avril 18, 2024

En Eaux Troubles

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Titre Original : De Usynlige

De : Erik Poppe

Avec Pal Sverre Valheim Hagen, Trine Dyrholm, Ellen Dorrit Petersen, Fredrik Grondahl

Année : 2009

Pays : Allemagne, Norvège, Suède

Genre : Drame

Résumé :

Libéré après une longue peine d’emprisonnement pour un crime qu’il nie avoir commis, Jan Thomas est prêt à démarrer une nouvelle vie. Organiste virtuose, il joue dans une église d’Oslo qui lui offre une seconde chance. Grâce à son don pour la musique et sa gentillesse, il gagne rapidement le respect de ses supérieurs et le cœur de la pasteure Anna à qui il ne dévoile rien de son histoire. Mais son passé le rattrape lorsqu’Agnès, venue visiter l’église avec ses élèves, reconnaît en lui le jeune homme qui fut, des années plus tôt, accusé du meurtre de son fils.

Avis :

Ce soir-là, j’avais envie d’un drame poignant, j’avais envie de voir un film qui soit loin des clichés habituels, j’avais envie de cinéma européen, et de nouvelles découvertes, alors je me suis lancé dans ces « Eaux troubles » avec l’espoir d’en ressortir bouleversé et ému. Et c’est bien ce que j’ai eu devant ce petit film norvégien qui tient là une très belle histoire sur le pardon.

Jan Thomas vient tout juste d’être libéré de prison après avoir « commis » un meurtre quand il était adolescent. Un meurtre dont il a toujours revendiqué que ce n’était qu’un accident. Aujourd’hui adulte, il essaie de reprendre une vie normale. Il vient d’être engagé comme organiste dans une église. La vie semble reprendre son cours et le passé parait loin derrière lui. Mais voilà, le pardon est loin d’être simple et ce n’est pas par hasard que la maman d’Isak, la jeune victime de Jan, le croise. Pour cette femme qui essaie encore de reconstruire sa vie, dix-sept ans plus tard, commence une fascination malsaine envers le bourreau de son fils. Entre pardon et rédemption, chacun d’eux va alors devoir aller de l’avant et faire avec pour pouvoir vraiment passer à autre chose.

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Repéré il y a quelques mois déjà grâce à son acteur principal que j’avais découvert dans le film Kon Tiki, « En eaux troubles » n’avait pas encore trouvé le chemin de mon lecteur DVD jusqu’à ce soir-là. Bien sagement, il attendait son heure et maintenant que je l’ai vu, je regrette simplement de ne pas l’avoir regardé plus tôt. Erik Poppe réalise un film à fleur de peau sur deux destins brisés que la vie a malheureusement fait se croiser. Dans ce film, qui rappelle spontanément « Boy A » de John Crowley, on y parle du pardon. C’est vrai que l’intrigue n’a rien de vraiment extraordinaire, on a déjà vu pas mal de films qui aborde ce sujet-là, mais comme pour « Boy A« , ce film va se différencier des autres.

Premièrement « En eaux troubles » est un film très intime, qui reste proche de ses personnages et de leurs émotions. Le film ne tombe pas dans la surenchère pour faire pleurer dans les chaumières, ce qui est le piège pour une belle pelletée de films abordant ce thème-là. Ici tout est plus simple et naturel. Erik Poppe filme le quotidien de ses deux personnages qui essaient de se révéler, enfin surtout pour le personnage de Jan, car en ce qui concerne la mère qui ne découvre pas par hasard que le meurtrier de son fils est de nouveau libre, c’est une sombre rechute dans le calvaire du deuil et l’incompréhension. Pendant que l’un retrouve goût à la vie, l’autre va le perdre tout en essayant de garde le cap et ne pas sombrer, et c’est cette ligne directrice qui m’a beaucoup touché dans le film. J’ai vraiment aimé comment le réalisateur essaie de faire pardonner son personnage. J’ai adoré le recul, la frustration, l’espoir que nourrissent les personnages sur leur avenir. C’était beau, simple, vrai, et très dur en même temps, car si dans la théorie, c’est facile, bien souvent dans la pratique, on ne pardonne pas, même quand on en a envie et cette dualité intérieure, chacun des deux comédiens nous la fait très bien passer.

Et deuxièmement, le film est fascinant dans sa forme. Pour nous raconter son histoire dans les moindres détails, Erik Poppe a choisi une narration en plusieurs étapes. D’abord du point de vue de Jan, où l’on va assister à sa libération et sa nouvelle chance, puis on ira du point de vu d’Agnès, la mère du garçon assassiné. On verra comment elle fait la découverte de la libération de Jan, comment elle va retomber dans le drame de son deuil et de sa perte. Puis enfin, le réalisateur nous donne ce que l’on voulait voir, le choc de la confrontation, l’éclatement de la vérité. Une rencontre intense, pleine de suspens, pleine de vérités, c’était beau et prenant. Et le choix de cette narration, qui ira même jusqu’aux flashbacks, apporte une tension et une dimension beaucoup plus forte et présente au film. Puis elle apporte de l’originalité à une histoire qu’on a déjà vue plusieurs fois. Un peu comme si on la redécouvrait d’ailleurs. Dans les deux sens de lecture d’ailleurs, puisque avec les deux points de vue que le réalisateur nous donne, les ressentis diffèrent et changent.

« En eaux trouble » marque le premier gros rôle pour le comédien Pål Sverre Valheim Hagen. Il n’aura fallu à ce comédien que deux films pour me convaincre de l’énorme potentiel qu’il détient. Dans « Kon Tiki« , il avait été une très belle révélation et j’avais envie de voir ce qu’il donnait dans un autre registre et dans ces « Eaux troubles« , il est une deuxième fois formidable. Très tendre, il est capable d’émouvoir avec des silences et des regards, sans un mot, et d’un coup toucher le public et nous faire sourire. On a beaucoup d’empathie pour lui, car le rôle est très beau, bien pensé, bien écrit et comme le comédien est formidable, on ne peut que tomber sous son charme. J’ai très très hâte de voir ce qu’il nous réserve pour la suite. C’est Trine Dyrholm qui a le dur rôle de jouer la mère du jeune garçon tué. Un rôle profond, bouleversant et la comédienne réussit à nous faire passer tous les tourments qui la hantent. Elle compose avec justesse une femme dont les sentiments sont à fleur de peau et qui ne sait plus comment faire pour retrouver la paix dont elle aspire, partagée entre l’incompréhension et le pardon. Un autre rôle féminin aura son importance dans l’histoire et sera très bien campé par Ellen Dorrit Petersen.

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« En eaux troubles » est donc un film simple dans sa trame et complexe en même temps dans son sujet. La rédemption, si elle peut être facile à envisager, surtout au cinéma, bien souvent en dehors des écrans, elle est bien plus difficile à mettre en pratique et ce film démontre parfaitement le bouleversement et le flou total qu’elle peut provoquer et c’est sans juger ses personnages et en dressant des portraits justes et intimes qu’Erik Poppe nous laisse faire notre propre conclusion et ça fait du bien.

Note : 17/20

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Par Cinéted

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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