mars 19, 2024

Que ta Volonté Soit Faite – Maxime Chattam

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Auteur : Maxime Chattam

Editeur : Albin Michel

Genre : Thriller

Résumé :

« Les enfants de toute l’Amérique avaient le Croquemitaine pour se raconter des histoires qui font peur, à Carson Mills, ils avaient Jon Petersen. »

Pour son vingtième roman, Maxime Chattam dresse le portrait d’une petite ville du Midwest américain des années 60 jusqu’au début des années 80, avec pour fil rouge l’évolution de Jon Petersen, pervers psychopathe, de son enfance jusqu’au point culminant de sa sinistre carrière criminelle.

Avis :

Écrire un bon livre n’est pas aisé, en écrire plusieurs l’est encore moins. Pourtant, Maxime Chattam est parvenu en un peu plus d’une décennie à offrir à ses lecteurs des histoires à la fois originales, variées et immersives au possible. Qu’il s’agisse du thriller ou de la fantasy, l’auteur fait montre d’une maîtrise rare dans tous les genres qu’il touche. Là où certains se cantonnent à un domaine particulier en ressassant des récits aux ficelles éculées, il provoque toujours l’événement à chaque nouvelle parution. Avec Que ta volonté soit faite, on s’éloigne quelque peu de ce qu’il a pu faire auparavant, car le livre qui nous occupe aujourd’hui fait un peu office de hors-série dans sa bibliographie.

En effet, il ne faut pas le considérer comme un thriller au sens classique du terme, et ce, malgré la présence d’une profonde réflexion sur la nature humaine ; en particulier sa propension à succomber à ses pulsions, au Mal. Thème récurrent de l’auteur, il parvient néanmoins à toucher le lecteur via des histoires intrigantes et novatrices. Sans avoir la prétention de connaître sa démarche, c’est un peu comme s’il possédait un kaléidoscope recélant une infinité de fragments épars des sujets abordés et qu’il les réunissait dans son imaginaire pour donner vie à ses livres. Il en ressort une constance qualitative, mais également une continuité entre chaque ouvrage.

L’appellation de roman noir n’est pas usurpée. L’on retrouve une ambiance pesante teintée d’animosités, de violences et, paradoxalement à l’importance de la religion au sein de Carson Mills, d’un nihilisme persistant au fil des pages. Certes, il y a bien quelques enquêtes, des crimes atroces (même si la fin est synonyme de soulagement au vu des exactions commises), mais ce n’est pas le point central. Le rythme se révèle mesuré, parfois contemplatif d’une Amérique aussi fascinante que contradictoire. L’on s’aperçoit que les petites communautés peuvent se montrer soudées. Une solidarité qui cache des failles que l’auteur s’empresse d’explorer.

Outre des références littéraires flagrantes, hommage à des écrivains incontournables tels que Stephen King ou Cormac McCarthy, le style de Maxime Chattam ne cesse d’évoluer. Entre les tournures recherchées, une vision nette et précise comme le tranchant d’une lame, les images s’imposent d’elles-mêmes sans qu’il ait besoin d’en rajouter. Là encore, on notera quelques changements notables avec des chapitres denses et l’emploi sporadique de la première personne du singulier qui, pour reprendre l’avertissement dans l’avant-propos, laissent à penser que l’on tient un vieux manuscrit trouvé par hasard dans un grenier. Une sorte de livre maudit qui dissimule un secret inavouable.

Malgré un format assez court, les protagonistes disposent d’un traitement des plus soignés. Le nombre d’intervenants est assez conséquent (principaux et secondaires), mais chacun possède un caractère propre. En l’espace de quelques lignes, les traits se dessinent avec une facilité déconcertante. On a droit à différents niveaux de perception, de conscience, où chacun évolue selon son passé, sa nature ou ses rencontres. Cette succession de détails marquants (physiques et psychologiques) se révèle crédible et cohérente. Un liant nécessaire à toute bonne intrigue.

Au final, Que ta volonté soit faite s’avère un roman des plus déstabilisants. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il ne s’agit pas d’un thriller, le rythme et l’approche étant nettement dissemblables. L’on sombre progressivement dans une violence qui monte crescendo sans s’en rendre compte. Une descente vertigineuse dans les gouffres de l’ignominie qui ne s’adresse pas forcément aux âmes sensibles au vu des thématiques abordées (viols, maltraitances, pédophilie…). Différent des précédents romans de l’auteur, il n’en demeure pas moins un récit fort et non moins maîtrisé qui impose une gamme de protagonistes aussi travaillée que son atmosphère.

Note : 17/20

Par Dante

 

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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