avril 25, 2024

Cursed Mountain

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Résumé :

Le héros escalade une gigantesque montagne de l’Himalaya dans le but de retrouver son frère disparu. Au fil de son ascension, divers personnages croisent son chemin : villageois, pèlerins, montagnards, moines bouddhistes, mais aussi les esprits maléfiques des gens morts dans la région et désormais prisonniers des limbes.

Avis :

Outre les premiers zombies de Resident evil, les brumes terrifiantes de Silent Hill ou le folklore asiatique de Project zero ou Forbidden siren, le survival horror peine à se renouveler depuis quelques années. Il existe bien quelques productions indépendantes qui méritent le détour comme Rule of rose, mais les ficelles paraissent éculées. Ce constat explique sans doute la perte de vitesse du genre sur les différents supports. Pourtant, la Wii s’est montrée assez réceptive pour accueillir des jeux pas forcément irréprochables qui ont néanmoins écaillé son image de console pour casual gamers. Alors, un voyage dépaysant qui vous fait frissonner de peur ou jette un froid sitôt la manette en main ?

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Loin des péripéties de Tintin au Tibet ou des facéties d’un Eddie Murphy dans Golden Child, Cursed moutain se propose de plonger dans le folklore bouddhiste et d’entrevoir la face cachée d’une religion derrière les méditations zen, le karma ou la réincarnation. On y découvre une culture riche qui recèle une profondeur assez chargée en divinités avec une approche intéressante de l’au-delà. Concept qui se confond, du moins s’entremêle, de manière plus intime que l’on pourrait croire à la vie, par extension notre dimension de réalité. Les dénominations et autres appellations ne manquent pas et risquent d’en décontenancer plus d’un s’ils ne s’attardent guère pour rechercher la définition des termes avancés.

Sur ce point, Cursed mountain fait montre d’une érudition peu commune dans le domaine. Il est vrai qu’aucun jeu vidéo à l’heure actuelle ne s’est penché sur la question. En terrain vierge, il est donc plus facile de retenir l’attention. Cela vaut également pour le cadre. Si le Tibet n’est pas évoqué de manière explicite, les chaînes himalayennes se chargent de combler les blancs narratifs. D’ailleurs, les villages au pied du Chomo Lonzo (le sommet existe réellement), les monastères, les refuges ou les stupas et leurs banderoles de prières se révèlent autant d’éléments qui concourent à se sentir en terre inconnue. En ce sens, cette atmosphère empreinte de mysticisme et de traditions ancestrales demeure clairement le point fort du jeu.

Si l’ambiance pesante est au rendez-vous, ce n’est pas forcément le cas de la peur, clef de voûte de tout survival horror. En effet, la montée progressive de l’angoisse se montre déséquilibrée à plus d’un titre. Entre des séquences d’exploration très linéaire et des affrontements à ne plus savoir qu’en faire, il aurait été plus judicieux de distiller cette appréhension grâce à des interventions spectrales plus sporadiques et saisissantes. Au lieu de cela, l’on sent poindre les revenants via des espaces plus ou moins larges (dans la majorité des situations), une image décolorisée et distordue, ou encore l’émergence d’une cinématique d’introduction qui coupe court à d’éventuels sursauts.

Autre point noir, l’aspect survie du soft. Vous disposez de munitions virtuellement infinies. En ce sens, la crainte d’avoir à en découdre avec peu de moyens se volatilise. On saluera néanmoins l’originalité des armes. D’un simple piolet en passant par des spectres sacrés (kartrika, khorlo…), elles peuvent effectuer un rituel de compassion pour renvoyer les morts d’où ils viennent. Là encore, cette possibilité permet un regain d’énergie facile qui n’apporte aucun challenge. À vrai dire, les bâtonnets d’encens qui jonchent votre parcours s’accumuleront dans votre besace sans que vous en ressentiez le besoin de les utiliser, encore moins de les économiser. En fin de partie et avec un minimum de prospection pour briser les jarres les recélant, il ne sera pas impressionnant d’arriver à atteindre les 40 bâtonnets pour vous soigner.

Devant un environnement aussi hostile qu’enchanteur, l’on aurait pu espérer que celui-ci se ligue contre nous et effectue une véritable menace en marge de la malédiction. L’on a bien droit à quelques séances d’équilibriste exigeant simplement de maintenir la wiimote sans ciller ou marcher contre des flancs abrupts, le danger demeure minime, voire inexistant. Même l’escalade ne requiert aucune compétence particulière. Les parois sont fragiles lorsqu’elles sont glacées, il suffit donc d’éviter de la gravir à toute « allure ». La dernière ligne droite vous offrira la possibilité de récolter des bouteilles d’oxygène (altitude oblige) qui s’accumuleront aussi aisément que les bâtonnets. Hormis le point de départ où Éric se trouve sur la réserve, la jauge restera quasiment à son maximum.

Sur le plan technique, Cursed mountain peine à relever le niveau. Malgré un level design inusité dans le domaine vidéoludique et immersif, les limites de la progression se heurtent rapidement sur des murs invisibles. La sensation de parcourir une succession de couloirs (même en haute montagne) prime au détriment de la variété. Tempête de neige, panorama flou, intérieur des villages et monastères à l’architecture plus ou moins similaires, le soft ne brille pas par ses graphismes peu inspirés. L’ambiance est surtout appuyée par une bande-son mesurée où les chants des moines plongent le joueur en d’autres contrées. Le doublage français est, quant à lui, soigné ; qualité assez rare quand ce critère est présent.

Rigide est le terme qui caractérise les animations. Les déplacements se révèlent mollassons et patauds. Cela génère un certain ennui tant dans les phases d’exploration où l’on a l’impression de faire du surplace que dans les combats. L’impossibilité d’effectuer des demi-tours et la constance de tourner en rond pour échapper aux fantômes et trouver l’angle adéquat sera votre lot quotidien pour en arriver à bout. D’ailleurs, la reconnaissance des mouvements se révèle perfectible, sans compter qu’elle est exploitée sans grande originalité : affrontements, rituels d’exorcisme ou petite course effrénée.

A contrario, le choix de cinématiques sombres et figées confère un certain cachet à l’histoire, même si l’on notera quelques incohérences. Par exemple, Éric se borne à ne pas croire aux revenants et autres malédictions alors qu’il les subit de plein fouet. Absurde et peu crédible dans son comportement, il a du mal à susciter la sympathie, tout comme le reste des protagonistes vaguement esquissés. On les scinde en deux catégories, synonymes de clichés : les Occidentaux arrogants et peu respectueux des traditions ; les locaux plongés dans un monde à plusieurs facettes et ouverts au « troisième œil ». Des considérations assez sommaires compte tenu de la richesse intrinsèque du bouddhisme.

La durée de vie se révèle des plus faiblardes. Le manque de challenge associé à la profusion d’items sur votre chemin vous mènera à sept heures de jeu pour conclure l’aventure. En l’absence de contenus additionnels à débloquer, de niveaux de difficulté supplémentaires, il y a peu de chances que l’on revienne de sitôt dans ces terres gelées. Même les journaux, prophéties et carnets de route sont dissimulés de manière assez flagrante (comptez une heure ou deux en plus pour faire tous les recoins et tous les réunir). Il ne faut pas espérer se heurter à des énigmes tordues qui se révèlent bien trop évidentes ou des boss peu coriaces pour vous mettre des bâtons dans les roues. À ce titre, grosse déception concernant le boss de fin, impressionnant et néanmoins peu dangereux.

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Au final, Cursed mountain prévaut avant tout pour son atmosphère et le cadre inusité qu’il propose. Le jeu permet de découvrir une face cachée du bouddhisme avec ses démons et ses croyances plus sombres pour qui démontre un intérêt pour cette culture. Toutefois, le soft souffre d’errances techniques handicapantes (graphismes, animations…), d’une mise en scène approximative qui génère un effet de peur peu développé. L’histoire manque de rythme (comme les déplacements d’Éric) et de surprises pour rattraper un gameplay parfois redondant en dépit d’armes singulières. Ajoutez à cela une difficulté peu rebutante, une durée de vie minime et vous obtenez un survival horror assez moyen. Dommage, car le fond promettait une aventure d’un tout autre calibre.

Note : 11/20

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Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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