonistes soignées et crédibles qui font se succéder des sentiments contradictoires (parfois sympathiques ou méprisables) chez le lecteur.

Au final, Duma Key se montre plutôt statique dans la progression de son intrigue. On déplore quelques longueurs à certains moments, mais il s’agit avant tout d’un drame sur les caprices de l’existence et l’obligation de s’y conformer pour poursuivre son chemin ou en emprunter un autre. Le fantastique est, quant à lui, bien de la partie, mais opère comme une finalité et non un moyen au cœur de l’histoire. Il en ressort tout de même une atmosphère étrange et singulière où les hallucinations et la réalité sont complices pour mieux déstabiliser les lecteurs. Si la patience est de rigueur pour apprécier pleinement cet ouvrage, elle est récompensée jusqu’à une conclusion sans fioriture.

Note : 15/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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